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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Conférence - Au campus de la faculté des Sciences humaines à l'USJ Multilinguisme et conflits culturels : quatre regards de sociologues (photo)

Organisée par le Goethe Institut et l’Université Saint-Joseph, une conférence sur le ‘‘Multilinguisme et les conflits culturels’’ a réuni au Campus des sciences humaines, rue Huvelin, autour du recteur Sélim Abou, des universitaires et sociologues allemands et libanais. Directeur du département de la culture au Gœthe Institut de Munich, M. Georg Lechner a analysé la situation linguistique du Québec et de l’Inde. Il a dressé un parallèle et a évoqué les divergences des conjonctures linguistiques dans ces deux sociétés bilingues et multilingues. «La situation linguistique de la population majoritairement francophone du Québec demeure fragile. Car la langue anglaise, bien que minoritaire démographiquement, domine dans les relations internationales», indique M. Lechner. En Inde, où l’on compte 18 langues officielles et jusqu’à 22 langues littéraires, l’anglais et le hindi fonctionnent comme langues véhiculaires. Le hindi étant par ailleurs la langue nationale et constitutionnelle. «Les différents États furent réorganisés en 1956 selon les frontières linguistiques. Et ce pays ne cesse de s’enrichir à travers sa diversité linguistique», rappelle le conférencier. Qui déclare en conclusion que «lorsque l’action politique – si nécessaire pour créer le cadre d’épanouissement culturel – se dégrade et cède la place à l’intervention politicienne et démagogue, la culture et la langue en sont les premières victimes». Les bébés – Mme Verena Aebischer, psychologue sociale, professeur à l’Université Paris X, a abordé le sujet sous l’angle «des marqueurs linguistiques comme traits distinctifs dans les relations intergroupes et interculturelles». «L’utilisation de traits du langage pour reconnaître l’appartenance d’une personne à un groupe est un type de comportement lié au processus identitaire normal. Il est même perceptible chez les tout petits. Des bébés de moins de six mois parviennent, par exemple, à identifier les sons avant de reconnaître le sens des mots», révèle Mme Aebischer. «Une conséquence de cette identification – qui ne s’effectue pas dans un vide social mais dans un contexte de positionnement hiérarchique – consiste à préférer sa propre catégorie ou le «nous» à «eux», poursuit-elle. «Dans des sociétés perméables, qui tolèrent une certaine mobilité individuelle, l’inégalité des statuts qui en résulte peut être acceptée par les gens. De même que la prise en compte des revendications de mouvements sociaux (comme les mouvements syndicaux de la première moitié du siècle en Europe), qui s’accompagne de négociations et de concessions, peut également contribuer au maintien du statu quo. Quand il n’y a plus d’issue, quand les négociations sont bloquées, ces mouvements sociaux peuvent se transformer en révoltes ou en guerres». Enquête – Professeur à l’Université libanaise et président du Comité libanais pour l’enseignement pédagogique, M. Adnan el-Amine a traité de «la préférence linguistique des étudiants». Se basant sur une enquête de terrain effectuée en 1997, M. el-Amine a exposé les préférences linguistiques et culturelles des étudiants libanais, toutes institutions d’enseignement supérieur confondues. «Le bilinguisme apparaît comme le phénomène le plus courant (42 %) suivi du trilinguisme (32 %). La connaissance de la seule langue arabe vient en troisième position (17 %). Les diplômés des écoles francophones ont une meilleure connaissance de l’anglais que les diplômés des écoles anglophones ne l’ont du français». Le conférencier soutient que «la différence dans la maîtrise des langues provient en général du groupe d’appartenance religieuse en premier lieu, puis du niveau d’éducation de la mère, ensuite du niveau social et enfin du niveau d’éducation du père». – Enfin, M. Michel Aouad, professeur à l’UL, directeur de recherches à l’Institut des sciences sociales de Rabieh, a attiré l’attention sur un paradoxe en matière linguistique. À savoir, que la langue, un instrument créé pour assurer l’expression de soi, la communication et l’ouverture à autrui soient devenues un facteur de conflit entre ceux qu’il est supposé lier et unir. «Un regard rapide sur les conflits dans le monde nous montre que la multiplicité des langues est en rapport vent direct avec ces conflits». «Cette observation nous conduit à nous interroger sur les raisons de cette coïncidence entre conflits sociaux et diversité linguistique. Il y a une sorte d’identification entre langue, culture et identité. Toute atteinte à la langue est ressentie comme une atteinte à l’identité du groupe. Et tout danger est un danger d’existence et d’identité. C’est pourquoi tout conflit avec autrui risque de se doubler d’un conflit linguistique», indique M. Aouad. «Est-on condamné, dans les sociétés multilingues à vivre des conflits permanents ? Peut-on dépasser les diversités linguistiques vers une unité sociale ? La réponse semble affirmative. Les diversités linguistiques et culturelles dans une même société et l’unité sociale ne sont pas des réalités inconciliables. Au contraire, elles peuvent être sources d’enrichissement et de renforcement de la société», conclut, sur une note optimiste, M. Aouad.
Organisée par le Goethe Institut et l’Université Saint-Joseph, une conférence sur le ‘‘Multilinguisme et les conflits culturels’’ a réuni au Campus des sciences humaines, rue Huvelin, autour du recteur Sélim Abou, des universitaires et sociologues allemands et libanais. Directeur du département de la culture au Gœthe Institut de Munich, M. Georg Lechner a analysé la...