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Actualités - CHRONOLOGIE

Parlement - Le ton modéré des débats augure d'une trêve politique La Chambre légalise les écoutes téléphoniques(photo)

On s’attendait à une réunion orageuse, place de l’Étoile. Il n’en fut rien. Pourtant, les sujets qui sont depuis quelque temps au centre d’une polémique entre le gouvernement et l’opposition parlementaire ne manquent pas. Ce que la première journée de la réunion parlementaire a laissé donc transparaître, c’est la trêve politique qui s’est reflétée dans le ton plutôt modéré d’une opposition parlementaire généralement farouche et indomptable. Les quelques députés opposants qui ont pris la parole n’ont pas manqué, il est vrai, de critiquer le gouvernement, mais sans aller jusqu’à s’acharner contre l’équipe de M. Sélim Hoss, comme ils avaient l’habitude de le faire. Est-ce parce qu’au Parlement on pense d’ores et déjà aux prochaines législatives ? Si la question se pose, c’est en raison de l’insistance, presque inhabituelle, des parlementaires à ne relever que des questions inhérentes à leurs régions respectives. L’agriculture, les difficultés sociales de la population, les problèmes de scolarisation et d’infrastructure sont les principaux sujets soulevés par les parlementaires. Même la proposition de loi réglementant les écoutes téléphoniques, votée après l’introduction de plusieurs amendements au texte, est passée doucement, sans heurts, bien que les parlementaires soient restés sur leur faim : jusqu’aujourd’hui, ils ne savent pas, du moins officiellement, si les hommes politiques sont surveillés et pour le compte de qui. M. Nassib Lahoud a évoqué la question en passant, sans s’y attarder. Il reste qu’une des principales modifications apportées au texte concerne la surveillance des lignes téléphoniques des députés et des ministres, que la nouvelle loi interdit. En tout hier, le Parlement a voté 35 textes de loi et reporté l’examen de deux autres. Le réunion s’ouvre à 10h50. L’arrivée du député Issam Farès ne passe pas inaperçue. Le parlementaire n’a pas assisté depuis très longtemps aux réunions parlementaires. Premier à prendre la parole, M. Khalil Hraoui met l’accent sur la détérioration de la situation économique dans la Békaa, rappelant qu’il avait en vain attiré l’attention de l’ancien gouvernement sur ce problème. Le député de Zahlé, qui insiste sur les difficultés des agriculteurs à écouler leurs marchandises et sur l’importation anarchique des produits agricoles, souligne le rôle que le ministère de l’Agriculture peut jouer pour favoriser un développement du secteur agricole. M. Hraoui invite le gouvernement à consacrer, dans le cadre du budget de l’an 2000, cent milliards de livres au développement de l’agriculture. MM. Abdel Latif Zein, Ibrahim Amine Sayyed, Hassan Alawiyé et Sami Khatib soulèvent le même problème. En fait, presque toutes les interventions des parlementaires sont axées sur la crise socio-économique et sur les problèmes qu’elle engendre. Selon M. Khatib, pour pouvoir faire face aux défis qu’il est appelé à relever, le Liban a besoin d’une base solide au niveau de l’opinion publique. «Or, cette base ne peut être constituée à l’ombre de la crise socio-économique», déclare-t-il, avant de déplorer «la mentalité officielle qui a toujours négligé et marginalisé l’agriculture». M. Marwan Hamadé affirme un peu plus tard partager son point de vue, avant de souligner que la grogne populaire se généralise. Le député du Chouf critique les chiffres du budget, qui ne correspondent pas, selon lui, à la réalité. Il s’arrête particulièrement sur les dépenses d’investissements, en mettant l’accent sur le chômage qui prévaut dans le pays. «Les chiffres avancés correspondent plutôt à zéro. Interrogez les établissements de commerce et le secteur industriel. Voyez l’agriculture, les résultats de l’activité touristique cette année, les secteurs de l’éducation, de l’habitat et de l’immobilier», fait-il valoir, avant de souligner que «la dette publique va en augmentant», que «les allocations sociales régressent au moment où de plus en plus de Libanais émigrent». M. Hamadé évoque ensuite le projet de réforme administrative ainsi que les dossiers judiciaires «ouverts dans un esprit vindicatif». Selon lui, «l’opinion publique a déjà rendu son verdict». Il n’en dira pas plus. MM. Talal Merhebi, Ibrahim Bayan et Zaher Khatib pressent leurs collègues d’approuver la proposition de loi exemptant les écoliers du paiement des frais d’inscription aux écoles publiques, pendant que Mme Bahiya Hariri s’interroge sur le sort du projet d’établissement d’un réseau Intranet, reliant les écoles publiques entre elles. Mme Hariri dénonce ensuite «la suspension des travaux d’infrastructure à Saïda, à la suite de l’assassinat des quatre juges», en juin dernier. MM. Gebrane Tok et Najah Wakim mettent l’accent sur les répercussions négatives sur l’entente nationale de la dernière polémique entre le pouvoir et l’opposition sur l’entente nationale. Le député de Beyrouth stigmatise dans ce cadre «la connotation confessionnelle» de cette polémique, critiquant vivement «ceux qui attisent à caractère religieux». Il a souligné que la loi sanctionne ceux qui agissent de la