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Actualités - REPORTAGES

Les métiers des yeux, à la loupe(photos)

Un homme qui voit mal est un homme qui vit mal. La vision est un outil hautement perfectionné qui doit être contrôlé et entretenu régulièrement ; trop de gens l’ignorent encore ou le négligent. Les ophtalmologistes et optométristes sont là pour ça, pour informer, pour aider. Le métier d’opticien n’est pas nouveau, mais les opticiens ne sont pas tous logés à la même enseigne. Il s’agit, justement, de déchiffrer ces enseignes. Sachons, tout d’abord, que l’opticien-lunetier reçoit une formation technique mais ne peut délivrer des verres ou lentilles de contact que sur présentation d’une ordonnance. D’un autre côté, l’optométriste est un professionnel de la correction visuelle. L’optométrie est une véritable science de la vue. C’est dans ce cadre qu’œuvre le Syndicat des opticiens (fondé en 1951) : pour décanter le marché en faisant une distinction de compétences. Ce n’est pas chose facile car, selon Naji Bassil d’Optique et Vision, «les opinions sont souvent partagées au sein du syndicat. Toute action est alors paralysée. De plus, nous avons hérité du bagage de la guerre et nous sommes confrontés à une dure réalité : environ 80 % des opticiens ne sont pas qualifiés». Antoine Béchir d’Optica renchérit : «Au Liban, l’individualisme prime. Une politique d’ensemble n’est jamais respectée. Néanmoins, la profession est en pleine mutation. Le principal dénominateur commun qui affectera positivement tous les aspects de la profession, tant sur le plan économique que juridique, réside dans sa réorganisation par le biais d’une nouvelle législation». D’un autre côté, Boghos Karaoghlanian de Boghos Optic estime que «le syndicat devrait être plus efficace en ce sens qu’un grand nombre de centres d’optique ne possède pas de licence délivrée par le ministère de la Santé». Outre le syndicat, l’Association pour la sauvegarde de la vue, qui regroupe la plupart des opticiens et optométristes diplômés, tente également d’agir ; elle espère notamment mettre sur pied une campagne de screening visuel à l’échelle nationale. La situation est similaire dans les autres professions paramédicales comme les audioprothésistes, spécialistes des appareils auditifs. Hani Houri, du Houri Hearing Correction Center, affirme : «De nos jours, avec le progrès technologique et la miniaturisation des transistors, le fossé se creuse entre l’optique et l’audition, et surtout entre l’audition spécialisée et les vendeurs non professionnels d’appareils auditifs comme simple produit commercial. Or, il faut savoir que les appareillages nécessitent une procédure scientifique et un suivi à long terme». Quelle est la solution et comment remettre de l’ordre dans ce marché? Il faut se pencher sérieusement sur la question. Une formation incomplète Face à la prolifération des magasins d’optique, un besoin s’est fait sentir au niveau de la formation. Toutes les personnes intéressées par l’optique se trouvaient dans l’obligation de faire des études à l’étranger. Or, les moyens font parfois défaut. Alors fut créée une école technique d’optique et d’optométrie, à Dekwaneh. Antoine Béchir explique qu’il «était nécessaire de créer une école, car il n’y avait pas de formation académique claire dans la loi de 68. Il faudrait souligner qu’à l’école de Dekwaneh, les ophtalmologistes collaborent à la formation des étudiants». Au terme de trois années d’études, les opticiens sauront en principe tailler un verre de lunetterie et le monter, souder une monture, entretenir le matériel de lunetterie, le réparer, le maintenir et le renouveler ; et au terme de cinq années, les optométristes connaîtront les techniques de mesure et de correction visuelles. On peut alors se poser des questions sur le niveau de cette école. Pour Boghos Karaoghlanian, «les études sont valables, mais il faut former les jeunes diplômés sur place. Par ailleurs, la souplesse des mains et la maniabilité ne s’acquièrent qu’avec la pratique». Krikor Mekhitarian de L’Optique est du même avis : «La formation est valable, mais les jeunes diplômés ne savent rien de la pratique. Il faut alors les reformer sur place. Munis de leur diplôme, ils sont habilités à ouvrir un magasin d’optique. Or, le marché est saturé». Mais il faut voir le bon côté des choses, et Antoine Béchir estime que «leur insertion chez les opticiens non qualifiés pourrait contribuer à régulariser le niveau de la profession». La prévention avant tout Au-delà de ces préoccupations, se pose un problème d’ordre pratique et qui n’est pas négligeable. Boghos Karaoghlanian s’emporte : «Au Liban, on ne donne pas l’importance qu’il faut aux lunettes. La majorité des personnes qui ont besoin d’en porter n’en possède qu’une paire. Cela est surprenant et incompréhensible. À part les lunettes de soleil, on ne porte jamais des lunettes de vue par plaisir, mais bien parce que l’on y est obligé. Cependant, aux yeux des gens, les lunettes coûtent cher, et ils estiment que se payer une deuxième paire est un luxe». Ce comportement quelque peu inconsidéré se double d’un problème d’ordre préventif. Trop d’enfants en bas âge perdent l’usage d’un œil, avant 8 mois, par ignorance et manque de dépistage précoce. Trop de conducteurs sont des malvoyants qui s’ignorent. Trop d’adultes sont négligeants sur leur lieu de travail et risquent l’accident. De nos jours, cela n’est plus permis. Cependant, souligne Boghos Karaoghlanian, «un nombre croissant de jeunes portent des lunettes, et cela s’explique essentiellement par la prévention des parents». Pour Antoine Béchir, «tous les experts et spécialistes sont unanimes sur la nécessité de subir des contrôles préventifs ou de routine pour préserver les acquis d’une bonne vue. Mais, parfois, des causes plus sérieuses ou pathologiques peuvent induire une baisse ou un changement de la vue; dans ce cas, en subissant un contrôle, on peut détecter et orienter vers les soins d’un ophtalmologue qui prendra à temps les mesures adéquates». Fondée en France, en 1954, dans un but d’intérêt public pour donner à chacun le droit de bien voir, l’Association nationale pour l’amélioration de la vue (ASNAV) est aujourd’hui la seule organisation française qui regroupe opticiens, fabricants, grossistes et importateurs et leur permet d’agir ensemble. Mais, au Liban, dans le tumulte des réglementations, des prestations sociales, des interventions politiques, quel est l’avenir réservé aux syndicats, associations et autres regroupements? Pour Antoine Béchir, «la profession d’opticien doit obligatoirement adopter des mesures d’assainissement sur les plans de la pratique et de l’éthique pour s’aligner avec les autres professions dans une politique globale de services de qualité».
Un homme qui voit mal est un homme qui vit mal. La vision est un outil hautement perfectionné qui doit être contrôlé et entretenu régulièrement ; trop de gens l’ignorent encore ou le négligent. Les ophtalmologistes et optométristes sont là pour ça, pour informer, pour aider. Le métier d’opticien n’est pas nouveau, mais les opticiens ne sont pas tous logés à la même enseigne....