Rechercher
Rechercher

Actualités - BOOK REVIEWS

CORRESPONDANCE - Le pas-à-pas de la chaussure et de la culture - Au pied de la lettre

WASHINGTON-Irène MOSALLI On trouve l’âme sœur après avoir bien cherché chaussure à son pied... C’est dire l’importance du bien-être moral et physique. Mais dans la chaussure, à proprement parler, il y a plus que le confort et le travail du cuir... C’est ce que démontrent deux professeurs d’université, Shari Benstock (doyenne de la Faculté d’art et de sciences) et Suzanne Ferris (littérature comparée et étude du conflit hommes-femmes) qui viennent de publier un traité intitulé Footnotes : on shoes (chaussures... en pied de page ). Dans cet ouvrage (grand format et plus de 300 pages), elles ont compilé et revu ce qui a été dit à ce sujet pour mettre en relief la fascination pour les chaussures et leur signification socioculturelle. Pour les deux auteurs, cet accessoire – des godillots à l’escarpin de verre de Cendrillon – est une fiche d’identité déclinant la race, l’ethnie, la classe, le genre, l’âge, l’état d’esprit du moment, les fantasmes, les fantaisies, etc. De quoi oublier son rôle purement fonctionnel. Le musée de la fabrique Bata à Toronto en dit long à ce sujet, de même que l’exposition de grande envergure «Shoes : A Lexicon of Style», organisée par le Fashion Institue of New York. Sans compter les tout jeunes qui collectionnent les Steve Madden et les Nike et les moins jeunes les Prada et Manolo Blahnik. Voici quelques extraits de ce pas-de-deux, tel que tracé dans cet ouvrage. Marie-Antoinette avant Imelda Marcos La reine Marie-Antoinette avait été la pionnière des collectionneuses de chaussures. Elle en avait commandé plus de 500 paires, toutes incrustées de pierres précieuses, qui avaient été cataloguées par la responsable en chef de sa garde-robe. Mais elle a été incontestablement dépassée par Imelda Marcos qui, elle, en possède 1 200 paires. Le musée Bata Inauguré en 1995, le musée Bata trace l’histoire des chaussures à travers les âges et les continents, mettant en relief son aspect commode et toute l’esthétique qui s’y rattache. Le bâtiment a la forme d’une boîte à chaussures. Hauts talons : origine italienne Les hauts talons ont fait leur apparition dans la classe aisée de l’Italie du XVIe siècle. Et pour cause, ceux et celles qui les arboraient devaient être aidés par deux servantes pour pouvoir se déplacer car ils étaient perchés sur des plates-formes hautes de 12 à 15 cm. Lorsque Catherine de Médicis avait porté ce genre de chaussures à son mariage à Paris, en 1533, elles sont devenues indissociables de la caste des privilégiés. Aujourd’hui, les escarpins et les sandales du créateur Manolo Blahnik, le «grand prêtre du talon aiguille», ont été qualifiés de «limousine de la chaussure». Les Américaines à hauts talons punies au XVIIe siècle Avec la vogue des hauts talons venue de Paris, au XVIIe siècle, le Massachusetts, alors une colonie britannique, avait promulgué une loi ainsi rédigée : «Toute femme, vierge, mariée ou veuve, qui séduit un mâle de Sa Majesté, par vertu de ses chaussures à hauts talons, sera soumise aux mêmes punitions que celles infligées aux sorcières». Rébellion et sabo... tage En signe de rébellion, les ouvriers d’un moulin avaient jeté leurs sabots dans la machine pour arrêter son fonctionnement et exprimer leur insatisfaction. D’où le mot sabotage. En 1994, à Washington, 38 000 paires de chaussures avaient été assemblées lors d’une manifestation contre la violence aux États-Unis. En art aussi Le cinéma et les arts plastiques ne sont pas en reste pour célébrer les chaussures. Watteau aimait bien restituer dans ses fêtes galantes les jolis pieds des femmes élégamment chaussés. Et Van Gogh, après avoir bien usé de grosses bottes, acquises au Marché aux Puces, en a fait le sujet d’une de ses toiles, simplement intitulée Une paire de bottes et symbole du labeur et du quotidien terre à terre. En contraste, on trouve dans l’imagerie d’Andy Warhol, Chaussures à poudre de diamant, ou un arrangement de différents modèles sophistiqués, menant à l’univers des jet-seters. Pointe des ballerines v/s pieds nus Aux hauts talons répondent les pointes des ballerines qui, à leur manière, cambrent et galbent les jambes. Puis il y a eu Isadora Duncan et Martha Graham qui sont venues libérer les danseuses de ces chaussons douloureux et masochistes, sous leur apparence de satin rose, en les invitant à évoluer pieds nus, «pour retrouver leur liberté et leur sexualité» Mieux qu’avec des bottes de sept lieues les deux auteurs ont arpenté le monde pour mieux savoir comment il marche, comment il danse et comment il rêve.
WASHINGTON-Irène MOSALLI On trouve l’âme sœur après avoir bien cherché chaussure à son pied... C’est dire l’importance du bien-être moral et physique. Mais dans la chaussure, à proprement parler, il y a plus que le confort et le travail du cuir... C’est ce que démontrent deux professeurs d’université, Shari Benstock (doyenne de la Faculté d’art et de sciences) et Suzanne...