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Actualités - REPORTAGES

DROITS DE L’HOMME - Mise en garde contre la corruption et les falsifications au Liban et appel à Genève pour réagir - La supplique d’un réfugié irakien à Lahoud, Berry et Hariri

C’est l’histoire de Haydar el-Assadi, ce jeune réfugié irakien qui n’a pas encore 30 ans, cet opposant pur et dur au régime de Saddam en place à Bagdad depuis vingt-trois ans. Haydar el-Assadi qui avait raconté, dans un témoignage à L’Orient-Le Jour*, tous les drames auxquels ils sont confrontés, lui et ses quelque 2 000 compatriotes. Il avait raconté aussi les dérives des autorités libanaises qui, concrètement, ne font rien pour faciliter les conditions de (sur)vie et le quotidien de ces réfugiés irakiens et qui n’ont rien trouvé de mieux, au nom de l’embellie économique entre Beyrouth et Bagdad, que de vouloir, quels que soient les moyens utilisés, expulser ces hommes et ces femmes vers leur pays d’origine. C’est-à-dire là où leur peine minimale serait la prison à perpétuité. Tout en n’oubliant pas que le Liban n’a ratifié ni la convention de Genève de 1951 – relative aux réfugiés – ni le protocole de la Convention de 1967. Trois mois ont passé et la situation n’a pas particulièrement évolué, loin de là. Tout comme l’état d’esprit du jeune réfugié : «Ma priorité, c’est que rien ne se fasse qui puisse aller à l’encontre de la réputation comme de la sécurité du Liban». Et pour lui, Beyrouth est toujours une escale avant, en principe, l’Amérique du Nord. «Tout ce que je demande au gouvernement libanais, c’est qu’il traite les réfugiés irakiens comme il le fait avec les citoyens libanais. Il faut que cesse enfin la torture, qu’on arrête par exemple de forcer un réfugié à avouer que c’est de Syrie qu’il vient alors que ce n’est pas vrai du tout. S’ils le renvoient là-bas, vous savez très bien que c’est en prison qu’il ira et qu’il n’en ressortira pas. Il ne doit pas y avoir de différence entre les Irakiens et les Libanais, nous sommes musulmans, chrétiens, arabes. Il ne faut pas que les autorités locales agissent de façon à porter atteinte à la réputation du Liban», répète-t-il inlassablement. D’ailleurs, selon Assadi, la torture des réfugiés a diminué au Liban à la suite de pressions exercées en ce sens sur le gouvernement par Amnesty International. Une carte du HCR C’est dans ce cadre-là que vient s’inscrire la lettre, qu’il a lui-même écrite puis envoyée au chef de l’État comme aux présidents de la Chambre et du Conseil. Il y rappelle son statut de réfugié politique au Liban, précisant qu’il détient, pour seul papier d’identité, une carte délivrée par la délégation pour le Liban du Haut Commissariat pour les réfugiés des Nations unies (HCR). «Nous ne vous cachons pas, Monsieur le Président, tout ce que subit le peuple irakien en Irak, et toutes les épreuves que traversent les réfugiés irakiens à l’étranger. Monsieur le Président, les Irakiens à l’étranger n’échappent pas aux innombrables injustices : leurs mouvements sont surveillés et ils sont poursuivis sur le sol libanais par des agents des renseignements irakiens qui agissent sous le couvert de la diplomatie et qui déploient tous les efforts pour nuire à la réputation des réfugiés et pour que ces derniers soient expulsés du pays-hôte», accuse Haydar el-Assadi. Et puis une supplique, adressée aux trois présidents, pour qu’ils fassent en sorte que les autorités concernées mettent un terme à la torture et aux exactions subies par les réfugiés et qu’elles fassent en sorte qu’ils soient bien traités jusqu’à ce qu’ils soient reçus par les pays d’accueil. «Je me souviens de la réponse du président