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Actualités - OPINION

Tribune Transparence et chasse aux sorcières

À qui donc profite ce climat de chasse aux sorcières dans lequel baigne le pays ? L’épisode de la LBC, qui ne ménage pourtant pas son appui au régime, est révélateur de l’état d’esprit qui règne dans les cercles proches du pouvoir. Le délit commis ne justifie nullement les mesures de rétorsion préconisées par le Conseil national de l’audiovisuel, ni même la publicité qui a été donnée à l’événement. Certes, le Conseil des ministres a fini par mesurer le ridicule de la situation et refusé d’entériner les propositions qui lui avaient été soumises. Mais le climat suscité par cette affaire est malsain. L’État continue d’ailleurs de mener la vie dure aux miliciens de Jezzine qui se sont livrés à la justice alors que ceux, parmi eux, qui se sont rendus au Hezbollah ont bénéficié d’un traitement beaucoup plus clément. La collaboration avec l’ennemi est un crime puni par la loi. Mais pour que cette loi soit crédible encore faut-il qu’elle s’applique à tous. Or ceux qui, dans le passé, ont collaboré avec Israël et ont été les artisans de l’invasion de 1982 se sont retrouvés à des postes ministériels. Personne ne réclame aujourd’hui un élargissement du gouvernement pour englober les «nouveaux repentis». Mais il convient d’adopter une attitude décente et de tourner la page. La collaboration de Libanais, individus ou partis, avec Israël appartient au passé de la guerre. Est-il absolument nécessaire, à la veille de la reprise de la négociation, de réveiller les vieux démons et rappeler à ceux qui l’ont aujourd’hui probablement oublié que les Libanais étaient divisés entre eux sur une question aussi importante que l’attitude à adopter à l’égard d’Israël ? Qu’Israël dispose d’agents au Liban ne fait pas l’ombre d’un doute. La tâche des services de renseignements devrait être justement de les traquer. Mais la collaboration avec Israël, telle que pratiquée durant la guerre, appartient à un passé révolu. Les Libanais sont unanimes aujourd’hui à rejeter toute forme de collaboration et à réclamer la libération de leur territoire national. Cet acquis a coûté beaucoup de sang. Pourquoi cherche-t-on à le remettre en question ? Cette chasse aux sorcières apparaît doublement dangereuse : – Tout d’abord parce qu’elle remet en cause les acquis de la paix civile en rouvrant d’anciennes blessures et en divisant les Libanais entre «collaborateurs» et «résistants». – Dangereuse parce que, loin de préparer le pays aux changements annoncés, elle bloque toute possibilité de réflexion concernant notre avenir national. Nous sommes condamnés, dans ce climat de surenchère, à répéter inlassablement les mêmes «vérités» immuables sans qu’il nous soit permis de nous préparer aux changements annoncés. Il serait peut-être utile de recommander à certains responsables de se mettre à jour et, pour cela, de commencer à lire attentivement les déclarations des dirigeants syriens qui font preuve, concernant l’évolution de la situation régionale, d’une perspicacité et d’un sens des réalités qui nous font cruellement défaut. Plutôt que de dresser des bûchers pour brûler des sorcières qui n’existent plus, il serait utile et urgent, au nom de cette transparence dont le pouvoir se réclame, d’instaurer un débat entre les Libanais sur les problèmes de la négociation. Peut-être pourrons-nous éviter d’avoir à payer la facture de la paix après avoir payé le prix de la guerre.
À qui donc profite ce climat de chasse aux sorcières dans lequel baigne le pays ? L’épisode de la LBC, qui ne ménage pourtant pas son appui au régime, est révélateur de l’état d’esprit qui règne dans les cercles proches du pouvoir. Le délit commis ne justifie nullement les mesures de rétorsion préconisées par le Conseil national de l’audiovisuel, ni même la publicité qui a...