Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIES

DIMANE - « Des arrestations qui ramènent le Liban au rang des pays sous-développés » - Lahoud rencontrera Sfeir mardi

Viendra, viendra pas ? Jusqu’au bout, le suspense a été maintenu, même si les initiés à Dimane savaient que le président de la République ne rencontrerait pas le patriarche maronite ce dimanche. Les autres, venus notamment de Beyrouth, l’attendaient, leur conviction renforcée par une présence inhabituelle d’agents de divers services au siège patriarcal. Mais ce n’est que lorsque vers midi, le cardinal a pris le chemin de Hasroun pour déjeuner avec les membres du forum national pour les jeunes, qu’il a fallu se rendre à l’évidence : le président ne viendra pas. Pour cause d’agenda patriarcal chargé, dit-on. Dimane l’accueillera donc probablement mardi. Le lieu est d’une sérénité absolue, un cadre propice à la méditation. À voir le siège patriarcal de Dimane, on pourrait presque croire que les misères des humains ne peuvent pas traverser ces murs épais, polis par les ans. Pourtant, ici comme à Bkerké, le patriarche Nasrallah Sfeir reste à l’écoute de ses fidèles dont les problèmes s’aggravent de jour en jour. Et en ce frais dimanche d’août, le vieil homme à la barbiche blanche est moins souriant que d’habitude. Devant ses visiteurs – et comme tous les dimanches, ils sont nombreux – il cherche à éviter les sujets épineux, mais ses silences en disent aussi long que d’éventuels discours. Selon ses proches, le patriarche est offusqué par ce qui se passe, mais il ne veut pas encore exprimer ouvertement sa colère avant d’avoir entendu le président de la République. La visite de ce dernier avait été annoncée pour ce dimanche, mais pour des raisons de rendez-vous déjà pris, elle a été reportée à mardi, sans que le report n’ait été officialisé. Un timing qui arrange tout le monde C’est pourquoi, dès le matin, les villageois de Dimane guettent la route principale. En voyant une jeep à l’allure vaguement militaire, ils assurent que le président ne tardera pas. Mais les heures s’écoulent et les passages officiels se limitent à un convoi de la police militaire qui ne s’arrêtera même pas au siège patriarcal. À 11 heures, tout le monde en est désormais sûr, le président ne viendra pas. Aussitôt, diverses interprétations commencent à circuler. Pour certains, le patriarche est trop outré pour vouloir entendre la version officielle. Pour d’autres, c’est au contraire le président qui ne veut pas venir en plaideur. Mais les plus sages – et sans doute les mieux informés – estiment plutôt qu’il s’agit d’une simple confusion d’agenda, puisque de toute façon, le président se rendra cette semaine à Dimane. Le patriarche ayant donné un rendez-vous à tous les membres de la rencontre de Kornet Chehwane mercredi, il recevra le président avant cette date. Lundi, les rendez-vous étant déjà pris, il ne reste plus que le mardi, un jour qui arrange tout le monde, car les personnes déférées samedi devant la justice militaire auront entre-temps été entendues par le juge d’instruction militaire Abdallah Hajj, ce qui permettra à tout le monde de se faire une idée plus précise de la réalité de leurs aveux au cours de l’enquête préliminaire. Sans compter le fait que l’enquête préliminaire bouclée, les prévenus pourront désormais recevoir des visites et leurs conditions de détention devront – en principe – s’améliorer. Sfeir attend du concret En principe donc, le président doit se rendre à Dimane mardi, et selon les proches du patriarche, il sera le bienvenu, même si les sujets qui seront abordés au cours de l’entretien suivi d’un déjeuner seront très sérieux. Mgr Sfeir souhaite en effet obtenir des détails concrets, susceptibles de le convaincre du bien-fondé des dernières arrestations. S’il n’a nullement l’intention d’entreprendre quoi que ce soit qui serait de nature à entraver le cours de la justice, il espère obtenir des explications claires sur les derniers événements qui ont provoqué un malaise au sein de la communauté chrétienne, la ramenant pratiquement sept ans en arrière. Dans les milieux loyalistes, on précise pourtant que le malaise est injustifié et que le président a montré qu’on ne pouvait ignorer les chrétiens dans l’exercice du pouvoir et ce n’est pas parce que certains membres de la communauté sont interrogés par la justice que l’ensemble de la communauté doit se sentir pris pour