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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Salon du livre Café littéraire avec Christophe Bataille et Marie-Josèphe Guers(photos)

Marie Josèphe Guers et Christophe Bataille, deux auteurs français ayant reçu le prix du premier roman, ont animé un café littéraire dans le cadre du Salon Lire en Français et en Musique qui a clôturé ses activités hier. Auteur de plusieurs romans – La Femme inachevée, Éd. Actes Sud,1987, prix du premier roman et prix A-L Barthou de l’Académie française ; Peines perdues, Éd. Laffont, 1991 ; La Fiancée du Nord, Éd. Lattès 1992 – , Marie-Josèphe Guers a également écrit une biographie de Paul Claudel, Éd. Actes Sud, en 1988. Dix ans plus tard, en 1998 donc, elle signe un roman La Maîtresse du consul, Éd. Albin Michel, inspiré d’une passion amoureuse entre Paul Claudel et Rose Vetch. Pourquoi a-t-elle choisi Paul Claudel comme héros de roman ? «Je considère qu’avec Céline et Proust, Claudel est un des trois grands auteurs de la première moitié du siècle qui ont inventé un langage et un univers absolument inimitables et irremplaçables. La seconde raison qui m’a donné envie de m’intéresser à ce personnage est qu’à chaque fois qu’on évoque Paul Claudel, c’est pour en dire du mal. Comme j’ai un côté Zorro, j’ai voulu savoir pourquoi il éveillait tellement les passions, également les négatives». M-J Guers ne cache donc pas son admiration du personnage et sa fascination par la complexité de son œuvre. La Maîtresse du consul est l’histoire d’une passion. «Et si je dis passion plutôt qu’amour c’est qu’à mon avis, il y a à la fois dans passion l’extase et le tourment. Ce sont les deux pendants du livre». Le héros Paul Claudel en sort-il plus sympathique ? «À mon avis le simple fait de son authenticité dans sa souffrance le rend forcément plus émouvant et plus touchant». Son roman est-il biographique ? «La vérité romanesque est beaucoup plus importante que la vérité historique. La vérité historique dans ce roman, ce sont les faits». En revanche, les situations sont le fruit de sa propre imagination. «Je suis c’est vrai, imprégnée de l’œuvre de Paul Claudel, je connais son humeur, son vocabulaire, son souffle. Mais les phrases peuvent être quelquefois de moi . Cela n’a pas d’importance». La documentation c’est la colonne vertébrale de son œuvre. «Mais dans le travail d’un écrivain, l’important ce n’est pas la part documentaire. Il faut qu’ensuite il arrive à prendre un certain recul par rapport aux informations qu’il a emmagasinées – et moi en général je laisse passer au moins six mois. Ainsi, il reprend les choses d’une manière objective et fait du matériau qu’il a entassé son propre miel. Il le compose avec son regard à lui». Quels ont été les rapports de Paul Claudel avec sa sœur, Camille ? «Il a été la première personne à la soutenir, à l’encourager. Il a écrit sur elle des articles magnifiques que personne ne lit. Il compare son art à celui de Rodin. Il a été le premier critique d’art de sa sœur. Plus tard, quand Camille a fait une dépression nerveuse, il l’a fait interner pour qu’elle se soigne. Je ne suis pas en train de lui donner raison ou tort mais souvent, on ne connaît pas les faits, et c’est un peu facile de juger un personnage, 90 ans plus tard, sans connaître vraiment la situation». L’auteur brosse donc dans son roman un portrait nuancé de l’écrivain. «Il a des traits qui sont attachants et d’autres qui le sont moins. C’est ce qui fait la richesse de cet individu. Guers considère que l’œuvre de Claudel a servi davantage à le masquer qu’à le révéler. Parmi les points obscurs de sa vie, cette passion amoureuse avec Rose Vetch. «J’ai voulu faire connaître cette femme qui a inspiré à Claudel Le Partage de midi. Elle etait ignorée. La famille Claudel voulait cacher la réalité de cette passion». «La correspondance Claudel-Rose n’est pas disponible actuellement. Elle est entre les mains d’un avocat. J’ai eu la chance de pouvoir en lire quelques lettres, une dizaine à peu près. Dans lesquelles Claudel a le même côté passionnel, excessif, que dans son œuvre. Alors que Rose apparaît comme une personne non pas effacée mais plutôt falote». La dernière lettre du livre n’est pas authentique. «À l’origine, les lettres étaient en possession de Louise Vetch, fille de Rose et de Paul Claudel. Elle avait menacé de les déchirer, de les brûler à sa mort. Elle est morte il y a trois ans. Finalement, elle les a confiées à un avocat qui, pour le moment, les tient à l’écart. On y aura accès. Mais pas tout de suite. Il y a encore trop de