Succès de la campagne publicitaire libanaise

Depuis la catastrophe qui a frappé les villes de New York et de Washington, la presse US publie des encarts publicitaires s’adressant au peuple américain pour le réconforter dans son deuil. Après avoir été l’un des premiers pays arabes à condamner les attentats, le Liban a également pris l’initiative de lancer une campagne de presse à l’adresse d’un peuple ami pour lui signifier toute sa sympathie et sa solidarité. Pour le gouvernement libanais, cette campagne visait surtout à améliorer l’image du Liban auprès du peuple américain et à établir un véritable dialogue des cultures à travers une communication fondée sur la notion de «valeurs». Il s’agissait de dresser un pont entre les deux peuples, loin de toute considération politique, religieuse ou ethnique. «We the People» : «Nous le peuple» (d’Amérique, déclarons…). Ces premiers mots de la Constitution américaine ont servi d’accroche au texte publicitaire conçu et réalisé par Saatchi & Saatchi-New York, en collaboration avec le bureau de l’agence à Beyrouth. Abordant les principes institutionnels sacro-saints de l’Amérique, les concepteurs ont pensé grand en utilisant cet extrait de la déclaration de Virginie. Immédiatement après, comme un écho venant de loin, une phrase laconique : «On aurait dit Beyrouth…». Exprimée spontanément par un New-Yorkais qui contemplait avec ahurissement la scène apocalyptique des tours des Twin Towers qui s’effondraient et reprise ensuite par la CNN, cette expression a été choisie par l’agence publicitaire pour suivre l’extrait de la Constitution américaine, «afin de dresser les ponts entre les deux peuples», souligne une source proche du gouvernement. «Il fallait relever que les deux peuples, qui ont expérimenté le même malheur, étaient en quelque sorte unis dans la souffrance. C’était pour dire que les Libanais, en connaissance de cause, partageaient l’affliction des Américains et compatissaient entièrement avec eux». Une manière aussi de rappeler que le Liban a également subi les affres du terrorisme, comme l’ont souvent rappelé ces derniers jours les autorités libanaises, a encore souligné cette source. Mais ce n’est pas simplement dans la souffrance que les Libanais se joignent au peuple américain. Le Liban adhère également aux valeurs qui sont celles de l’Amérique, celles de la démocratie, de la tolérance et de la liberté, qui sont partagées par le monde entier. «Ces valeurs se situent au-delà des considérations ethniques et religieuses. Il s’agit de principes fondamentaux, universels, et c’est pour cela que nous nous sentons aussi concernés», souligne la source gouvernementale. «D’ailleurs, la dernière partie de notre message a été conçue dans le même esprit, puisqu’elle prône la paix, une aspiration commune aux deux peuples», poursuit cet interlocuteur. Cette campagne, remarquable dans le fond et dans la forme, a suscité de multiples réactions favorables aussi bien parmi les Américains que parmi les Libanais. «À la lecture de votre message dans USA Today, je voulais vous dire qu’effectivement, on aurait dit Beyrouth», écrit un Américain. «J’ai perdu plusieurs de mes amis lors des attentats contre le poste des Marines au Liban. Mais cette fois c’est différent, non pas parce que les actes contre les Américains nous ont rendus plus forts, mais parce que vous nous avez rejoints dans notre quête pour la paix», a-t-il conclu. «En tant que peuple, nous percevons le monde à travers nos médias, en remettant rarement en question ce qui est dit ou écrit», témoigne un autre Américain. «Par conséquent, dit-il, nous craignons ces villes que nous connaissons si mal. Je vous remercie, au nom du peuple, pour les mots de soutien que vous avez publiés et vous promets que je me cultiverai et visiterai votre pays pour y lier de nouvelles amitiés».