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Actualités - ANALYSES

Le pouvoir tente d’éviter des effets détonants - Le piratage : un double scandale financier et politique

Dans nombre d’autres pays, même aussi peu évolués sur le plan institutionnel, un scandale comme le piratage des communications téléphoniques internationales aurait sérieusement ébranlé le pouvoir. Il est en effet pour le moins sidérant d’entendre en plein Parlement le président du Conseil : 1) - Faire lui-même une révélation aussi fracassante. En précisant que le détournement coûte au Trésor un manque à gagner annuel qui se chiffre à quelque 300 millions de dollars. 2) -Refuser cependant d’en divulguer les tenants et les aboutissants. 3) -Répliquer même, avec un geste désinvolte de la main, aux députés qui réclament des poursuites, que la justice n’y peut rien. Ce qui est pour le moins fort de café. D’autant qu’auparavant, au sujet des écoutes téléphoniques, le chef du gouvernement avait promis d’actionner le parquet. Ce qui revient à dire que les pirates, intouchables, sont encore plus puissants et mieux protégés que les services, dont on dénonce pourtant les pouvoirs abusifs ! Le gouvernement veut donc marquer le coup. Mais ne tient visiblement pas à provoquer un maelström politique qui le mettrait lui-même à mal. On entend ainsi le ministre ad hoc, M. Jean-Louis Cardahi, soutenir sans sourire ni sourciller qu’au stade actuel, rien ne permet d’impliquer dans ce scandale un ministre ou un député, ni actuel ni même ancien. M. Cardahi, dont les savantes explications ont fait l’admiration de M. Walid Joumblatt, indique en substance que l’astuce consiste à acheter à l’étranger des heures de réseau à tarif réduit puis à les revendre bien plus cher localement, à titre de communication de rappel établie à l’extérieur (call back). Cela nécessite un matériel assez sophistiqué comprenant des paraboles satellitaires ou des sites web. Du coup, le réseau officiel est blackboulé et aucun droit n’est reversé au Trésor. Le ministre rappelle qu’il avait prévenu le Parlement. Mais, au sujet des rumeurs persistantes sur l’implication de parties (de partis ?) politiques, il se borne à répéter qu’aucun ministre, aucun député n’est en cause. Sans préciser pourquoi dans ce cas ni les noms des suspects ne sont rendus publics ni des poursuites judiciaires engagées contre eux en bonne et due forme. Autant donc pour l’État de droit et pour le respect que lui vouent les autorités locales. Ce qui renvoie incidemment à l’adage tout aussi local qui se traduit à peu près ainsi : «Gare au gardien, il peut avoir la main aussi longue que le bras». Quoi qu’il en soit, cette affaire réveille les souvenirs somnolents de l’ancien ministre concerné, M. Issam Naaman. Qui soutient aujourd’hui que lui aussi avait donné l’alerte, ajoutant qu’on n’avait pas voulu l’entendre. Il avait pourtant tenu une conférence de presse, ajoute-t-il, pour divulguer la liste de centres spécialisés dont il disposait. Centres qui essaimaient entre Beyrouth, Tripoli, Jounieh, le Chouf, la banlieue-sud et Zahlé. M. Naaman indique également qu’il avait notifié le parquet et qu’une enquête avait été ouverte. Ce qui avait donné deux splendides descentes de police chez des revendeurs à la petite sauvette, à Aicha Bakkar et Bourj el-Ghazal. Et puis, dodo, le dossier des oreilles pirates avait pu dormir sur ses deux oreilles dans les douillets tiroirs des officiels. Il n’empêche que le ministre actuel, M. Cardahi, plus soucieux des intérêts du Trésor que du tapage médiatique, assure avoir entrepris des actions dès son entrée en fonctions pour mettre fin au piratage. Il précise qu’il fournissait des données au parquet pour des rafles et que plusieurs particuliers ont été appréhendés. Ajoutant que son département tente de prendre contact avec les sources d’approvisionnement extérieures pour réserver les heures de communication et couper l’herbe sous le pied des exploitants illégaux. Autrement dit, l’État paye pour éliminer une concurrence déloyale qu’il lui suffirait de mettre au piquet ! Des officiels soutiennent de leur côté que le parquet a fait arrêter nombre de gens et s’efforce de leur tirer les vers du nez. Répétant que le scandale n’a pas de relents politiques et attribuant aux impératifs techniques de l’enquête la discrétion dont elle se trouve entourée. Scandale pour scandale, on notera que les débordements des écoutes téléphoniques n’ont pas été jusqu’à capter ceux des communications internationales ! Dans un cas comme dans l’autre, on se retrouve face à des îlots d’insalubrité qui infestent non seulement le pays mais les institutions elles-mêmes. Souvent à l’abri du droit d’autoprotection que certains particuliers s’accordent, comme les camps palestiniens, sous prétexte d’action résistante. Et dont la Résistance en tant que telle se lave les mains.
Dans nombre d’autres pays, même aussi peu évolués sur le plan institutionnel, un scandale comme le piratage des communications téléphoniques internationales aurait sérieusement ébranlé le pouvoir. Il est en effet pour le moins sidérant d’entendre en plein Parlement le président du Conseil : 1) - Faire lui-même une révélation aussi fracassante. En précisant que le détournement...