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Actualités - INTERVIEWS

Entretien - Le fondateur de NDH-France participe à un colloque au CCF - Pierre Bercis : « La France ne doit pas se voiler la face - quand il y a des violations des droits de l’homme au Liban »

Pierre Bercis est le fondateur de Nouveaux droits de l’homme (NDH)- France, association pour la défense des droits de l’homme qu’il a créée en 1977. Une ONG dont le représentant au Liban est M. Élie Abou Aoun et dont le but est, en plus de la promotion des droits de l’homme traditionnels contenus dans la Déclaration, d’inciter à la reconnaissance de «nouveaux droits» de l’homme, tels que le droit au respect de la culture, à un environnement sein, à la bioéthique… M. Bercis est de passage à Beyrouth à l’occasion du colloque de l’Adelf sur le thème «Diversité des cultures et francophonie» dans le cadre duquel il interviendra aujourd’hui au CCF. Une diversité culturelle mise à mal aujourd’hui, à l’heure où l’expression «choc des civilisations» entre l’Orient et l’Occident est sur toutes les lèvres. Selon Pierre Bercis, il y a bel et bien un choc des civilisations «entre les partisans de la démocratie et ceux des sociétés de type archaïque, mais il existe aussi une catégorie de gens rationnels qui dénoncent à la fois l’impérialisme culturel américain, lequel cherche à s’imposer à l’ échelle mondiale en faisant fi des autres sociétés» et «les méthodes de Ben Laden». M. Bercis ajoute que l’Europe «ne peut se poser en médiateur entre deux sortes d’extrémismes», elle se doit de répondre par ses valeurs. «Elle est un spectateur engagé. On ne peut rester neutre face aux attentats du 11 septembre. Elle est un exemple vivant de respect des cultures, au contraire des États-Unis, où le melting-pot est un slogan publicitaire, où les communautés ne se rencontrent jamais. Le droit de l’homme fondamental à vivre dans sa culture n’est toujours pas reconnu, mais il existe une unité culturelle européenne dans le respect de la diversité», dit-il, en évoquant le phénomène du régionalisme. Il appelle également l’Europe à faire preuve de dynamisme concernant le tiers-monde au niveau du développement, face à cette nouvelle polarisation Nord/Sud. «Peut-être va-t-on enfin pouvoir réussir à instiller le droit au développement, à la coopération, à un environnement propre, au respect des cultures, afin qu’ils soient proclamés. Nous le voulons au sein de la francophonie. Dans le cadre du sommet de Beyrouth, nous devions aussi demander aux gouvernements de respecter les droits de l’homme traditionnels. Je sais que le Liban est traditionnellement, vu de l’extérieur, considéré comme un pays de tolérance. Mais d’expérience, je sais que les droits de l’homme n’y sont pas toujours respectés». Interrogé sur la possibilité de prôner la reconnaissance de nouveaux droits de l’homme auprès des pays francophones, lesquels, pour la plupart, bafouent les droits traditionnels, il répond : «Tous les pays qui ont été baignés par la culture française ont, à un certain moment, été baignés dans la culture des droits de l’homme. Un certain nombre de peuples d’Afrique et d’Asie ont renvoyé à la face de la France les droits de l’homme qui étaient leur colonisateur. Mais il ne faut toutefois pas hésiter à tirer l’épée pour dire que la vérité est là et pas ailleurs». Et au Liban, pays où des opposants sont constamment interpellés et où les droits de l’homme sont bafoués ? «Je sais que la loi d’association de 1901 n’a pas cours au Liban, qu’il n’y a jamais eu de femmes ministres. On peut reconnaître, hélas, les droits nouveaux à l’environnement, au respect de l’intégrité génétique, physique et psychique, droits non reconnus, en violant les droits traditionnels. Mais tout ceci fait partie de la philosophie des droits de l’homme et du respect de l’être humain. Il va sans dire que les deux combats ne sont pas séparés», remarque-t-il. «Notre ONG a fait beaucoup de manifestations pour les droits de l’homme traditionnels : 300 semaines pour les disparus d’Argentine. Nous savons qu’il y a beaucoup de disparus au Liban et que ce problème n’est absolument pas pris en charge. Je lance un appel pour que le gouvernement libanais, à l’image des gouvernements argentin, chilien ou marocain, s’occupe officiellement de ce problème. Je n’ignore pas non plus qu’il y a de nombreuses personnes qui ont été enlevées et qui sont prisonnières en Syrie. Je ne suis pas un ennemi de la Syrie, je sais le rôle qu’elle a joué dans la défense des droits du peuple palestinien, mais elle n’a pas tous les droits pour autant. Tous les partis politiques en France appellent de leurs vœux à un Liban véritablement libre et indépendant, pas seulement en façade, mais en réalité. La Syrie et le Liban peuvent collaborer dans le respect mutuel de leur indépendance», souligne M. Bercis. Et de poursuivre : «Nous nous préoccupons des problèmes au Liban et nous voulons faire le maximum : il faut savoir parler franchement à ses amis. Nous réclamons également un droit d’ingérence en tant qu’association des droits de l’homme. Nous considérons qu’il s’agit d’un droit d’assistance à la personne en danger. Nous ne voulons plus de traitement de faveur : il ne faut plus se voiler la face en France quand il y a des violations de droits de l’homme au Liban. Nous avons déploré les arrestations qui ont eu lieu en août et nous le ferons à chaque fois que cela recommencera». Et d’ajouter : «Je crois qu’il y a une commission parlementaire libanaise qui s’occupe des droits de l’homme, mais je m’interroge toujours sur son rôle réel ainsi que sur la liberté d’association. J’ai été fort surpris d’apprendre que celle-ci n’existe pas. Je ne veux pas voir la main de la Syrie derrière cette interdiction de s’associer librement, non, pas du tout. Il faut que cette liberté et celle de manifester soient pleines et entières et non pas des prétextes de répression». A-t-il un message à adresser aux jeunes militants des droits de l’homme ? «J’ai eu l’occasion de le délivrer devant NDH-Liban, une association dynamique qui fonctionne de la même façon que NDH-France : battez-vous longtemps et toujours dans le respect des autorités existantes. Nous sommes des partisans du dialogue sans compromission, pour le civisme. La jeunesse en a ras-le-bol du pouvoir pour le pouvoir. Nous essayons de lui donner l’envie de se battre pour des valeurs, traditionnelles et modernes, et pour la société de demain». Un combat que Pierre Bercis mène lui-même quotidiennement.
Pierre Bercis est le fondateur de Nouveaux droits de l’homme (NDH)- France, association pour la défense des droits de l’homme qu’il a créée en 1977. Une ONG dont le représentant au Liban est M. Élie Abou Aoun et dont le but est, en plus de la promotion des droits de l’homme traditionnels contenus dans la Déclaration, d’inciter à la reconnaissance de «nouveaux droits»...