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Actualités - OPINION

(Supplément) Croire au Liban

La campagne de Caritas a rapporté cette année un milliard de LL de moins qu’en 1998.Trente pour cent des écolages de certains établissement scolaires privés catholiques de l’année dernière ( 1998-99) sont restés impayés . 70 000 enfants ont quitté l’école privée pour l’école publique gratuite. Un fonds de 2 milliards de dollars serait nécessaire pour acheter tous les terrains offerts à la vente par des chrétiens dans le besoin. Ce sont là quelques-uns des indicateurs d’un phénomène d’une extrême gravité. Nous assistons à l’appauvrissement du Liban. La pauvreté pourrait n’être que matérielle. Malheureusement, elle est aussi morale. Il faudrait des statistiques pour mesurer le taux de la criminalité au Liban, celui des crimes sexuels en particulier. Un tel indicateur contribuerait à mesurer le taux de développement durable au Liban, voisin de zéro. Le taux de développement de la solidarité sociale, de cette foi que nous sommes un seul peuple, serait également intéressant à établir. On pourrait le déduire rien qu’en évaluant le volume des dons échangés entre ONG et population civile, du nombre des Libanais engagés dans le bénévolat, etc. Non, notre aliénation économique, au même titre d’ailleurs que notre aliénation politique, ne sont pas tout. D’autres aliénations nous guettent qui sont plus insidieuses. Le niveau de la vie politique est très bas. Mais celui de la vie culturelle et de la vie morale l’est plus encore. Sur le plan politique, il n’est rien de plus desséchant que l’actualité du moment. Sans horizons, sans espérance. À l’intérieur, les rapports entre le gouvernement et l’opposition sont tels qu’on ne laisse plus personne ne serait-ce que rêver. À l’extérieur, l’antagonisme judéo-arabe est tel qu’il est interdit de ne pas haïr. Soyons vigilants pour la Jérusalem de la pierre. Mais soyons-le bien plus pour la Jérusalem de l’esprit , d’autant supérieure à l’autre que la réalité est supérieure au symbole. Et cette Jérusalem, cette ville de la paix, c’est nous, c’est le Liban de la vie conviviale, le Liban des valeurs sacrées. Or au lieu de croître dans la compassion, la souffrance nous a rendus cyniques et blasés. Quelque part dans le nord de la Turquie, un peuple d’emmurés crie sous les décombres. Leurs âmes vont bientôt s’échapper de cette double prison. Et l’on n’a pas plus tôt fait d’offrir ne serait-ce qu’une messe à l’intention de ces malheureux qui ont succombé à une mort aussi horrible. On laisse passer l’occasion de nouer des liens, ne serait-ce que spirituels, avec un peuple voisin et frère. La paix s’annonce. Nous ne pensons qu’à l’implantation. Les musulmans prient pour la pluie. Les chrétiens raillent. L’Évangile nous apprend à nous réjouir avec ceux qui sont dans la joie et à pleurer avec ceux qui sont dans le deuil, pleins d’une égale complaisance envers tous, à rechercher l’intérêt de l’autre avant le nôtre. Il y a là une force que nous avons oubliée et dont il semble que nous ayons perdu la clef. Raidis et rendus méfiants par les défis que nous affrontons – les défis économiques de la globalisation, les défis culturels, les défis politiques de la loi du plus fort, de nos propres rivalités ( nos rivalités si petites), nous ne savons plus penser aux autres, sortir de nous-mêmes, nous libérer de la prison de nos égoïsmes. Nous avons réclamé le droit à la mémoire, afin que nos égarements ne se reproduisent plus. Mais aujourd’hui, nous savons aller plus loin encore. Qui a raison? Qui a commencé? Qu’importe vraiment. Faisons ce qui bâtit, et ce qui bâtit, c’est l’amour. L’amour se moque de qui a raison. L’amour ne défend le droit de personne. Il défend son propre être . L’amour dispense même de la mémoire. Au seuil d’un nouveau millénaire, qu’avons-nous besoin de voyants ? L’avenir sera ce qu’a été le passé , ce qu’est le présent, ou ce qu’en feront notre liberté, notre courage et notre capacité à nous indigner .
La campagne de Caritas a rapporté cette année un milliard de LL de moins qu’en 1998.Trente pour cent des écolages de certains établissement scolaires privés catholiques de l’année dernière ( 1998-99) sont restés impayés . 70 000 enfants ont quitté l’école privée pour l’école publique gratuite. Un fonds de 2 milliards de dollars serait nécessaire pour acheter tous les...