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Actualités - CHRONOLOGIES

Justice - Dix ans, entre sordide et merveilleux - L’errance d’une gamine à la recherche de sa mère

Dix ans d’une séparation déchirante, débilitante, entre une mère et sa fille, ont trouvé leur épilogue dramatique, dans des circonstances invraisemblables mais vraies. Les émouvantes retrouvailles ont eu pour théâtre… la prison de Baabda, où, au milieu des cris et des larmes, une fille a pu embrasser une mère qu’il lui avait été impossible d’oublier. L’histoire remonte au début des années 90. Mère de cinq enfants, Sabah Rabah accouche d’un sixième enfant, une fille. Mais une nouvelle bouche à nourrir, pour cette famille miséreuse, est malvenue. Au terme d’un accord dont les tenants et aboutissants doivent encore être déterminés, l’enfant, une fille prénommée Mirvet, est remise par sa tante à une institution religieuse chrétienne, qui va la confier en adoption à une famille arménienne sans enfants résidant à Bourj Hammoud. Selon notre chroniqueur judiciaire Bahjat Jaber, l’enfant a trois ans au moment de son adoption, voilà environ dix ans. L’affaire se complique, cependant, quand la mère de l’enfant porte plainte contre sa sœur, Zeinab Rabah, qu’elle accuse d’avoir «vendu» l’enfant. Une enquête ayant été ouverte, Zeinab entrera en prison sous ce chef d’inculpation, alors que la police se met à la recherche de l’enfant. On ignore la raison pour laquelle cette recherche est si aléatoire, et pourquoi les responsables de l’institution religieuse au cœur de cette affaire n’ont pas été interrogés. Certes, dans les affaires d’adoption, le principe veut que la famille naturelle et la famille adoptive s’ignorent totalement, justement pour éviter les complications ultérieures, au cas où la famille naturelle viendrait à changer d’avis. Toutefois, les institutions religieuses qui rendent ce genre de service, ou qui accueillent des orphelins et des cas sociaux, continuent de suivre de loin le sort des enfants qu’elles confient en adoption. La vérité En tout état de cause, la petite Mirvet grandit dans sa famille adoptive, un couple sans enfants de Bourj Hammoud, qui lui assure un confort dont elle ne pouvait rêver. Toutefois, elle continue de nourrir la nostalgie de sa véritable mère, dont elle garde un clair souvenir. Ce mal-être ira en grandissant, jusqu’au jour où la mère adoptive, harcelée de questions, finit par révéler la vérité à Mirvet. Cette dernière fuit le domicile parental et erre, obsédée par une seule pensée : retrouver sa véritable mère. Cette errance la conduira, au travers de péripéties qui restent à déterminer, à Tripoli, où elle est cueillie par la police, qui la surprend affalée à même un trottoir de la ville. La jeune Mirvet, qui avoue candidement qu’elle cherche ses parents, sera conduite … à la prison des femmes de Baabda. Le destin fera le reste. Voilà en effet sa tante qui se présente un jour à la prison, pour y visiter une de ses amies incarcérées. Au nombre des potins que les deux femmes échangent, celle d’une adolescente à moitié folle qui dit chercher sa mère. Zeinab voit la petite et a du mal à contenir son émotion en reconnaissant sa nièce. Elle se contrôle toutefois, et , revenue à Laboué (Békaa), annonce la nouvelle à la mère. D’indescriptibles effusions marqueront les retrouvailles de la mère et de son enfant, à la prison de Baabda, quelques jours plus tard. Aujourd’hui, Mirvet Rabah attend, mais non plus parmi les criminelles endurcies de la prison de Baabda, que cette affaire soit tirée au clair. Principal point d’ombre : les raisons pour lesquelles la trace de la jeune Mirvet s’est perdue, et les liens véritables qui existaient entre la mère de l’enfant et sa sœur Zeinab, ainsi que les raisons qui ont conduit à l’arrestation de cette dernière, sur ordre d’Élias Khoury, juge d’instruction de Beyrouth. L’avocat de la mère, Saïd Alamé, ayant informé le procureur général du Mont-Liban Jean Fahed de l’affaire, ce dernier a ordonné le transfert immédiat de Mirvet Rabah vers une correctionnelle, et a demandé qu’elle soit autorisée à recevoir les visites de sa famille. En attendant que ses parents et sa famille adoptive soit entendus, ainsi que la religieuse qui a assumé les contacts qui ont mené à l’adoption. Et que la part du sordide, dans cette affaire, soit établie aussi bien que celle du merveilleux.
Dix ans d’une séparation déchirante, débilitante, entre une mère et sa fille, ont trouvé leur épilogue dramatique, dans des circonstances invraisemblables mais vraies. Les émouvantes retrouvailles ont eu pour théâtre… la prison de Baabda, où, au milieu des cris et des larmes, une fille a pu embrasser une mère qu’il lui avait été impossible d’oublier. L’histoire...