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Actualités - REPORTAGES

Madina - Illi Yetkâl willi mâ Yitkalch du tunisien Souwissi jusqu'au 23 juin Le théâtre entre imaginaire, illusion et espoirs ...(photos)

«Illi yetkâl willi mâ yitkalch» (Ce qui se dit et ce qui ne se dit pas), pièce tunisienne de Mounsef Souwissi, occupe les planches du Madina jusqu’au mercredi 23 juin, 20h30. Deux vieillards se retrouvent à l’occasion de l’hommage qui leur est rendu par une association officielle. Loin de la nostalgie ou de l’apitoiement, le ton est à la dérision. De part et d’autre de la scène, des panneaux croulent sous les affiches rappelant la gloire de «la star des stars», Sayyida Manana (Mouniya Wertani) ou les succès de l’artiste Si Hammadi (Mounsef Souwissi). Le présentateur qui déboule sur les planches, costume de strass et sourire stressé, est en charge de la cérémonie d’hommage. L’acteur Mounji Warfali excelle dans le rôle. La crétinerie à fleur de lèvres, l’hypocrisie plus qu’un masque, une nature. Son discours, une anthologie du genre, est dégoulinant de superlatifs. Dans le pur style oriental. La parodie ne laisse pas indifférent le public. Et les rires fusent. C’est d’abord Sayyida Manana qui monte sur scène. Dos courbé, nez chaussé de lunettes, la vieille dame a l’élocution lourde. Bien que ravie d’être à nouveau sous les feux de la rampe, elle ne se départit pas d’un sourire ironique. Malgré les ravages de l’âge, Manana n’hésite pas à esquisser quelques pas de danse, en souvenir de sa jeunesse. La dame n’a rien perdu de sa coquetterie un peu superficielle. Et se montre plutôt sensible aux honneurs qui lui sont rendus. Hammadi, cloué sur une chaise roulante, étouffant difficilement une quinte de toux, fait une entrée remarquée. Vociférant, il décrie l’hommage qu’on veut lui rendre. «Laissez-moi plutôt la possibilité de gagner mon pain», lance-t-il, coléreux. «C’est comme l’histoire de cet artiste qui rêve d’un grain de raisin, et qui une fois mort se voit offrir une grappe entière», poursuit-il. «Pourquoi me rendre aujourd’hui hommage, après m’avoir laissé dépérir dans un asile de vieillards ?» se demande-t-il encore. Les deux artistes, qui ont été mariés et ont collaboré professionnellement ensemble, sont désormais à l’écart de toute activité théâtrale ou de toute vie sociale. Cet hommage inespéré les sort du cercle de l’oubli, d’un anonymat qui confinait à la mort. Cette rencontre est donc l’opportunité pour eux de se remémorer les moments forts de leur existence. De remettre sur le tapis d’anciennes querelles. Chaque moment décisif de leur relation est relaté à travers des «flash back» : les panneaux d’affichage sont repoussés sur les côtés, et les deux acteurs, retrouvant leur jeunesse, jouent les scènes. Manana et Hammadi sont très différents. Jusque dans la vieillesse, ils sont aux antipodes l’un de l’autre. Leur énergie respective est intacte. Cependant, l’oubli de la profession et l’ingratitude de la vie les ont rendus aussi aigris l’un que l’autre. Les jeux de mots, les lapsus et les «arabisations» d’expressions françaises sont pléthores. Souwissi convie le spectateur à un voyage dans l’imaginaire, dans les illusions et pourquoi pas dans les espoirs de ces deux vieillards. La pièce d’un peu moins de deux heures aurait gagné à être raccourcie. Les longueurs, aussi bien dans les dialogues entre les deux vieillards que dans les tableaux de «flash back», cassent le rythme. Et malgré des diatribes parfois difficiles à comprendre (la pièce est en tunisien), «Illi yetkâl willi mâ yitkalch» répercute un écho valable sur le théâtre. Les planches sont-elles un simple divertissement ou le terrain de toutes les réflexions ? Y a-t-il une continuité dans la création théâtrale ? Quel rôle joue-t-elle et quelle place tient-elle dans nos sociétés ? Des interrogations que le théâtre libanais gagnerait à mettre sur le tapis.
«Illi yetkâl willi mâ yitkalch» (Ce qui se dit et ce qui ne se dit pas), pièce tunisienne de Mounsef Souwissi, occupe les planches du Madina jusqu’au mercredi 23 juin, 20h30. Deux vieillards se retrouvent à l’occasion de l’hommage qui leur est rendu par une association officielle. Loin de la nostalgie ou de l’apitoiement, le ton est à la dérision. De part et d’autre de la...