Hariri aux députés quelques minutes avant le vote de confiance en novembre dernier. Il avait été le garant des libertés, de toutes les libertés, il a promis, je l’exhorte donc à tenir ses promesses...». Les mots du jeune réfugié sont criants de sincérité. Parlons-en un peu de ces pays d’accueil. «Il s’agit de la Suède, de la Norvège, du Canada, de l’Australie, de la Hollande, de la Finlande, de la Suisse, des USA, de la Nouvelle-Zélande – dont le gouvernement n’a pas encore compris de quels réfugiés il s’agissait – de l’Islande, un pays que l’on exhorte à accueillir des demandeurs d’asile politique, il le peut», explique-t-il. Et c’est accompagné du premier article paru à son sujet dans L’Orient-Le Jour que le jeune Haydar a envoyé une lettre au ministre canadien des Affaires étrangères, John Manley. Une lettre-mise au point, dans laquelle il détaille les difficultés rencontrées au Liban, ainsi que son souhait de se voir accordé un visa d’entrée sur le sol canadien en tant que réfugié politique. Et Haydar d’exhiber fièrement la réponse qu’il a reçue du ministère canadien des AE, accusant réception de sa demande et précisant qu’elle a été envoyée au ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration pour y être traitée. Il a également reçu une réponse beaucoup moins positive de l’Office de l’immigration suédois. «Il faut que le ministère suédois des AE règle assez vite ses problèmes avec l’immigration. Ils sont parfaitement au courant de la situation des réfugiés irakiens et refusent presque catégoriquement d’en recevoir. Je ne comprends pas», soupire-t-il. Et Haydar dénonce Et puis Haydar el-Assadi met le doigt là où ça risque de faire mal. «Il y a au Liban certains réfugiés, des Kurdes irakiens notamment, qui s’emploient à falsifier à tout va les cartes délivrées par le bureau du HCR à Beyrouth. Un certain Hassan el-Kurdi, des services de renseignements irakiens, est extrêmement actif à ce niveau et le but de ces opérations clairement illégales est très clair : avec ces falsifications, on espère, on souhaite, on œuvre en douce pour la fermeture de l’antenne libanaise du HCR. Et ce n’est pas tout. De nombreux Libanais qui travaillent sur le dossier des réfugiés sont très largement corrompus, et en contrepartie des pots-de-vin qu’ils reçoivent, ils donnent leur OK au dossier d’une certaine catégorie de demandeurs d’asile. Il s’agit d’un véritable réseau au Liban et qui influe négativement sur la sécurité de la majorité des réfugiés. Il faut impérativement que le bureau de Genève enquête à ce sujet et mette un terme à toutes ces irrégularités. Il faut informatiser les cartes délivrées par le HCR, il faut qu’il y ait l’empreinte du réfugié au dos de la carte. Il y va de notre sécurité, comme de la réputation de l’Onu, et la crédibilité des fonctionnaires honnêtes», prévient le jeune réfugié. Et Haydar, comme lors du premier entretien, repart comme il est arrivé : avec le sourire, et des «excusez-moi, merci... Merci à John Manley, le ministre canadien des AE, merci à Rafik Saïdi, le directeur de l’antenne à Beyrouth du HCR, merci à Amine Abou-Khaled, le directeur de L’Orient-Le Jour...» à la pelle. Et toujours cet incommensurable espoir qui, parfois, fait le quotidien des hommes en sursis. *Voir L’Orient-Le Jour du vendredi 13 octobre 2000
C’est l’histoire de Haydar el-Assadi, ce jeune réfugié irakien qui n’a pas encore 30 ans, cet opposant pur et dur au régime de Saddam en place à Bagdad depuis vingt-trois ans. Haydar el-Assadi qui avait raconté, dans un témoignage à L’Orient-Le Jour*, tous les drames auxquels ils sont confrontés, lui et ses quelque 2 000 compatriotes. Il avait raconté aussi les...