Riches et pauvres

Brasilia, capitale du Brésil, est le fruit d’un projet caressé pendant un siècle, qui vise à relier l’ensemble d’un pays à une capitale se situant en son centre et non sur le littoral, ce qui était le cas durant la colonisation portugaise. Inaugurée le 21 avril 1960 par le président de la République et son fondateur Juscelino Kubitschek, Brasilia a été désignée capitale fédérale. Pour son édification rien n’a été laissé au hasard. Le site même est un plateau situé entre quatre rivières, aux vallées larges et peu encaissées, qui toutes confluaient en aval vers une gorge assez étroite et profonde. Il a suffi alors de construire un barrage à cet endroit pour transformer ces vallées en un lac à quatre branches. Mais c’est son plan urbanistique qui lui a valu sa particularité. Le «plan pilote» ne laissait rien au hasard et prévoyait une métropole ayant la forme d’un avion. L’axe principal ou le fuselage est réservé aux fonctions de la ville ; il se termine par la cabine du pilote qui est l’immense place des Trois Pouvoirs : législatif, exécutif, judiciaire. Les ailes de l’avion sont réservées aux immeubles résidentiels, de chaque côté de deux grandes voies routières. Très vite, ces résidences luxueuses ne suffisaient plus pour une population sans cesse croissante. Les riches n’ont pas tardé à construire de belles villas autour du lac artificiel, occupant ainsi le meilleur emplacement. Il reste que les trois quarts de la population de Brasilia souffrent de pauvreté. C’est que la capitale n’a pas tardé à attirer une forte proportion de gens pauvres, venus des différentes régions du Brésil, et plus particulièrement du Nordeste, dans l’espoir de trouver un emploi. Une partie d’entre eux, ne trouvant pas de travail, vivent d’activités mineures qui leur assurent à peine de quoi survivre. Et comme l’exécution du plan pilote ne prévoyait pas d’abriter une telle masse démographique, ces pauvres ont été transférés dans des «villes satellites», petites cités construites loin de la ville et destinées à cacher cette misère. Un million de personnes y vivent aujourd’hui. Il suffit d’une simple tournée dans ces rues non asphaltées pour se rendre à l’évidence : le système économique est fortement inégalitaire dans le pays. En fait, on a l’impression que la capitale n’a pas été conçue pour la majorité de sa population.