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Actualités - ANALYSE

Scrutin - Accord sur les principes mais pas sur les mécanismes La future loi électorale, une pomme de discorde

Dans une chanson restée fameuse, Guy Béart – élève de Gemmayzé soit dit en passant – oppose grands principes et grands sentiments. C’est tout à fait le cas pour le futur code électoral. Tout le monde est d’accord pour reconnaître que cette fois, aucune discrimination ne devra être autorisée. Mais quand on en vient à parler découpage des circonscriptions, c’est la tour de Babel… Et cela parce que la touchante unanimité sur les grands principes ne les empêche pas d’être un tantinet contradictoires dans le fond. En effet, on veut à la fois une «saine représentativité» de proximité et «un brassage intercommunautaire». Littéralement, les petits plats dans les grands. Car la première condition présuppose, bien évidemment, une circonscription petite, à taille humaine, où chacun connaît tout le monde et dont le député serait une authentique émanation. Tandis que la deuxième condition implique un plateau beaucoup plus élargi, pour que diverses communautés se retrouvent ensemble et puissent avoir les mêmes représentants. – Les partisans de la petite circonscription, parodiant la parole du Christ «Que sert à l’homme de gagner l’univers s’il vient à perdre son âme», affirment que «l’union, la coexistence politiques issues d’une grande circonscription seraient tout à fait illusoires puisqu’elles lieraient des députés qui ne représenteraient pas grand-chose. On aurait gagné là l’illustration d’un faux slogan, aux dépens de l’intérêt direct des gens qui serait le dernier souci des parlementaires. Car la plupart seraient, si l’on maintient le mohafazat comme circonscription, des parachutés ayant obtenu droit de cité sur les listes des puissants soit contre argent soit pour complaire aux décideurs. Faut-il rappeler que dans la Békaa, regroupée en 96, les élections ont provoqué beaucoup de tension entre Zahlé la catholique et Baalbeck la chiite, chacune voulant dominer la plaine. Alors qu’en 92, le mohafazat étant divisé en trois, la plus parfaite harmonie avait régné entre les deux communautés». Cette forte diatribe se conclut sur cet axiome : «Seuls les forts peuvent valablement dialoguer. Et seul un député vraiment représentatif d’un milieu donné est fort». – En face, on réplique en substance que «la représentation d’un microcosme dans un pays si petit, partagé entre dix-sept communautés, ne peut qu’être source de querelles de clocher. Chacun voudra lutter pour les intérêts étriqués de son village et le développement des régions en tant qu’ensemble socio-économique y perdra beaucoup. Il faut que les Libanais apprennent à se donner la main les uns aux autres, à planifier ensemble leur avenir. Les députés ne doivent pas être des tabellions au service de petits groupes, mais des coordinateurs, des traits d’union, des animateurs de projets à l’échelle des régions et, pourquoi pas, à l’échelle du pays. Il faut faire ainsi triompher le modérantisme, la petite circonscription incitant les députés à des surenchères confessionnelles ou zonales, à des fins électorales». – Il existe enfin une troisième voie. Qui pense qu’on peut finalement concilier les deux exigences de représentation de proximité et de brassage communautaire. En organisant des élections à deux leviers : une première sélection au niveau du caza, suivie de la vraie élection au niveau du mohafazat. Cette formule donne lieu à nombre de variantes. Il y en a qui imaginent un scrutin étalé sur deux dimanches successifs, avec 25 % des voix à obtenir obligatoirement au premier tour. D’autres qui proposent que tout se passe le même jour et que les gagnants «chez eux», sans proportion à atteindre, soient considérés comme candidats définitifs. Il y a enfin ceux qui pensent qu’on peut parvenir à tout combiner en redessinant la carte électorale du pays. C’est-à-dire en multipliant le nombre de mohafazats. En tout cas, beaucoup d’encre et d’eau sous les ponts va sans doute couler avant qu’on n’arrive à un consensus sur un sujet aussi important, aussi pointu, aussi complexe et aussi conflictuel que le code électoral.
Dans une chanson restée fameuse, Guy Béart – élève de Gemmayzé soit dit en passant – oppose grands principes et grands sentiments. C’est tout à fait le cas pour le futur code électoral. Tout le monde est d’accord pour reconnaître que cette fois, aucune discrimination ne devra être autorisée. Mais quand on en vient à parler découpage des circonscriptions, c’est la tour de...