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Actualités - REPORTAGES

Les disquaires : une cohabitation sans trop de fausses notes (photos)

Même si la musique est l’un des passe-temps les plus agréables qui soient, le marché des supports audio, et du CD en particulier, est mené de main de maître par quelques professionnels très exigeants. La musique n’adoucit pas le marché, bien au contraire. De plus en plus compétitif, ce secteur parvient à fonctionner selon des règles de plus en plus précises et efficaces. Les disquaires cohabitent en bon accord dans le grand orchestre de l’économie. La musique est un luxe que tout consommateur, potentiel ou réel, cherche à s’offrir. Mais elle demeure un luxe. Si la production musicale est très importante, l’achat d’un CD n’est pas à la portée de toute la population. Par ailleurs, une chanson reste la même, qu’on achète le CD chez un tel ou tel autre. Aussi, les disquaires s’efforcent-ils de marquer leur différence pour convaincre le client de s’adresser à eux. Une concurrence acharnée, mais de bon esprit Ces dernières années, le marché libanais du disque s’est développé très rapidement. Qui dit développement quantitatif ne dit pas nécessairement développement qualitatif, et une sélection naturelle s’opère sensiblement. Les sociétés importantes tendent à occuper l’essentiel du marché, les «amateurs» se faisant de plus en plus discrets. C’est pourquoi un haut degré de compétitivité devient indispensable pour se faire une place sous le soleil libanais. «Il y a dix ans, il suffisait de proposer un petit stand avec quelques cassettes pour vendre, explique Jean Khoury, de La Maison du disque. Mais récemment, de nombreux magasins ont fermé. Dans ce domaine, il faut aimer son métier. Les employés doivent être extrêmement bien formés et aimer ce qu’ils font». Dans un marché où la concurrence se fait de plus en plus sentir, les politiques choisies par les professionnels pour se distinguer sont très variables. Par exemple, House of Music a opté pour la qualité avant tout. Avec uniquement deux branches dans le pays, et un service Internet ouvert très prochainement, son directeur Bassel Dakak mise sur la fidélisation optimale de sa clientèle. La sélection des œuvres proposées est très étudiée et le service lui-même se distingue par l’attention portée à la clientèle. «Celui qui saura vraiment se constituer une clientèle d’habitués sera le plus compétitif, assure Sélim Semaan. Le marché des CD est en croissance continue. Nous sommes nombreux à nous partager ce gâteau, mais chacun a sa stratégie». Pour d’autres, qualité et quantité peuvent aller de pair. A. Chahine et Fils dispose de quatre branches dans le pays, dont l’une sur le boulevard Chiah-Hazmié de 1 200m2, ainsi que de revendeurs dispersés dans le pays. Des kiosques ont aussi été installés dans les stations-service, les supermarchés, les librairies, les magasins de jeux... «Pour réussir dans la vente de CD, il faut investir de plus en plus, avoir des vendeurs de plus en plus qualifiés, être de mieux en mieux situé dans les principaux quartiers piétons et dans les grandes surfaces, indique Abdallah Chahine, qui essaie aussi d’être présent dans les expositions comme “Lire en français et en musique” et l’“Exposition du livre arabe”. Ces expositions jouent un rôle relatif dans notre résultat d’exploitation. Nous y vendons surtout des CD, rarement des intruments, car le client des Salons ne suit pas un magasin en particulier». Quand la vente au détail ne suffit plus La diversification est l’une des clés du succès dans ce secteur d’activité. Elle peut s’effectuer dans des directions très variées. Abdallah Chahine et Fils s’oriente vers la vente d’instruments de musique, la distribution en gros et la production d’artistes. «C’est mon père qui a découvert Feyrouz, notre chanteuse nationale, raconte Abdallah Chahine. Nous avons produit à ce jour plus de 60 CD d’elle, entre les compilations, les opérettes, les albums. Nous les produisons et les distribuons au niveau mondial. Nous produisons aussi Wadi al-Safi, Sabah, les frères Rahbani... Magida el-Roumi a commencé chez nous. Nous lançons aussi de jeunes talents locaux et étrangers, comme Paul Salem, Charbel Rouhana, Omar Bachir...». Ces CD sont réalisés en Grèce, le Liban ne disposant pas encore de la technologie adéquate, puis importés dans le pays ou vendus à l’étranger. «La France est notre premier marché, indique Abdallah Chahine. Viennent ensuite les pays du Golfe, les États-Unis, l’Angleterre et le reste de l’Europe. Ces ventes permettent de couvrir quelque peu la récession actuelle du marché local». House of Music axe sa politique sur le rapport entretenu avec la clientèle. «Nos clients deviennent nos amis, explique Bassel Dakak. Ils peuvent écouter nos CD avant de les acheter, nous les guidons et nous leur faisons même découvrir de nouvelles choses». L’ouverture du Salon de musique va tout à fait dans ce sens. De même, House of Music met à disposition un chariot et une balance permettant au client d’acheter certains CD au kilo. À l’occasion des fêtes, une sélection musicale assortie de chocolats et de liqueurs sera proposée de la sorte. Tout est mis en œuvre pour que le client se sente chez lui. Enfin, d’ici peu, House of Music compte s’agrandir de 250m2 à Aïn Saadé, avec terrasse panoramique. «Nous pourrons recevoir des artistes comme nous l’avons déjà fait avec Rabih Abou Khalil, s’enthousiasme Bassel Dakak. De jeunes groupes pourront venir y jouer ; nous avons même établi des contacts avec un studio d’enregistrement en Europe pour produire certains de ces groupes». Une guerre des prix inévitable ? Même si elle n’est pas encore vraiment sensible, une guerre des prix entre disquaires risque de bientôt voir pleinement le jour, en particulier avec l’éventuelle ouverture de grands magasins spécialisés dans la musique, comme Virgin Megastore. Néanmoins, pour les professionnels ayant par ailleurs des activités de production, cette implantation peut représenter une bénédiction. «C’est l’occasion pour nous d’augmenter notre chiffre d’affaires, car nous pourrons y proposer notre production, déclare Abdallah Chahine. Cela nous arrange car pour l’instant nous n’arrivons pas à vendre tout notre catalogue dans les discothèques importantes. Nous aimerions pouvoir proposer le catalogue complet, ainsi que tous les nouveaux artistes. L’ouverture d’un Virgin Megastore ou d’un Tower Records sera une très bonne chose pour nous, même si, à la longue, nous devrons arrêter notre activité de détaillant». Une baisse des prix devra nécessairement venir des détaillants, les grossistes étant handicapés par les taux de douanes élevés. «Les disquaires vont devoir s’aligner sur la concurrence, indique Sélim Dakak. Il faudrait que tous les professionnels se rassemblent pour discuter ensemble de ces prix et pour les unifier, sans quoi nous y perdrons tous. Mais nous n’avons pas de syndicat, c’est dommage».
Même si la musique est l’un des passe-temps les plus agréables qui soient, le marché des supports audio, et du CD en particulier, est mené de main de maître par quelques professionnels très exigeants. La musique n’adoucit pas le marché, bien au contraire. De plus en plus compétitif, ce secteur parvient à fonctionner selon des règles de plus en plus précises et efficaces....