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Actualités - CHRONOLOGIES

RENCONTRE - Mohamed Driss, directeur du TNT, présente « Un homme et une femme » au Madina - Pour l’amour des planches

Acteur, scénariste, auteur, metteur en scène et directeur du Théâtre national tunisien (TNT) depuis 1988, Mohamed Driss est à Beyrouth pour présenter sa pièce «Rajel Wa Mra’a» (Un homme et une femme), une œuvre qui a récolté plusieurs prix dont celui de la meilleure technique théâtrale, celui de la meilleure œuvre de la ville de Tunis aux Journées de Carthage (1995), le prix de la meilleure interprétation au Festival international du Caire (1996) et le prix Ushimura (Unesco), au Centre japonais de l’Institut international du théâtre IIT (1997). Cette pièce qui fait le tour des scènes de la région (Lattaquieh en 1997, Pétra en 2000) s’approprie les planches du Théâtre al-Madina ce soir, samedi 17, demain dimanche 18 et lundi 19 novembre, à 20h30. Cette pièce s’inscrit dans le cadre de la convention d’échange qui lie depuis un an le Théâtre al-Madina et le Théâtre national tunisien. Elle ouvre également, par la grande porte, les activités du TAM pour le mois de ramadan. Voilà pour les détails «logistiques». Côté «fond», il faut savoir que pour écrire l’histoire de Rajel Wa Mra’a, Mohamed Driss s’est inspiré de trois Kyogens du grand maître japonais Zéami. Mais attention, il ne s’agit pas du tout d’une prise de tête dans le genre quête spirituelle et êtres torturés. Dans le cadre, très large, de la comédie, Driss met en scène l’histoire d’une femme (jouée par un homme, eh oui) qui, lasse de vivre avec un mari ivrogne, décide d’abandonner son foyer. Pour l’empêcher d’accomplir son projet, le mari se déguise en brigand et l’attaque sur le chemin de la fuite. Mais les choses prennent une tournure inattendue… Mais alors, monsieur Driss, pourquoi donner un rôle de femme à un homme ? «On joue selon le mode japonais nakata. Mais, d’autre part, c’est pour rendre à la femme ce qui lui appartient : son humanité. On associe trop souvent la féminité de la femme à son corps. La femme-objet, une atteinte à la dignité humaine, c’est pire que la prostitution. Quand on utilise le corps pour d’autre objectif que celui du discours de l’art. Le corps devient le mulet de la contrebande». Il aurait pu être un avocat ou un médecin. Mais parce qu’il croit au théâtre, Mohamed Driss dit avoir «dévié» pour aller vers sa passion, son amour : les planches. C’est sa vocation. Il y croit. D’ailleurs, il est des choses que je ne pourrai jamais faire, dit-il. Par exemple ? «Le pitre, je ne peux pas faire le pitre. Ni gagner de l’argent en faisant des émissions télévisées. Ce n’est pas ma vocation». Driss est réaliste, «on ne change pas le monde avec le théâtre». Mais au moins, on apprend, on découvre et on partage tout cela avec le public. «Je travaille à la fois pour maintenir le théâtre, le renouveler, lui donner de la force». Dans ce sens, l’acteur lui-même joue un rôle important. «La culture vivante de l’acteur est fondamentale pour que cette société puisse, un tant soit peu, éviter de chosifier l’acte dramatique que la consommation télévisuelle a banalisé», lance le directeur du TNT. Explications : «Tout le monde croit que n’importe qui peut devenir acteur. C’est faux». D’ailleurs, pour s’en convaincre, il suffit d’aller voir ses pièces. Driss s’insurge contre la paresse qui s’installe dans le monde du théâtre. «On vous parle dans les écoles du théâtre du geste ou du mot. Tout ça c’est du bluff. Le théâtre c’est le mot, le geste, le corps, la pensée, la suggestion, la musique, la danse... En se formant, un acteur doit avoir la base de tout cela». «La théâtralité c’est quoi ?», s’interroge Driss. Et de répondre, en mimant un spectateur s’adressant à l’acteur : «Tu dois me surprendre». «Mais en même temps tout doit paraître comme si cela allait de soi», ajoute l’homme de théâtre. Le directeur du TNT envisage de concrétiser la mobilité des artistes entre le Liban et la Tunisie. «Nos deux pays ont beaucoup d’affinités. Le Liban a une élite que nous connaissons, que nous admirons, pas seulement dans le domaine théâtral mais aussi dans les autres domaines artistiques. Et Masrah al-Madina qui est un haut lieu de référence et de résistance», dit-il. Et de conclure : «Nous allons consolider le pont entre nos deux institutions. Multiplier les chances pour les jeunes artistes. Pour que cela ne soit pas, comme dit la chanson de Feyrouz, «Zourouni koulli sana marra».
Acteur, scénariste, auteur, metteur en scène et directeur du Théâtre national tunisien (TNT) depuis 1988, Mohamed Driss est à Beyrouth pour présenter sa pièce «Rajel Wa Mra’a» (Un homme et une femme), une œuvre qui a récolté plusieurs prix dont celui de la meilleure technique théâtrale, celui de la meilleure œuvre de la ville de Tunis aux Journées de Carthage (1995),...