Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGES

Ils sont plus de 4 400 patients dans le monde à bénéficier de la DBS - Dr Benabid : « La stimulation profonde du cerveau est la technique chirurgicale de référence »

Depuis environ une décennie, le traitement de la maladie de parkinson a pris un autre tournant. Une nouvelle technique, celle de la stimulation profonde du cerveau, plus connue sous le nom de DBS ou Deep Brain Stimulation, a vu le jour permettant ainsi à des milliers de malades de se débarrasser des tremblements et des mouvements anormaux qui caractérisent cette maladie, et de reprendre une vie normale. En visite au Liban, le père de cette technique, le Dr Alim-Louis Benabid, a exposé à L’Orient-Le Jour les avantages de cette méthode révolutionnaire et les circonstances qui l’ont mené à la mettre au point. Le Dr Benabid est chef du service de neurorchirurgie, professeur de biophysique et directeur de l’unité des recherches nucléaires au Centre hospitalier universitaire de Grenoble. Aussi incroyable que cela puisse paraître, la chirurgie a été le premier traitement pour la maladie de Parkinson. «Jusqu’en 1960, on disposait d’une seule approche thérapeutique, celle de la chirurgie qui consistait à détruire le thalamus ou le pallidum dans le cerveau, explique le Dr Benabid. En 1965, le traitement par la L-Dopa a commencé et la chirurgie a pratiquement disparu puisqu’elle n’était plus appliquée que chez des patients qui présentaient des cas vraiment difficiles. C’est au cours de ces interventions-là qu’on a découvert, vers la fin des années quatre-vingt, qu’on pouvait obtenir les mêmes résultats de destruction par la stimulation à haute fréquence. Ainsi, on a eu de nouveau recours à la chirurgie dans le traitement du parkinsonien». La stimulation à haute fréquence consiste à implanter une électrode à l’endroit même où les lésions étaient pratiquées dans l’ancienne méthode chirurgicale. Cette électrode est connectée à un stimulateur fixé sous la peau au niveau supérieur du thorax et qui l’alimente de façon continue à une fréquence supérieure à 100 hertz. «Cela entraîne, d’après l’interprétation qu’on en a actuellement, une inhibition équivalente à ce qu’on aurait eu avec la technique de destruction», indique-t-il. Comment est née cette méthode ? Le Dr Benabid raconte que la technique de stimulation existait déjà, mais il l’a appliquée à d’autres fins. «J’utilisais cette technique pour la douleur, quand je me suis aperçu que dans la thalamotomie (destruction du thalamus, technique initiale pour le traitement chirurgical du parkinson), la stimulation à haute fréquence en cours d’intervention bloquait les tremblements, confie-t-il. «C’est ce qui m’a donné l’idée d’utiliser le système à haute fréquence. C’est la découverte qui a eu lieu, mais le matériel existait déjà et la technologie en gros est très voisine de celle appliquée dans les thalamotomies». Le Dr Benabid ajoute que le deuxième progrès effectué dans ce domaine demeure l’introduction, depuis 1993, d’une nouvelle cible qui n’est autre que celle subthalamique, en se référant aux données de la recherche en neurosciences. Le patient idéal pour cette technique est un parkinsonien «répondant bien à la L-Dopa, n’ayant pas d’altérations intellectuelles, et dont l’état présente une bonne balance entre les risques et les bénéfices». «Il faut que le malade soit déjà à un stade sévère de la maladie pour que le risque pris soit correctement balancé par l’amélioration importante apportée par la chirurgie, dit le Dr Benabid. Mais la tendance vers des interventions précoces se fait remarquer de plus en plus notamment quand il s’agit d’un malade dont l’état s’aggrave sérieusement et qui, dans deux ou trois ans, devra être impérativement opéré». En ce qui concerne les risques à encourir, le Dr Benabid indique qu’ils sont ceux pris dans n’importe quelle chirurgie. «À partir du moment qu’on introduit une électrode ou un