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Actualités - CHRONOLOGIES

CORRESPONDANCE - Onzième édition de « Musik der Welt » - Fairouz à Bâle : un moment unique, une rencontre magique avec le public

BALE- Zahi HADDAD … Kifak anta?… applaudissements… Kifak anta ?… – En retard !… et ici les retardataires doivent patienter! Attendre l’entracte pour ne pas déranger l’harmonie qui baigne déjà la salle dans laquelle se produit Fairouz. Kifak anta ?… Ici, c’est Bâle. Cette petite ville qui enjambe le Rhin s’apprête à vibrer sur les rythmes de la onzième édition de «Musik der Welt». Et cette année, la musique du monde trouve ses sonorités à Dakar, Lahore, Bamako, Oran, Téhéran, Le Caire ou encore en Roumanie et en Macédoine. Avec en point d’orgue : Beyrouth et… Fairouz, en ouverture mercredi dernier de cette édition 2001 de la Fête de la musique. Elle représente un pont pour les Beyrouthins qui cherchent un nouveau chemin de cohabitation, commente Thomas Kayser, organisateur de l’événement. Le Liban, en instantané, pour déchirer les clichés et briser les filtres collés à l’Orient. Un festival, dédié à «l’Est musical», pour dépasser ces lieux communs qui compartimentent et réduisent les cultures et musiques d’un «sous-continent», si riche et si contrasté. Pour leur plus grand bonheur, les quelques retardataires ont finalement été discrètement accueillis dans le sacro-saint des saints. Imperturbable, Fairouz enchaîne. Fi chi Am’bissir, Ichtaqtellak, Sallimleh Alayhi : les accords jazzy de Ziad sont à l’honneur. «Probablement plus accessibles à nos sensibilités occidentales», confiera admiratif ce journaliste de la télévision suisse romande. Et c’est là que prend toute sa dimension le «grand moment culturel qui réunit le monde arabe sans exclure le monde occidental», souligne Thomas Kayser. Une véritable rencontre Un frisson parcourt la salle : Shady nous renvoie à nos souvenirs d’enfance restés intacts dans nos cœurs avant que nous ne nous «accrochions les uns contre les autres». Assi et Mansour nous parlent et nous font renaître : Baadak habibi wa al hawa baado hawa, Jabal al-Cheikh, les envolées lyriques se succèdent alors que l’orchestre symphonique de Beyrouth et le philharmonique d’Arménie entraînent l’audience sur les rythmes les plus soutenus. Fairouz s’éclipse, le temps de changer de robe. Les choristes réchauffent un public jusque-là un peu timide. Interloqué. Foule bigarrée aux atours des plus simples et aux accents divers – libano-suisses allemands en tête – loin des cigares et des strass beyrouthins, les quelque mille cinq cents communiants restés sur leur réserve s’apprêtent à rejoindre les anges tellement l’instant est unique. «C’est une rencontre formidable pendant laquelle chacun a aidé l’autre à créer quelque chose de formidable», s’exclamera Thomas Kayser après le concert. Les têtes, les bustes se décontractent, se dégèlent et ondulent sur les rythmes «rahbaniens», scandés sans interruption par les applaudissements et les cris qui fusent. La petite salle vibre de ses mille cinq cents âmes. Tandis que la passion et la ferveur se lisent sur les visages et les mains des inconditionnels, le bonheur d’être tout simplement là et de participer à la fête se lit dans les yeux de ceux qui découvrent un monde totalement inconnu, qui en décèlent autant la chaleur que la complexité. Le message passe. L’intensité est à son comble. Fairouz est à nouveau sur la scène du Stadtcasino. Elle a troqué le noir contre le blanc qui l’éclaire de mille et une paillettes. Elle semble transportée sur un nuage que rien ne peut troubler. Son timbre perce le silence d’une audience qui retient son souffle. Qui rebondit sur les notes et les paroles de Zaki Nassif : sublime Ahwak, supportée par les magnifiques élans du qanoun qui l’accompagne. Impeccablement posée, la Voix du Liban semble suspendue dans l’air. Irréelle de pureté. Le contraste est saisissant : raide au milieu d’un éclatant monde de musique, Fairouz assiste à la renaissance de toute une salle. Yara et Akhir Ayyam al-Sayfiyyé finissent de conquérir une audience qui chavire sous les accords d’un exceptionnel duo de ouds. « Un grand moment ! » L’émotion de la diva est elle aussi à son comble alors qu’elle nous offre un somptueux Ruddani, ouvert par une frémissante introduction ! Inévitable alors de repenser aux joies et aux bouleversements de toute une région, de toute une culture qu’elle inscrit en notes d’or sur des partitions éternelles. Inévitable de succomber à cette voix. À cette femme qui se laisse prendre par sa musique et l’engouement qu’elle suscite, elle qui se surprend peut-être à jouer de la tête sur Daq Khilqé, composée par Ziad. Ce fils qui a magistralement réorchestré le patrimoine laissé par un père qui imagina avec son frère Mansour l’inoubliable Nihna wel Qamar, unique rappel de la soirée bâloise, après trois heures d’une rencontre magique entre deux mondes que tout voudrait opposer. Mais que la voix de Fairouz, le génie de Assy et le jazz de Ziad poussent à communier. Cette union voulue par Fairouz qui, visiblement très émue, unissait ses mains à son cœur pour les offrir à son public rhénan, debout pour l’ovationner et la rappeler sur scène. «Une rencontre formidable, un grand moment pour le public, pour Bâle et pour Fairouz qui a été absolument ravie», commentait Thomas Kayser. C’est d’ailleurs un pareil rapprochement de cultures qui a motivé Fairouz à se rendre à Bâle et à partager l’affiche avec d’autres artistes libanais comme Rabih Abou Khalil, Mahmoud Turkmani, Rabih Mroué et Élias Khoury, ainsi qu’avec quatre films qui, présentés en marge du festival, décrivent la guerre et notre diversité : le Liban, en quelque sorte à l’image de Bâle, carrefour des cultures. Également présents, Khaled, Natacha Atlas ou encore les Sénégalais Baaba Maal et les Roumains Taraf de Haidouks. Autant de cultures musicales que de façons de les exprimer. Autant de couleurs du monde et de métissages pour fêter la musique ! Et la paix que nous ont, une nouvelle fois, apportée Fairouz et son orchestre.
BALE- Zahi HADDAD … Kifak anta?… applaudissements… Kifak anta ?… – En retard !… et ici les retardataires doivent patienter! Attendre l’entracte pour ne pas déranger l’harmonie qui baigne déjà la salle dans laquelle se produit Fairouz. Kifak anta ?… Ici, c’est Bâle. Cette petite ville qui enjambe le Rhin s’apprête à vibrer sur les rythmes de la onzième...