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Actualités - BOOK REVIEWS

VIENT DE PARAITRE - Quand Emily Nasrallah se souvient

Prolifique et généreuse Emily Nasrallah, dont les écrits, d’inspiration diverse, se succèdent sans jamais se ressembler. L’auteur de Touyour Ayloul (Les oiseaux de septembre), presque un demi-siècle après ses premières publications, est déjà à la tête d’une œuvre romanesque considérable et s’impose comme un authentique «classique» dont les élèves et les universitaires «décortiquent» avec respect la syntaxe et le vocabulaire… Aujourd’hui, par-delà les nombreuses traductions (en anglais, allemand et danois) dont ses livres ont fait l’objet, Emily Nasrallah a voulu jeter un pont «pour» l’enfance et pas seulement vers l’enfance. D’où ces récits naïfs, captivants, délicieusement innocents où l’émotion est pure comme une eau de roche. Des livres écrits pour les enfants mais où l’adulte trouve aussi son compte dans le plaisir de lire et de découvrir. On cite volontiers les derniers-nés de ces «enfants» de la littérature arabe : Yawmiyat herr (Journal d’un chat), Ala bissat al-salj (Sur le tapis de la neige) et Raouat li al ayam (Les jours m’ont conté) où se dégage une voix nouvelle touchant et révélant les très jeunes dans leur monde secret et leurs préoccupations. Mais bien différent est le dernier ouvrage d’Emily Nasrallah qui trône en librairie depuis quelque temps et qui s’intitule Fi el-bal (Toujours en mémoire), Éditions Naufal – 304 pages. Narration fluide, tendre, émue et presque amusée d’une vie vouée avec ferveur et passion à l’écriture, sans jamais l’ombre d’un doute. Profonde vocation littéraire, vécue avec enthousiasme et dévotion, sans oublier les contraintes d’un labeur dur et intense. Depuis le printemps 1955 où une jeune fille quitte la quiétude de son village pour retrouver une ville bruyante où dorment ses rêves, ses ambitions, ses amours et ses aspirations les plus tenaces. Emily Nasrallah brosse son autoportrait avec pudeur, quelque malice et beaucoup de douceur. Journaliste à 200 livres libanaises (ce chiffre nous fait sourire aujourd’hui dans la tourmente de notre hyperinflation) le mois dans l’hebelomadaire as-Sayad, cette jolie jeune femme de lettres, brune, au regard vif et au teint clair, mordue au cœur par la littérature, était parfaitement «heureuse» de vivre l’exaltante aventure intellectuelle d’une vie dans un monde arabe encore balbutiant dans ses audaces et ses témérités (même les plus littéraires...). Et se succèdent à un rythme effréné les rencontres et les interviews avec écrivains, artistes, peintres, poètes (on s’arrête volontiers au hasard des passages concernant Nadia Tueni, Emily Farès Ibrahim, Ibtihaj Kaddoura, et la prima ballerina du Bolchoï Maya Plissteskaya) et autres personnalités du monde de l’art et de la politique que l’écrivain sensible doublée d’une journaliste chevronnée «croque» en de petits portraits exquis et prestement enlevés. Atmosphère faisant revivre le passé (sans effusion ou nostalgie excessives), notamment un Beyrouth, capitale arabe brillante et cosmopolite dans son âge d’or et reine de l’Orient jusqu’aux années assombries par dix-sept ans d’une guerre aux carnages innommables. Fi el-bal est un livre-confidence, où le témoignage d’une époque riche et intellectuellement turbulente est un bien plus précieux que les révélations portant constamment une pudique voilette où les règles de la courtoisie et de la bienséance sont de rigueur. «En mémoire», en effet, sont ces pages d’une époque fastueuse et foisonnante de vie. Une mémoire ici non fonction d’oubli mais d’absolue et fidèle «souvenance».
Prolifique et généreuse Emily Nasrallah, dont les écrits, d’inspiration diverse, se succèdent sans jamais se ressembler. L’auteur de Touyour Ayloul (Les oiseaux de septembre), presque un demi-siècle après ses premières publications, est déjà à la tête d’une œuvre romanesque considérable et s’impose comme un authentique «classique» dont les élèves et les...