cathéter à l’intérieur du crâne, on risque de heurter un vaisseau et d’avoir une hémorragie, remarque-t-il. En fait, ce risque est très faible, il est de l’ordre de 1%. Le risque par rapport aux bénéfices est considéré donc comme minime». Un traitement réversible Quels sont les avantages de cette technique ? «L’avantage de cette technique c’est qu’on ne détruit pas le cerveau. répond-il. À la limite, on peut implanter des électrodes dans plusieurs cibles et ne pas les utiliser, alors qu’on ne peut pas s’amuser à faire des lésions aux différents endroits du cerveau. C’est une technique moins lésante et réversible. Je veux dire par là que si un jour on trouve le traitement miracle, il s’agira alors d’arrêter les stimulateurs et les malades n’auront pas gardé de séquelles de cette intervention». Et de poursuivre : «Un autre avantage de cette technique c’est qu’elle peut être adaptée à l’état du patient, c’est-à-dire que si les symptômes de la maladie s’intensifient, on peut augmenter les paramètres de stimulation». Et les inconvénients ? «L’inconvénient principal demeure le coût de cette intervention qui dépasse les 30 000 dollars américains, déplore le Dr Benabid. Puis, tous les sept ans, il faut changer les stimulateurs». «En fait, ça ne coûte pas plus cher que le traitement médical, ajoute-t-il. Simplement, le patient paie son traitement tous les mois, alors que le stimulateur il faut qu’il le paie d’un seul coup». Le gouvernement français contribue-t-il aux frais de cette opération ? «Oui, affirme-t-il. Mais ils sont toujours très prudents avant de libéraliser une méthode afin d’éviter une surconsommation inutile. Mais depuis cette année, le nombre des services ayant obtenu un crédit spécial du gouvernement pour l’application de cette méthodologie s’est élevé à quatre. L’année qui vient, je crois que quatre ou cinq autres services obtiendront à leur tour l’autorisation pour appliquer cette chirurgie, l’objectif étant d’avoir une vingtaine de centres en France opérant chacun environ cinquante malades par an». Outre la France, la technique de stimulation profonde est utilisée dans toute l’Europe. Actuellement, elle se propage en Inde, au Japon, en Australie et à Singapour. C’est une technique qui se diffuse très rapidement et qui a été appliquée l’an dernier sur 4 400 malades dans le monde. Et aux États-Unis, a-t-on recours à cette technique ? «Oui, mais la FDA n’a toujours pas donné son consentement, indique le Dr Benabid. Elle devait le faire en mars dernier mais elle a reporté sa décision». «Il n’y a pas de doute que la FDA donnera son consentement, assure-t-il, mais ses critères de choix ne sont pas toujours d’ordre purement scientifique ou médical, ils sont aussi d’ordre administratif. Donc, pour le moment cette technique n’a pas l’agrément de la FDA mais elle est pratiquée dans plusieurs centres aux États-Unis». Quel est l’avenir de cette technique au Moyen-Orient ? «Actuellement, on considère que c’est la technique chirurgicale de référence pour la maladie de Parkinson, soutient le Dr Benabid. Les greffes sont encore au stade expérimental, même si des équipes avancent des résultas meilleurs que d’autres. Mais on ne peut pas prétendre que c’est un traitement à proposer au même niveau». Et de conclure : «À partir du moment où les malades ne répondent plus au traitement pharmacologique, se pose la question de la chirurgie. Et à partir du moment où se pose la question de la chirurgie, le consensus est en train de s’établir : c’est une implantation bilatérale du noyau subthalamique qu’il faut faire».
Depuis environ une décennie, le traitement de la maladie de parkinson a pris un autre tournant. Une nouvelle technique, celle de la stimulation profonde du cerveau, plus connue sous le nom de DBS ou Deep Brain Stimulation, a vu le jour permettant ainsi à des milliers de malades de se débarrasser des tremblements et des mouvements anormaux qui caractérisent cette maladie, et de...