Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGES

Affaire Karamé - Deux officiers de l'armée entendus hier Le mystère du Genav pourrait être enfin éclairci (photos)

La grande surprise de l’audience d’hier dans le procès Karamé, c’est qu’elle s’est tenue. Quelques minutes avant son ouverture, les témoins convoqués ne s’étaient pas encore présentés devant la cour. Finalement, les deux colonels de l’armée libanaise, Jean Homsy et Samir Tabbouche, ont été entendus, sans réussir à éclaircir le mystère du poste Genav ni à définir son rôle dans l’assassinat le 1er juin 1987 du Premier ministre en exercice Rachid Karamé. Ils ont toutefois lancé une nouvelle piste en évoquant l’existence de registres remontant à l’époque du drame. N’était la déposition vendredi dernier du témoin à charge Boutros Ghazal, on en oublierait presque que les Forces libanaises sont concernées. Depuis des semaines, la seule vedette devant le tribunal est, en effet, le fameux Genav, un émetteur-récepteur qui permet de communiquer avec les avions à partir du sol. Hélas, à chaque fois que l’on croit avoir compris son fonctionnement et ses capacités, de nouvelles précisions sont apportées qui détruisent le fragile édifice péniblement construit. En résumé, le brigadier Khalil Matar possédait un poste de ce genre et l’avait emporté avec lui à bord du bateau à partir duquel, selon l’acte d’accusation, Ghassan Menassa (membre en fuite du service de sécurité des FL) avait actionné la radiocommande de l’explosif. Il s’agit de savoir si ce poste a été utile pour distinguer l’hélicoptère piégé à bord duquel se trouvait Rachid Karamé. Selon Matar, Menassa et ses compagnons n’avaient nullement besoin de ce poste, d’abord parce qu’il n’y avait pas d’autres hélicoptères ce matin-là se dirigeant vers Beyrouth à l’heure dite, les deux autres se dirigeant vers la base d’Adma et vers Chypre. Ensuite, toujours selon Matar, son poste ne pouvait capter la communication radio entre les pilotes des hélicoptères et la tour de contrôle de la base de Kleyate (au Liban-Nord) car il n’était pas branché sur cette fréquence. À l’appui de ses dires, Matar n’a cessé de répéter à la cour que la fréquence de Kleyate n’était pas installée sur son poste. Une même fréquence pour deux bases aériennes ? Depuis, la cour cherche désespérément à savoir quelles sont les fréquences installées sur les Genav en général et sur celui de Matar en particulier, quelles sont les capacités de ces postes, qui en possédait et suivant quelles modalités. Ce qui est sûr, c’est que les Genav ont une capacité de six fréquences et qu’en général, ils sont remis au commandant de la base aérienne qui les distribue selon les besoins de la navigation aérienne. Ordinairement, les Genav sont branchés sur les deux fréquences de la base, la fréquence SOS qui est universelle, celle des opérations centrales à Yarzé et deux autres installées selon les besoins de la base. Apparemment, cela semble simple. Mais tout se complique lorsque, dans un rapport du commandement des forces aériennes présenté à la cour, il apparaît que la fréquence 123,1 est celle de la base de Kleyate, alors qu’en énumérant les fréquences installées sur son poste, Matar avait cité la 123,1, affirmant qu’elle est celle de la base de Rayak. «Elle avait été attribuée au radar de la base de Kleyate, mais lorsque ce dernier a été endommagé, nous l’avons transporté à la base de Rayak et nous avons utilisé sa fréquence», avait déclaré le brigadier Matar à la cour. Se peut-il que deux bases différentes aient la même fréquence ? Matar affirme que non, précisant que la fréquence 123,1 n’était plus utilisée que par Rayak, puis par la base de Halate lorsqu’il en a pris la charge. Le colonel Samir Tabbouche, commandant de la base de Kleyate à l’époque du drame, estime lui aussi que deux bases ne peuvent pas avoir la même fréquence et il ajoute qu’en 1987, la base de Kleyate n’avait effectivement pas de radar. Par contre, le colonel Jean Homsy, actuel commandant de la base de Kleyate, déclare à la cour qu’en 1987, la fréquence de la base de Kleyate était 123,1. Il affirme aussi qu’il détient cette information de trois aspirants de la section technique de la base, en poste à l’époque. Comment résoudre ce casse-tête ? Depuis des semaines, la cour essaie de connaître la vérité, multipliant les auditions et les documents sans parvenir à un résultat définitif. Le problème est surtout dû au fait que les documents officiels ont disparu du siège du commandement de l’armée à Yarzé dans la foulée du 13 octobre 1990. Mais hier, et pour la première fois depuis longtemps, une lueur d’espoir est apparue, lorsque les colonels Homsy et Tabbouche ont affirmé que les fréquences étaient régulièrement notées dans les registres de la base de Kleyate, registres qui se trouveraient actuellement dans les archives de la base. Si la cour se décide à consulter ces registres, elle pourrait ainsi connaître les fréquences utilisées à la base de Kleyate en 1987. Elle saura alors si, effectivement, le brigadier Matar a pu entendre les communications entre les hélicoptères en vol avec la base de Kleyate au matin du 1er juin 1987. La cour ayant renoncé à convoquer une nouvelle fois le brigadier à la retraite Sami Cheikha, qui avait présidé la commission d’enquête militaire à l’époque du drame, elle entamera vendredi l’audition des témoins de la partie civile et de la défense. En principe, l’ancien ministre Joseph Hachem, alors proche conseiller du président Amine Gemayel, ainsi que Me Émile Najm, membre du PNL, seront entendus. Les questions devront porter sur les contacts entre le président Gemayel et le président Camille Chamoun d’une part, et le Premier ministre assassiné d’autre part. Il s’agit de voir si les deux parties étaient réellement sur le point de conclure un accord mettant un terme à la guerre… Une sorte de Taëf avant l’heure …qui aurait pu abréger les souffrances des Libanais.
La grande surprise de l’audience d’hier dans le procès Karamé, c’est qu’elle s’est tenue. Quelques minutes avant son ouverture, les témoins convoqués ne s’étaient pas encore présentés devant la cour. Finalement, les deux colonels de l’armée libanaise, Jean Homsy et Samir Tabbouche, ont été entendus, sans réussir à éclaircir le mystère du poste Genav ni à...