personnes qui sont concernées. En plus, la famille Claudel est farouchement contre l’idée qu’on pourrait enfin savoir ce secret de Polichinelle. Tout le monde sait que Paul Claudel a eu une passion amoureuse avec Rose Vetch». Juridiquement, le fait de raconter cette histoire, fût-ce dans un roman, lui a-t-il causé des problèmes. Elle avoue que ce roman lui a causé quelques ennuis, sans donner plus de détails. D’ailleurs, cela l’amuse, dit-elle. «Ce défi, cette provocation, c’est drôle. Quand on écrit un roman, on a envie de franchir des bornes, d’être excessif, de se permettre des choses que, dans la vie, on ne s’autorise pas. Et la famille Claudel, qu’est-ce qu’elle en pense ? «Beaucoup de mal, rassurez-vous», lance-t-elle dans un rire. Christophe Bataille De Christophe Bataille, on connaît le Maître des Heures, agréable autant que bref exercice d’écriture que signait en 1997 un jeune homme d’alors 26 ans. Un minimalisme austère caractérisait ses deux premiers romans Annam, en 1993 et «Absinthe» en 1994. Apprenti éditeur chez Grasset, Christophe Bataille était encore, il y a une semaine à peine, avant le coup de force des papis Goncourt, dans la course au prix des prix pour son dernier roman Vive l’enfer. Les putschistes Goncourt lui ont donné trois voix sur dix. Il n’est pas étonné de ce résultat. «Je sais bien que ce que j’écris n’est pas matière à Goncourt. Je ne suis pas leur style», dit-il. C’est vrai qu’il est atypique, inclassable et à rebours de toutes les modes. À cette remarque, il fait une moue pensive. Puis déclare : «Je me revendique de la tradition des auteurs qui ne sont pas sourds. C’est un grand orgueil d’ailleurs, admet-il. Explications : «Il y a beaucoup d’écrivains français qui sont sourds. On voit qu’ils ne s’écoutent pas écrire. Ils n’écoutent pas la musique de leur langue. Ils ne passent pas par le gueuloir. Vous savez qu’on rebat les oreilles aux pauvres élèves français par Flaubert qui gueulait ses textes Je pense qu’il avait raison. Il y a un son, une magie de la langue dont il faut tenir compte». Vive l’enfer dépeint les amours flamboyantes de Jocelyn Simarre obsédé de Heine, fils de camionneur et ferrailleur pour tout le département. Entre père trafiquant à l’est et mère affairiste à l’ouest, entre ferraille et sentiments, le héros est surtout oniriquement amoureux et amoureusement exalté. Pas d’énigme, juste une sorte de puzzle plein de formules incantatoires et de références empruntées aux grands auteurs anglo-saxons. Quelle a été la majeure source d’inspiration de son dernier roman? «J’ai vécu trois ans à Londres. Tous les matins, je roulais dans une petite Peugeot 104 vers l’Ouest industriel de la ville. Je passai devant une station électrique délabrée. C’est comme si à Paris on avait en lieu et place du Musée d’Orsay une sorte de centrale électrique de 4 hectares, désertée depuis 1934, inutilisée, squattée la nuit avec des gens qui viennent danser dans ces lieux. Et cette cathédrale de métal, c’est le siècle industriel qui s’achève. Et au lieu de faire comme on aurait fait en France un parc d’attractions, un musée, un lieu de mémoire, on ne fait rien. Les Anglais laissent ce lieu dépérir. À l’est de Londres, il y a une autre centrale électrique qui, elle, va devenir la «New Tate Gallery». Je trouvais que cette utilisation des lieux industriels, le recyclage sous des formes différentes, c’était l’histoire d’un siècle fascinant, le siècle de fer». L’auteur semble être attiré par l’Est . » Mes grands parents ont longtemps vécu à l’Est, à la frontière allemande. J’ai la tentation de penser que de ce côté-là du monde, il se passe des choses intéressantes». Christophe Bataille souligne que l’envie d’écrire lui est venue à la suite d’un voyage au Vietnam. «Je suis parti, à 20 ans, au Vietnam, en 1992. C’était l’année de l’ouverture économique. J’y suis resté quatre mois. C’est vrai que c’est un choc culturel inouï pour le jeune crétin versaillais que j’étais à l’époque – je le suis d’ailleurs encore un peu. Devant ces paysages, j’ai eu une sorte de libération . Du regard, du langage, des signes... «Le Vietnam et le désœuvrement dans lequel j’étais à l’époque ont été les deux sources d’écriture», conlut-il.
Marie Josèphe Guers et Christophe Bataille, deux auteurs français ayant reçu le prix du premier roman, ont animé un café littéraire dans le cadre du Salon Lire en Français et en Musique qui a clôturé ses activités hier. Auteur de plusieurs romans – La Femme inachevée, Éd. Actes Sud,1987, prix du premier roman et prix A-L Barthou de l’Académie française ; Peines perdues, Éd....