sorte. «Mais apparemment, la loi n’est pas appliquée aux hommes politiques qu’ils soient au pouvoir ou en dehors du pouvoir», conclut-il en désignant ostensiblement M. Rafic Hariri. M. Ismaïl Succarieh met aussi en garde contre l’exacerbation du confessionnalisme, alors que son collègue Béchara Merhej se félicite de la politique suivie par le gouvernement à l’égard d’Israël. Il déplore toutefois que la politique interne du Cabinet «ne soit pas à la hauteur des défis qui se profilent à l’horizon». Les projets de loi votés Durant la séance matinale, la Chambre vote en un tournemain 20 projets de loi, portant pour la plupart sur des accords de coopération entre le Liban et des pays occidentaux, ainsi que la proposition de loi sur les écoutes téléphoniques. Durant la séance nocturne, 14 projets de loi sont votés, alors que l’examen de deux autres est reporté. Il s’agit notamment du texte autorisant les publications étrangères de renommée internationale à paraître au Liban. La Chambre s’est attaquée au texte, mais M. Berry a préféré en reporter l’examen jusqu’aujourd’hui, pour prendre connaissance de l’étude que M. Michel Eddé, ancien ministre de l’Enseignement supérieur et de la Culture, doit lui soumettre ce matin sur la question. Auparavant, MM. Nicolas Fattouche et Robert Ghanem avaient exprimé de vives réserves au sujet de la parution d’une édition régionale hebdomadaire du quotidien français Le Monde avant le vote de la loi sur les publications étrangères. Tous deux notent que cette édition du Monde fait paraître des publicités locales, sachant que le projet de loi sous étude interdit aux publications étrangères de passer des annonces locales. M. Fattouche met l’accent sur le danger de cette concurrence, pendant que M. Ghanem montre à la Chambre une édition de l’hebdomadaire, en expliquant que 70 % des rentrées des quotidiens libanais proviennent de la publicité. Le deuxième texte dont l’examen a été reporté a trait à l’établissement d’un système qui permet au public d’ouvrir auprès des banques et des institutions financières des comptes pour le dépôt de valeurs financières. Il suscite un vif débat entre la Chambre et le gouvernement. En dépit des assurances des ministres de l’Économie et des Finances, les parlementaires affirment redouter que le vote de ce texte n’inclut la régularisation des opérations des courtiers. Finalement, M. Berry décide que le projet de loi sera examiné en même temps qu’un autre se rapportant aux courtiers et qui est en train d’être examiné en commission. Un autre projet de loi suscite un long débat technique. Il s’agit du texte amendant certaines dispositions des deux lois relatives à la création et au règlement intérieur du Conseil constitutionnel. Les amendements proposés par le gouvernement se justifient par la présence de «lacunes» et de «clauses ambiguës» dans les deux textes, constatées par le Conseil constitutionnel lorsqu’il avait été saisi pour vérifier la constitutionnalité de certaines lois et pour trancher les recours en annulation des résultats des élections législatives. Le texte est approuvé, avec un amendement principal relatif au mode de vote : les décisions sont prises à la majorité de 7 voix au moins dans les affaires relatives à l’examen de la constitutionnalité des lois et à la majorité relative des personnes présentes dans les recours en annulation des résultats d’élections parlementaires ou présidentielle. Le texte initial préconisait à la place de la majorité relative, la majorité de cinq voix des présents au minimum. En cas d’égalité, c’est la voix du président qui compte. Le Conseil constitutionnel compte dix membres. Parmi les textes controversés, votés en soirée, un projet de loi accordant aux enseignants du secteur secondaire public une prime sur chaque heure de travail. Le ministre de l’Éducation tente de s’opposer au projet de loi – convenu lors de l’approbation de la nouvelle échelle des salaires dans le public – en expliquant essentiellement qu’il est impératif, avant de le voter, de dresser un état des lieux dans la mesure où de nombreux enseignants du secondaire sont payés, alors même qu’ils ne fournissent aucun travail. Mais le chef du Parlement intervient en mettant l’accent sur le caractère endémique du problème que posent les rémunérations des enseignants et en insistant sur la nécessité de voter le texte. M. Berry reconnaît toutefois indirectement que les enseignants des cycles primaires et complémentaires vont réclamer les mêmes droits. «J’entends déjà leur grondement. Que Dieu soit avec nos enfants», commente-t-il. Deux autres textes de loi renvoyés par le président Émile Lahoud sont approuvés après «la correction d’une erreur d’impression». Les projets de loi dits chauds sont laissés pour aujourd’hui. Il s’agit notamment du projet de loi sur l’enrichissement illicite et du texte réorganisant les wakfs druzes.
On s’attendait à une réunion orageuse, place de l’Étoile. Il n’en fut rien. Pourtant, les sujets qui sont depuis quelque temps au centre d’une polémique entre le gouvernement et l’opposition parlementaire ne manquent pas. Ce que la première journée de la réunion parlementaire a laissé donc transparaître, c’est la trêve politique qui s’est reflétée dans le ton...