cible. À Dimane, on affirmait hier que tous ces thèmes seront en tout cas abordés par le patriarche et le président. Selon certaines rumeurs, il sera aussi question de l’éventuelle implication d’autres personnalités, membres de la rencontre de Kornet Chehwane, et du souhait du patriarche de voir cesser la série des arrestations. Certains journalistes relevaient d’ailleurs le fait que les milieux loyalistes ne voyaient pas d’un bon œil la création de la rencontre démocratique et que les ennuis du Dr Toufic Hindi tombaient pour eux, à point nommé. D’autres, au contraire, conseillaient d’attendre les prochains jours pour connaître les dessous de l’affaire et soulignaient qu’en fin de compte, il faut faire confiance au patriarche qui saura poser au président toutes les questions qui taraudent les Libanais. L’homélie patriarcale Hier, donc, le mot d’ordre à Dimane était d’attendre, en restant aussi discret que possible. C’est d’ailleurs pourquoi dans son homélie, le patriarche Sfeir s’est contenté de dénoncer – violemment – les procédés, tout en évitant les détails. «La patrie, a-t-il dit, traverse actuellement une période très inquiétante. Nous ne faisons pas ainsi allusion à la situation économique, ni à l’émigration des jeunes à cause du chômage galopant, ni ce qui se dit sur la chute du Parlement, du Conseil des ministres, du Conseil économique et social, de la Caisse nationale de sécurité sociale, autant d’affaires dans lesquelles les responsables semblent irresponsables, faisant assumer à la justice plus qu’elle ne peut supporter. Non, nous parlons de la vague d’arrestations qui a ramené le Liban, dans les médias étrangers, au niveau des pays très sous-développés, qui ne tiennent pas compte de la Constitution ni des droits de l’homme, ne respectent pas la loi et les procédures judiciaires, et qui semble refuser officiellement toute réconciliation nationale à laquelle œuvrent des citoyens sincères. Il ne nous reste plus qu’à prier pour que Dieu aide les responsables à régler les problèmes dont souffre le Liban et à trouver une solution rapide et honorable qui rassure les Libanais et leur montre que leur pays est encore un État de droit et d’institutions». Mgr Sfeir a ensuite reçu une délégation de scouts français en short et foulard, très pittoresques et très émus, puis la centaine de participants au quatrième forum national pour les jeunes qui s’est tenu du 15 au 19 août à Fatka. Le forum regroupait des jeunes du Liban, de Syrie, d’Égypte, de France et du Canada, dans le but de pousser aux échanges entre les jeunes. Devant un auditoire particulièrement attentif, le patriarche a insisté sur l’importance du dialogue au Liban entre les citoyens de toutes les religions, dialogue vécu au quotidien et perçu comme un enrichissement mutuel. Kabalan Issa el-Khoury critique Aoun Le patriarche a encore reçu une délégation des comités populaires présidée par Maan Bachour, qui est un visiteur assidu de Dimane. Vers midi, le patriarche s’est rendu au couvent des sœurs de la Charité, à Hasroun, pour déjeuner avec les participants au forum national. Samedi, le patriarche avait eu, comme chaque jour, un agenda rempli. Il avait ainsi reçu le député Kabalan Issa el-Khoury qui s’en était pris au général Aoun, se demandant comment il pouvait appeler les jeunes à émigrer, leur émigration servant les intérêts d’Israël. «Cette logique détruit le Liban et il est temps de ne plus lancer des slogans qui ne servent personne et surtout pas Geagea, Aoun ou les PNL, alors que sévit une crise économique sans précédent». Kabalan a demandé au patriarche de déployer tous les efforts possibles pour stopper cette émigration. «D’autant que le Liban ne peut exister sans les chrétiens», et il a demandé à tout le monde de s’en remettre au patriarche, «dont les positions sont sages». Dans sa retraite tout près des Cèdres du Liban et du village de saint Charbel, le patriarche maronite prie sans relâche pour son pays et son peuple. Ses positions sont certes sages, mais que de responsabilités pèsent sur ses épaules…
Viendra, viendra pas ? Jusqu’au bout, le suspense a été maintenu, même si les initiés à Dimane savaient que le président de la République ne rencontrerait pas le patriarche maronite ce dimanche. Les autres, venus notamment de Beyrouth, l’attendaient, leur conviction renforcée par une présence inhabituelle d’agents de divers services au siège patriarcal. Mais ce n’est...