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Actualités - REPORTAGES

Drame - Une femme qui s'est tuée pour en finir avec la solitude et le désarroi Le parquet du Mont Liban retient la thèse du suicide de Dany Bustros

L’enquête sur le suicide de Dany Bustros a surtout mis en évidence la solitude et le désarroi d’une femme qui a décidé de mettre fin à ses jours lorsqu’elle a constaté qu’elle était abandonnée de tous. C’est ce que Dany a confié aux religieuses avec qui elle avait pris l’habitude de prier, quelques minutes avant de se donner la mort, le samedi 26 décembre, en se tirant une balle dans la tête. L’enquête, dont le dossier a été remis hier à M. Chucri Sader, procureur général du Mont-Liban, en même temps que le rapport du médecin légiste, est principalement basée sur les témoignages de l’employée de maison philippine, Florani Bassita (28 ans), et du compagnon séoudien de la danseuse, Nasser Malek Darrar (30 ans). Le magistrat a retenu la thèse du suicide et a décidé de classer l’affaire pour cette raison. Il a toutefois engagé des poursuites contre le Séoudien, accusé de séjour illégal au Liban depuis plusieurs années. Nasser et Florani ont tous deux confirmé que Dany se trouvait dans un état psychologique désastreux le jour où elle s’est suicidée. Leurs deux versions concordent. La jeune Philippine qui a passé deux ans au service de Dany a raconté aux enquêteurs que la danseuse s’était réveillée ce jour-là à 13h et semblait particulièrement mélancolique et pensive. Elle avait refusé de prendre le déjeuner mais avait demandé à l’employée de maison de préparer des petits pois au riz à son compagnon. Florani, qui avait fermé la porte de la cuisine, n’a pas entendu le coup de feu. Nasser, qui se trouvait au deuxième étage du duplex où résidait Dany à Adma, a fait irruption à 15h 30 dans la cuisine, affolé, les mains tachées de sang. Il demande à l’employée de maison d’appeler à l’aide car Dany gisait dans une mare de sang dans sa chambre à coucher. Florani appelle en vain les voisins à la rescousse. Elle voit Nasser prendre contact sur son portable avec les amis de Dany qu’il appelle également à l’aide. Une fois la malheureuse transportée à l’hôpital, Florani se met à nettoyer la chambre. Elle trouve sur le sol un petit revolver qu’elle pose dans l’armoire et qu’elle remettra ensuite aux enquêteurs lorsqu’ils arriveront sur les lieux. «Mélancolique et déprimée» La relation que le Séoudien fait des événements est pratiquement la même. Il précise, toutefois, que la porte de la chambre à coucher était fermée et qu’il a dû entrer par la porte du balcon. Selon Florani, Dany était constamment mélancolique et déprimée. L’employée de maison l’entendait parler tout le temps au téléphone. Elle semblait toujours en colère, précise-t-elle. Trois jours avant Noël, elle était particulièrement nerveuse. «Je l’entendais répéter à voix haute : “Il n’y a plus d’argent, il n’y a plus d’argent”, raconte Florani. Nasser était toujours à ses côtés, elle pleurait tout le temps. Elle était inquiète, nerveuse et tourmentée». Priée de dire si Nasser battait Dany Bustros, Florani répond par l’affirmative. Elle précise qu’il y a presque trois mois, elle est intervenue pour aider Dany que Nasser rouait de coups après un dîner bien arrosé. De son côté, le Séoudien raconte qu’il vit depuis neuf mois chez Dany. Il est arrivé au Liban en 1993 où il a épousé Sonia Toufic Ballan dont il a eu un enfant. Mais le couple ne tarde pas à divorcer et pour que Nasser ne fuie pas avec l’enfant, Sonia obtient une décision judiciaire interdisant à son ex-mari de voyager, selon les explications de Nasser qui précise que c’est pour cette raison que son passeport a été confisqué par la Sûreté générale. Il indique qu’il n’a pas pu le récupérer depuis. Il affirme avoir ensuite travaillé dans le secteur immobilier avec Georges Oueiss avec qui il a fini par se disputer. Les deux s’étaient retrouvés devant le tribunal. Dany, raconte-t-il, l’a aidé à gagner le procès. Il fait sa connaissance dans un restaurant de Kaslik, en 1997, grâce à une amie commune, Carmen Akiki. Il venait de sortir de prison où il a passé deux ans après avoir été jugé et condamné en 1995 pour escroquerie et usage de faux. Un courant de sympathie passe entre les deux. Nasser