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Actualités - ANALYSES

Beyrouth déçu par l’attitude évasive des Arabes

Dans ses assises privées, le président Nabih Berry se félicite de la parfaite entente qui règne, en ces temps agités, au sein du pouvoir tricéphale. Le chef du Législatif se dit extrêmement satisfait des positions que le président Émile Lahoud affiche devant ses visiteurs ainsi que des déclarations du président Rafic Hariri, qui vont dans le même sens. Dans un satisfecit précieux par sa rareté, M. Berry ne tarit pas d’éloges sur les services rendus à la patrie par M. Hariri, à travers les périples diplomatiques exténuants qu’il effectue aux quatre coins de l’horizon. Et de rappeler, à l’instar du chef du gouvernement, que ce pays, lui-même longtemps meurtri par diverses formes de terrorisme, a été l’un des tout premiers à condamner les attentats du 11 septembre. Tout en se hâtant de dénoncer le fâcheux amalgame que l’Occident a tendance à opérer entre le droit légitime de résistance active et la subversion. De même, ajoute M. Berry, le Liban avait demandé aux États-Unis, au lendemain des attaques sur New York et Washington, de définir clairement le sens de leur combat contre le terrorisme. Puis d’avancer des preuves au sujet des parties accusées de s’y livrer, avant toute opération punitive. Bien sûr, il n’en a pas été tenu compte. Et il ne s’agissait d’ailleurs pas de prodiguer à la première puissance du monde un conseil utile. Mais de prendre ses distances pour la suite. De marquer le coup de manière anticipée. Afin que nul ne puisse par la suite accuser le Liban de s’aplatir devant les USA, posture que le président Bachar el-Assad recommande vivement d’éviter. Pour en revenir à M. Hariri, même ses contempteurs habituels estiment qu’il a fort bien fait de se répandre à l’étranger afin d’y expliciter la position du Liban. Ses démarches, ajoutent les politiciens locaux, ont permis à ce pays de faire acte de présence au-dehors, pour ne pas être laissé pour compte au moment des soldes d’automne. Gonflant peut-être un peu trop les choses, les sources citées voient dans l’initiative de M. Hariri le pendant de l’Exhortation apostolique de 1997. Dans ce sens qu’à leur avis, le président du Conseil a su, comme le pape, rappeler au monde qu’il y a moyen de faire coexister pacifiquement, harmonieusement même, des religions ou des cultures distinctes, comme le Liban en donne l’exemple. Un message de paix universelle, en somme, au moment où tout le monde ne parle que de guerre. Toujours d’après ces sources, le Liban a su se placer au-dessus de la mêlée et se trouve dès lors en droit d’en attendre une récompense. Il faut croire cependant que personne n’a au-dehors le regard assez aigu pour déchiffrer, dans le magma présent, cette leçon de haute morale et d’humanité profonde. Car les Américains, pour le peu d’attention qu’ils peuvent en ce moment prêter à ce petit pays, continuent d’en exiger qu’ils se montre sage comme eux ils l’entendent. C’est-à-dire en leur livrant des suspects (que les autorités policières ou judiciaires locales n’arrivent d’ailleurs pas à identifier vraiment et encore moins à retrouver) et en neutralisant le Hezbollah d’une façon ou d’une autre. Mais le Liban officiel s’avoue mezza voce principalement déçu par l’attitude des Arabes à son égard. Non seulement ils n’ont pas eu l’air, à Doha, de vouloir exploiter à fond dans leur discours politique actuel le modèle réconciliateur libanais. Mais encore, ils oublient que ce pays, leur partenaire au sein de la Ligue, traverse une passe économique rendue encore plus difficile par les événements en cours. C’est-à-dire qu’ils oublient qu’il a besoin de leur aide matérielle et qu’il est grand temps pour eux de s’acquitter des deux ou trois milliards de dollars qu’ils lui ont promis depuis de nombreuses années (en 82 à Fès et en 89 à Taëf). Ces remarques circulent dans les coulisses, n’affleurent pas en surface, mais restent prodigieusement étonnantes, tant elles dénotent un manque aigu du sens des réalités. D’autant que certains responsables n’hésitent pas à reprocher en privé aux Arabes riches d’avoir tout de suite volé au secours financier, caritatif, voire politique des Afghans qui ne font pas partie de la Ligue. Et lui causent en outre beaucoup de souci par leurs tentatives de transformer leur problème avec les Américains en cause islamique générale.
Dans ses assises privées, le président Nabih Berry se félicite de la parfaite entente qui règne, en ces temps agités, au sein du pouvoir tricéphale. Le chef du Législatif se dit extrêmement satisfait des positions que le président Émile Lahoud affiche devant ses visiteurs ainsi que des déclarations du président Rafic Hariri, qui vont dans le même sens. Dans un satisfecit...