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Actualités - REPORTAGES

Danse - Un centre mythique rasé à New York Katia Souan raconte les derniers jours de l'Ecole Martha Graham(photos)

Samedi 30 janvier 1999 est une date que Katia Souan ne risque pas d’oublier de sitôt. Ancienne élève de l’École Martha Graham de New York, elle a participé, ce jour-là, à la répétition de Acts of light qui s’est déroulée pour la dernière fois dans le fameux «Studio One» dans les bâtiments de l’école. Depuis, l’édifice a été rasé. «Ma seule consolation, dit Katia Souan, c’est d’avoir fait partie de la dernière promotion d’élèves à avoir dansé sur les planches du “Studio One”». Flash-back. Le Centre Martha Graham de danse contemporaine croulait depuis plusieurs années sous les dettes. «La presse avait attaqué avec virulence la gestion de l’établissement», indique Katia Souan. «De son côté, l’État de New York avait suspendu la subvention qu’il lui allouait». Résultat : «le nouveau directeur administratif, Todd Dellinger, a lancé une campagne de sensibilisation de l’opinion publique, afin de renflouer les caisses de l’école». Espérant ainsi éponger la dette. Rien n’y a fait. Malgré une vaste campagne en faveur du maintien du bâtiment, le soutien obtenu n’a été que moral. Et la maison en briques rouges, dans la 62e rue, a été détruite en février dernier. Le promoteur en charge de la construction du nouveau bâtiment a promis d’y réintégrer l’école et de reconstruire notamment le «Studio One», relève Katia Souan. Célèbre pour ses larges dimensions qu’aucun pilier de soutènement ne traversait, le «Studio One» a vu défiler plus d’une pointe. D’ailleurs, «les planches du parquet du fameux local auraient été conservées et serviraient à recouvrir le sol du studio reconstitué», indique Katia Souan. «L’institution devrait rouvrir ses portes au printemps 2000». Un lieu mythique Le Centre Martha Graham est le lieu où la danse contemporaine a pris un tournant décisif. «Cette maison a été offerte à Martha Graham en 1952 par Lila Acheson Wallace», lit-on dans l’article consacré par le «Christian science monitor» à l’établissement, le 7 octobre 1998. «Une compagnie ne peut exister sans maison», avait coutume de dire la grande dame de la danse. L’École Martha Graham créchait dans une maison traditionnelle en briques rouges, à deux étages, avec un vaste jardin. «Il y avait un arbre qu’on appelait l’arbre de Martha et qui symbolisait toute la conception artistique de Graham», souligne Katia Souan. Poussant contre une cloison qui gênait sa croissance, l’arbre a fini par intégrer le muret à son tronc. Katia Souan rappelle un mot que Martha Graham aimait à répéter : «Dans la vie, on ne peut échapper aux difficultés. Il faut apprendre à les dompter de sorte qu’elles deviennent notre propre force». De nombreux grands noms de la danse contemporaine ont été formés par Martha Graham. Merce Cunningham et Paul Taylor, tous deux élèves puis partenaires de Graham, ont créé, par la suite, leur propre technique. L’école a également vu défiler de grands danseurs classiques comme Noureïev et Barychnikov. Les ballets de Martha Graham «sont inspirés de la mythologie grecque», souligne Katia Souan. «Graham passait des heures au Metropolitan museum de New York à contempler les bas-reliefs égyptiens». Elle disait : «Je n’ai rien inventé, j’ai fait revivre la danse telle qu’elle était avant que le corps ne soit figé par deux mille ans de christianisme». Et Katia Souan de rappeler que Martha Graham «a voulu libérer le corps de ce classicisme, lui redonner la dimension spirituelle et sacrée qu’il avait dans l’Antiquité. Le corps d’un danseur est sacré, expliquait la grande prêtresse de la danse contemporaine, car sa structure verticale est le trait d’union entre la terre et le ciel». Des concepts encore d’actualité «Les idées que développait Martha Graham dans ses spectacles restent complètement d’actualité. Elle s’est opposée à l’intégrisme, au puritanisme, à toute forme de discrimination. Elle a dénoncé toute forme de ségrégation», rappelle Katia Souan. «Notamment, celle qui frappait les Amérindiens. Elle a vécu avec les Indiens d’Amérique, a copié les mouvements de leurs danses primitives». C’est en s’inspirant de ces cérémonies qu’elle «a donné aux danseurs mâles une place dans l’expression corporelle. Ils n’étaient plus les simples accompagnateurs de la prima balerina, ils avaient dans ses spectacles une place à part entière», souligne Katia Souan.
Samedi 30 janvier 1999 est une date que Katia Souan ne risque pas d’oublier de sitôt. Ancienne élève de l’École Martha Graham de New York, elle a participé, ce jour-là, à la répétition de Acts of light qui s’est déroulée pour la dernière fois dans le fameux «Studio One» dans les bâtiments de l’école. Depuis, l’édifice a été rasé. «Ma seule consolation, dit Katia...