rend régulièrement visite à Dany et lui fait croire qu’il est extrêmement riche. Ce n’est qu’en avril dernier qu’il s’installe chez elle. Il y a trois mois, il est interpellé pour trafic de drogue, mais il est relâché le jour même. Dany avait de sérieux problèmes d’argent, dit-il, surtout que les boîtes de nuit où elle avait l’habitude de se produire avaient rompu tout contrat avec elle. Elle était complètement désespérée. Il y a un mois, elle s’est offert un lifting et s’est cloîtrée chez elle parce qu’elle ne voulait pas que quelqu’un voie son visage bouffi. «À genoux, elle prie deux heures durant» Seules les religieuses, avec qui elle avait l’habitude de prier, la visitent. Elles prient ensemble. Le 23 septembre 1998, elle reçoit un chèque de 750 dollars de Samir Darwiche, le directeur de l’hôtel Napoléon à Hamra. Elle se rend compte que l’argent est une avance de son avocate, Samar Samrani. Elle est bouleversée, puis elle entre dans une grande colère. La veille de Noël, le 24 décembre, elle demande à Nasser de la déposer chez les religieuses à Antélias. Elle est restée deux heures à genoux, priant avec elles. À son retour, elle essaie plusieurs fois de prendre contact avec son frère Gaby qui lui raccroche au nez à chaque fois qu’il entend sa voix parce qu’il s’était disputé avec elle, poursuit Nasser. «Dany était livide. Elle était ravagée sur le plan psychologique. Elle a appelé Samar Samrani et Carmen Akiki. Je l’ai entendue la traiter de menteuse», ajoute le Séoudien dans sa déposition. Le jour de sa mort, Dany prend contact avec Walid Aramouni au Regency Palace Hotel. Elle appelle ensuite Awad Tantaoui, un des musiciens qui l’accompagne, et lui demande de venir chez elle avec l’ensemble de la troupe. Elle raccroche et téléphone aux religieuses, leur raconte ses déboires et leur dit que ses amis l’abandonnent tous l’un après l’autre. Dany se dirige ensuite vers sa chambre et demande à Nasser de lui amener plusieurs boîtes de Nozayan, une sorte de calmant. «Je veux me suicider et en finir avec cette vie», lui dit-elle. Mais son compagnon fait la sourde oreille et lui donne un comprimé de Lexotanil. Elle avait envoyé son chauffeur chez sa mère amener quelques affaires. Elle entre dans sa chambre avec, dans les mains, son portable et un paquet de cigarettes. Nasser s’installe dans un petit salon adjacent. Quelques minutes plus tard, une détonation déchire le silence. Lorsque le Séoudien parvient à entrer dans la chambre, Dany est toujours en vie, mais elle agonise. Il demande à l’employée de maison d’appeler à l’aide et prend contact à son tour avec Carmen Akiki qui ne peut pas venir parce qu’elle n’avait pas de voiture. Nasser se met à appeler tous les amis de Dany, ainsi que son chauffeur, qui est pris dans un embouteillage. Seul le musicien, Awad Tantaoui, accourt et aide Nasser à la transporter à l’hôpital. Selon le Séoudien, Dany lui a fait part plusieurs fois de son désir de mettre fin à ses jours. Il reconnaît l’avoir battue parce qu’elle était jalouse, dit-il, et qu’elle l’accusait de la tromper. Il reconnaît aussi qu’elle l’entretenait. Interrogé au sujet de l’arme, il note que le revolver était un cadeau de Fady Sarouphim, précisant qu’il avait vu avec Dany un grand revolver noir qui appartenait à son père et qu’elle gardait, lui a-t-elle dit, en souvenir. Nasser affirme qu’il a pris l’arme et qu’il l’a déposée dans une valise chez Walid Iskandarani. Les forces de l’ordre avaient toutefois lu le journal de Dany. La malheureuse y raconte qu’elle s’était disputée le 5 novembre avec ses parents à cause du Séoudien et note que ce dernier lui avait volé quatre briquets, deux de marque Dupont et un de marque Cartier, ainsi que le revolver de son père. Nasser avoue que les briquets se trouvent dans ses valises dans l’appartement de Dany et que le revolver est toujours chez Walid Iskandarani. Il ajoute qu’il aimait Dany et qu’il voulait l’épouser.
L’enquête sur le suicide de Dany Bustros a surtout mis en évidence la solitude et le désarroi d’une femme qui a décidé de mettre fin à ses jours lorsqu’elle a constaté qu’elle était abandonnée de tous. C’est ce que Dany a confié aux religieuses avec qui elle avait pris l’habitude de prier, quelques minutes avant de se donner la mort, le samedi 26 décembre, en se...