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Actualités - OPINION

Ote-toi de mon éclipse !

C’est enfin la matinée fatidique ! Un brave taxi s’expliquait les embouteillages par le fait que les gens feraient des emplettes en prévision de l’éclipse. Réflexe primaire qui nous parvient du fond des années de guerre : Que faire d’autre quand un tel chaos vous est annoncé ? Au fait, que ferez-vous ce matin ? Quand les poissons seront enfouis au fond de la vase, que les oiseaux se tairont dans un orage quasi planétaire ? Nous n’irons pas travailler. Pas à la plage non plus. Nous parquerons les enfants, ces petites bêtes trop curieuses, loin des ouvertures par lesquelles le Soleil pour une fois masqué se fera encore plus éblouissant. Et comme à chaque fois que la raison n’y peut rien nous nous accrocherons comme on dit chez nous : Aux ficelles du vent, à l’instinct, grégaire en particulier, le seul qui sauve en Méditerranée. En famille, entre voisins, coude à coude, à nos postes (devant nos...), nous ferons front. Dans les effluves de café, de cigarettes – pas devant les enfants – de pop-corn et autres défouloirs à grignottite, nous nous la jouerons fin du monde en simultané. Les plus téméraires sortiront leurs lunettes agréées à 5 000 LL et chercheront à tâtons, pourvu qu’il n’y ait pas la brume, quelque chose dans le ciel qui ressemblera à un halo lumineux. Pour les autres, la télé fera l’affaire. Quatre heures durant – autant écouter pousser ses cheveux –, nous assisterons au rendez-vous du Soleil avec la Lune. Mais oui, la Lune est là, le Soleil est là et tout ça. Quand, sur le coup de quinze heures trente, nous serons pris d’une terreur mystique à bon marché : et si tout s’arrêtait là ? Et si les planètes s’alignaient à cet endroit précis une fois pour toutes. Si le Soleil ne revenait pas, que Chronos ne reprenait pas son cours habituel, que nous ayons à repartir sur d’autres bases, à vivre dans l’obscurité à tout jamais, à changer de physionomie pour nous adapter aux nouvelles donnes astronomiques, comme dans les mauvais films de science-fiction. Tel sera donc pour une bonne partie de la planète le bénéfice de cette journée du 11 août : un grand frisson éphémère pour une coquetterie du Soleil, une feinte, juste pour nous donner une idée de ce que ça pourrait être sans, et nous conforter dans la certitude que l’on vivra tout de même assez longtemps avec. Et que personne ne s’avise de passer devant un écran à quelques secondes de la fin.
C’est enfin la matinée fatidique ! Un brave taxi s’expliquait les embouteillages par le fait que les gens feraient des emplettes en prévision de l’éclipse. Réflexe primaire qui nous parvient du fond des années de guerre : Que faire d’autre quand un tel chaos vous est annoncé ? Au fait, que ferez-vous ce matin ? Quand les poissons seront enfouis au fond de la vase, que les oiseaux se...