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Actualités - CHRONOLOGIES

Télécoms - Le ministre s’expliquera demain - Tendance à l’apaisement entre le gouvernement - et les sociétés de téléphonie mobile

La nouvelle a fait l’effet d’une bombe. Pour les citoyens ordinaires en tout cas. Car, dans les milieux concernés, l’affaire était dans l’air depuis quelque temps et aussi bien M. Salah Bou Raad (PDG de Cellis) que M. Hussein Rifaï (PDG de LibanCell) flairaient ce qui se préparait. L’État ne pouvait plus accepter les conditions des contrats conclus avec les deux sociétés de téléphonie mobile et, après quelques tentatives de les améliorer, la décision de résilier carrément les contrats a été prise mardi soir. Elle sera confirmée aujourd’hui en Conseil des ministres. Le conflit pourrait éclater lorsque l’organisme chargé de fixer le montant des indemnités que devrait verser l’État aux deux sociétés pour rupture de contrat aura achevé son travail. D’ici là, les négociations vont bon train et, pour les usagers des réseaux, rien ne changera. Depuis longtemps, l’État se sentait lésé par les dispositions des contrats conclus avec les sociétés de téléphonie mobile. Il y a bien eu quelques tentatives de lui accorder certaines prérogatives, notamment grâce à une taxe de 20 % sur les communications entre réseaux portable et fixe. Malgré cela, le sentiment général était que l’État – qui se débat dans une crise économique grave – bradait ses droits dans ce dossier. L’idée de résilier les contrats avec les deux sociétés et d’en conclure de nouveaux plus avantageux pour le Trésor public avait germé depuis longtemps et elle avait été sur le point d’être concrétisée par le précédent gouvernement. L’échéance électorale législative étant alors toute proche, le gouvernement Hoss ne s’était pas décidé à franchir le pas. « Le pétrole du Liban » Par contre, dès sa formation, le gouvernement Hariri avait annoncé sa détermination à privatiser certains secteurs, dont celui des télécommunications, qualifié par le président de la Chambre «de pétrole du Liban», dans une allusion aux ressources qu’il pourrait rapporter à l’État. Tout le monde est donc d’accord, l’heure est venue de revoir les conditions de l’exploitation du réseau de téléphonie mobile. Pour le Conseil supérieur de la privatisation et pour tous les experts en la matière, la meilleure formule était d’en finir avec le système BOT au bénéfice de la vente de nouvelles licences à des compagnies privées, qui leur permettraient d’exploiter le réseau GSM, mais aussi la troisième génération de téléphonie mobile connue sous le nom de UMTS (Universal Mobile Telecommunication System), pour une durée de 20 ans. Restait à convaincre les deux sociétés exploitant actuellement le réseau. Ce n’est pas forcément facile, puisque aussi bien LibanCell que Cellis pourraient bien ne pas être choisies dans l’appel d’offres qui sera lancé d’ici à six mois. Quel montant pour les indemnités ? En tout cas, les deux sociétés sont décidées à défendre leurs intérêts. Elles l’ont déjà prouvé en refusant de payer les 600 millions de dollars que leur réclamait le gouvernement Hoss parce qu’elles avaient exploité, selon lui, plus de lignes que prévu dans le contrat. Le dossier est actuellement devant la chambre internationale d’arbitrage en France. Le Conseil supérieur de la privatisation n’a pas attendu l’issue de cet arbitrage et il a décidé mardi de résilier les contrats à l’amiable. Il s’est basé, pour cela, sur une clause dans les contrats signés avec les deux sociétés, autorisant le gouvernement à les résilier à certaines conditions. Le contrat expirant en 2004 (il avait été conclu en 1994 pour une période de dix ans), le gouvernement doit ainsi payer des indemnités aux deux sociétés. Le montant de celles-ci sera évalué ultérieurement par une banque internationale, une société financière ou d’audit international, qui sera choisie par le ministre des Télécommunications, M. Jean-Louis Cardahi. Dans la fixation du montant des indemnités, plusieurs facteurs devront être pris en considération et chacun d’eux pourrait faire l’objet d’un conflit entre le gouvernement et les deux sociétés. Le gouvernement pourrait par exemple estimer que les deux sociétés ont exploité plusieurs services qui n’étaient pas prévus dans le contrat initial –notamment le système GPRS –, augmentant leurs bénéfices sans pour autant réserver une part à l’État. Les sociétés avanceront probablement leurs arguments, et la société choisie devra trancher. Pour l’instant, nous n’en sommes pas encore là. Le ministre des Télécommunications doit préparer d’ici à trois semaines un projet de loi sur la privatisation de la téléphonie mobile et, là aussi, il y a des risques de conflit sur les conditions d’exploitation future des réseaux. Ce qui est sûr, c’est que le ministre compte s’inspirer largement des lois en vigueur en Occident, avant d’établir les cahiers des charges sur base desquels seront vendues les nouvelles licences. Les compagnies actuelles commencent déjà à laisser entendre que le marché des télécommunications traverse actuellement de sérieuses difficultés, le prix des licences ne peut pas être aussi élevé que l’escompte le gouvernement. En tout cas, tout cela devrait être réglé d’ici à six mois, date à laquelle la résiliation des contrats sera effective. Si, à cette date, le gouvernement n’a pas pu vendre les nouvelles licences, il pourra signer un contrat de gestion administrative avec les deux sociétés actuelles pour que le réseau puisse continuer à fonctionner normalement en attendant la nouvelle structuration. Mais dans les milieux bien informés, on ne croit pas beaucoup à ce scénario, précisant que tout sera réglé à l’amiable, les responsables de France Télécom (dont Cellis est une filiale) ayant été mis au courant des grandes lignes du projet, lors de la visite du président du Conseil Rafic Hariri en France en février dernier. D’ailleurs, le projet de loi de restructuration du secteur des télécommunications que prépare le ministre Cardahi s’inspire largement de la formule française. Il est notamment question de créer une nouvelle société Liban Télécom qui coifferait le secteur, à la place du ministère, et vendrait une partie de ses parts, par branches, aux sociétés privées. Bref, dans les milieux officiels, on se veut rassurant. Du côté des deux sociétés, on préfère garder un mutisme prudent, laissant toutefois entendre qu’à ce stade, il n’y a pas de conflit avec l’État. Demain vendredi, le ministre Cardahi publiera un communiqué officiel pour éclaircir tous les points encore obscurs et expliquer toutes les étapes du processus et la démarche de l’État. C’est à ce moment-là qu’il faudra commencer à guetter les réactions de LibanCell et Cellis. En attendant, que les citoyens se rassurent, ils pourront continuer à utiliser leurs téléphones portables avec les services les plus modernes. Et au prix fort bien sûr. Sur ce plan-là au moins, rien ne devrait changer.
La nouvelle a fait l’effet d’une bombe. Pour les citoyens ordinaires en tout cas. Car, dans les milieux concernés, l’affaire était dans l’air depuis quelque temps et aussi bien M. Salah Bou Raad (PDG de Cellis) que M. Hussein Rifaï (PDG de LibanCell) flairaient ce qui se préparait. L’État ne pouvait plus accepter les conditions des contrats conclus avec les deux...