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Actualités - BOOK REVIEWS

VIENT DE PARAÎTRE - « Compassion des pierres », de Vénus Khoury-Ghata

On revient toujours à ses premières amours. Surtout quand elles sont placées sous le signe des muses. Vénus Khoury-Ghata, qui a annexé à son domaine le roman et les délices de la fiction, n’en revient pas moins avec ce onzième recueil, au royaume du Parnasse, à son indéfectible amour des mots (ciselés comme des pierres précieuses), à sa passion des images insolites et au rythme des vocables composant une partition aux stridences harmonieuses. Compassion des pierres (Clepsydre – Éditions de la différence – 91 pages), de l’auteur de Vacarme pour une lune morte, renoue avec une poésie libre et moderne, aux sonorités musicales, aux associations verbales surréalistes et teintées d’un certain humour. Lauréate de plusieurs prix (Apppolinaire, Mallarmé, Jules Supervielle), Vénus Khoury-Ghata a toujours la plume lyrique et garde ce souffle poétique même dans ses romans. Elle en use et abuse avec dextérité et subtilité, comme ces dames de jadis qui savaient jongler avec les philtres et les élixirs mystérieux… Ici, ce sont les thèmes du langage et du regard qui triomphent, en toute compassion ! Variation et fugue autour de la langue arabe dans une formulation bien française. Du «aleph» repêché au large de Tyr au «dad», mère de la terre, en passant par la légendaire pesanteur du «tah», une femme poète à l’humeur coquinement ludique taquine les muses et ses souvenirs les plus reculés. Propos délibérément délurés pour une fantaisie qui sait aussi mesurer la gravité des choses, des êtres, du regard et des sentiments. Écoutons ce fragment d’un discours faussement décousu et aux raccourcis imprévisibles : «Il est des mots de jardins pauvres qui croisent le fer avec les ronces. Des mots d’origines obscures qui sont l’ordinaire des morts. Les soleils rapides leur envoient des baisers jaunes. L’if silencieux les détourne des abeilles. Mots incolores qui, dormant dans les huches avec le consentement du pain, se réveillent avec les miroirs, revêtent leur écho, s’aventurent dans les villes, traversent les bouches sans regarder, boitent des deux pieds, pourrissent au contact des lèvres, terminent leur parcours dans le caniveau avec les lunes qui ont épuisé toute leur réserve d’allumettes».
On revient toujours à ses premières amours. Surtout quand elles sont placées sous le signe des muses. Vénus Khoury-Ghata, qui a annexé à son domaine le roman et les délices de la fiction, n’en revient pas moins avec ce onzième recueil, au royaume du Parnasse, à son indéfectible amour des mots (ciselés comme des pierres précieuses), à sa passion des images insolites et au...