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Actualités - ANALYSES

GOUVERNEMENT - Les nominations en toile de fond - De nouvelles alliances se mettent en place

Quand ils ne viennent pas du Nord, nos présidents y vont volontiers, pour peu qu’on les y invite. Ils en apprécient la nature, un peu rude, mais droite. Et parfois si altière, cf. les conifères cèdres. L’accueil y est de même toujours agréable, chaleureux. Vivace mais pas trop, comme un frondeur heureux. Par une belle journée d’été indien. C’est donc un petit air de vacances que le vent du Nord, assagi, a joué lors de la visite rendue par M. Rafic Hariri à M. Sleimane Frangié en son fief de Bencheay. Ce n’était pas la première rencontre des deux hommes en ces hauts lieux. Et ce ne sera pas la dernière, affirment en chœur leurs zélés partisans, qui se félicitent de la concorde retrouvée le jour même où le Concorde reprenait ses vols transatlantiques. Un rapprochement qui n’est pas tout à fait gratuit, dans la mesure où ces derniers temps M. Hariri se trouve toujours entre deux avions. On le voit en effet voltiger de Chirac à Fahd avant d’aller donner l’accolade à Schröder. En attendant d’être reçu par Bush, honneur insigne récemment refusé à Arafat lui-même. Tout cela pour rappeler, si besoin était, que notre Premier ministre n’est vraiment pas n’importe qui. Et que son agenda, en ces temps de crise mondialo-régionale, est surchargé ou surbooké comme disent les agents de voyages. On mesure dès lors l’importance, en termes de conjoncture, de sa démarche en direction du jeune leader de Zghorta. Plus exactement, force est de constater le poids, le crédit, l’influence que le milliardaire ami des étoiles accorde au ministre de la Santé. Ces considérations élevées, et même bien élevées, n’occultent cependant pas une coïncidence plutôt prosaïque. Comme par hasard, c’est à la sortie d’une virulente campagne lancée contre lui par le président Omar Karamé que M. Hariri s’est souvenu que M. Frangié, contrepoids tout à fait valable au niveau du leadership nordiste, n’était pas lui non plus dans les bonnes grâces de l’ancien Premier ministre. On aura compris le tableau : l’adversaire d’un rival est ipso facto un ami. On y court, on y vole d’autant plus vite que pour une fois on est sur la même longueur d’onde que Baabda. En effet, par une étrange maladresse, qui peut être d’une suprême habileté si elle est télécommandée, le député de Tripoli a cru devoir attaquer également le régime. En lançant des remarques acerbes à l’adresse d’un des piliers les plus solides du pouvoir, ou de l’État, le général Jamil Sayyed, directeur de la Sûreté générale. Du côté des loyalistes grand cru, on révèle que le président Lahoud n’a pas beaucoup apprécié les propos de M. Karamé. Ajoutant que, pour sa part, le chef de l’État estime inopportunes les zizanies intérieures. Et qu’en tout cas, il préfère que, lorsqu’on a des doléances ou des griefs, on les expose directement, franchement, entre quat’z’yeux comme on dit. Pour ce militaire de vocation, peu amateur de slaloms politiciens, la rectitude et la transparence sont toujours de mise. Il refuse dès lors qu’on tente d’entraîner le pouvoir, par des provocations, vers un faux débat sur les nominations, cette poire juteuse à partager qui est aussi une pomme de discorde. M. Hariri, quant à lui, a préféré riposter à M. Karamé par un geste plutôt que par une tirade cornélienne. Il s’est contenté, en diplomate désormais chevronné, d’un éloge soutenu à son hôte du jour, M. Frangié, présenté comme une figure de proue d’envergure nationale et a fortiori comme un leader nordiste de tout premier plan. Qui peut être utile pour mieux défendre le budget à la Chambre. Et pour se consoler d’un certain éloignement de M. Walid Joumblatt. Autres retrouvailles remarquées ces derniers jours, bien sûr le rapprochement entre le régime et Moukhtara, avec échange de visites. Mais aussi la récente rencontre de franches explications, pour ne pas dire de réconciliation, entre les présidents Émile Lahoud et Nabih Berry. Sur initiative de M. Mohsen Dalloul. Et au domicile d’un ami commun, c’est-à-dire en terrain neutre. Ce qui peut paraître un peu étonnant entre deux autorités d’un même État. Quoi qu’il en soit, les nouvelles alliances politiques se mettent peu à peu en place. Distinctes des contrats purement électoraux, elles s’articulent sur des sujets d’intérêt commun. Qui sont quoi, le sauvetage économique du pays ? La prévention des dangereuses retombées extérieures ? Pas du tout. Les nominations. Car on ne se refait pas, un tu l’as vaut mieux que deux tu l’auras, et les petits acquis ponctuels valent davantage que les grands principes.
Quand ils ne viennent pas du Nord, nos présidents y vont volontiers, pour peu qu’on les y invite. Ils en apprécient la nature, un peu rude, mais droite. Et parfois si altière, cf. les conifères cèdres. L’accueil y est de même toujours agréable, chaleureux. Vivace mais pas trop, comme un frondeur heureux. Par une belle journée d’été indien. C’est donc un petit air de...