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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Rencontres Participation libanaise à un séminaire à Ottawa Programmes d'éducation civique en perspective comparée

Un séminaire a récemment groupé à Ottawa plus de quinze participants canadiens, haïtiens et libanais pour étudier les perspectives et modalités d’application pédagogique de l’éducation à la paix dans un contexte pluraliste. Au cours de cette rencontre, organisée par le Bureau canadien d’éducation internationale (BCEI), avec le soutien de l’Agence canadienne de développement international (ACDI), l’expérience libanaise au sein du Centre national de recherche et de développement pédagogique (CNRDP), dans la conception des nouveaux programmes d’éducation civique, l’élaboration des manuels et la formation des enseignants, a été présentée comme exemple en vue de la sauvegarde de la paix civile et du pluralisme démocratique auprès de la nouvelle génération libanaise d’après-guerre et d’après-paix. Dans un monde globalisé où se développent à la fois l’individualisme et le besoin de solidarité, ainsi que des conflits qui brisent ou perturbent le lien social, l’éducation peut contribuer à la conciliation difficile entre liberté et autorité, individualité et collectivité et à la résolution des conflits interpersonnels et sociaux. Risques et inculturation L’apprentissage éducatif à la résolution des conflits est cependant jalonné d’enbûches et de risques qui ont été exposés par le groupe libanais. Il y a d’abord le risque de réduire l’apprentissage à un ensemble de techniques vidées de leur fondement valoriel, la médiation et la négociation devenant un but en soi, et non des moyens de rétablir et de consolider la relation humaine. Un bon négociateur commercial, soupesant et manipulant des rapports d’intérêts, peut manquer de tout savoir relationnel dans ses rapports interpersonnels de type non contractuel. Second risque : Quand, sous couvert de dialogue et de conciliation, tout devient négociable, c’est l’individualisme à outrance qui se développe au détriment de la norme, et la perte du sens de l’intérêt général, avec la génération permanente de conflits à cause même de la dilution de la norme. Troisième risque, exposé par le groupe libanais : La transplantation et l’importation de techniques de résolution des conflits, sans acculturation à la réalité sociale. Le Liban jouit de fortes traditions de conciliation et de compromis qui se traduisent dans des expressions quotidiennes bien connues : ma’lech, baynâtina, masshîha, bi’na yaha... (ça ne fait rien, entre nous, laisse passer, vends-la moi et qu’on en finisse). Certes le lien social se maintient au Liban, en famille et à l’école et dans les relations professionnelles et de voisinage, mais des fois aux dépens des droits de l’individu. Introduire cependant de nouvelles procédures de médiation, comme une mode, fait perdre les anciennes habitudes sans faire intégrer les nouvelles procédures dans les mentalités. Briser l’arsenal du non-dit et de la taquiyya (dissimulation) entraînerait la rupture du lien social, si les valeurs de franchise et de respect mutuel ne sont pas profondément inculturées. Le Liban a des leçons à donner là où le lien social est perturbé, mais aussi des leçons à prendre. Il s’agit dans le contexte libanais de promouvoir l’éducation à la résolution des conflits, mais sans mensonge social (kazib, mujâmala, musâyara, tazâki...), lui-même générateur et multiplicateur de conflits, en instituant surtout l’autorité de la norme au lieu des rapports de subordination et d’influence. Médiation par les pairs et acteurs impliqués La visite des participants au Canadian International Institute of Applied Négociation à Ottawa et au Collège catholique Samuel-Genest, ainsi que les démonstrations pratiques de Marcel Papineau, Francine Titley, Flaurie Staurie et Michaël Mclellan montrent les avantages, en termes de réduction des coûts sociaux et de protection du lien social, de l’éducation à la résolution des conflits scolaires et la formation des jeunes, dès les bancs de l’école, à la médiation et à être eux-mêmes des médiateurs, et non des observateurs indifférents ou complices des rixes et mésententes de leurs camarades. Deux des quatre élèves du cycle secondaire au Collège catholique Samuel-Genest qui simulent devant les participants une séance de «médiation par les pairs» sont d’origine libanaise! C’est dire que nous, Libanais, nous ne sommes pas si loin du civisme et que cela s’apprend. Séance exaltante et summum de l’apprentissage civique, où l’élève n’est pas assisté, mais impliqué, engagé et acteur dans la relation humaine à l’école. Un tel apprentissage, approfondi, vécu et intégré, déborde certes l’établissement scolaire. Quand on nous parle en tant que Libanais de négociation, de médiation et de compromis, nous savons bien de quoi il s’agit. Mais la négociation débridée aménage des expédients, sabote les intérêts de ceux qui sont hors de la négociation, et fait resurgir plus tard le conflit avec tout le poids et les séquelles du passé. Jamais le Liban n’a eu autant besoin de rétablir les sens et l’autorité de la norme en tant que cadre de régulation de la vie sociale et des rapports interpersonnels, et en tant que moyen privilégié de pacification des rapports sociaux. L’éducation au Liban, à travers les nouveaux programmes d’éducation civique et du système de valeurs véhiculé par l’enseignement, est la première concernée. Les manuels scolaires unifiés, mais non stéréotypés, d’éducation civique, dont une partie est déjà diffusée dans les écoles et d’autres sont en cours d’élaboration au CNRDP sous la direction du professeur Mounir Abou Asly, se proposent la promotion de l’espace public, la citoyenneté et la paix civile, fruit de notre expérience à la fois riche, douloureuse et partagée. Une liste du contenu des nouveaux programmes d’éducation civique, relativement à l’altérité, la connaissance mutuelle et la résolution des conflits interpersonnels et sociaux, est présentée par les participants. Remplir ce corpus avec un matériel pédagogique adapté qui suscite la conviction intime et l’engagement exige une profonde connaissance du terrain, en ce qui concerne notamment l’exercice du pouvoir à l’école et les tradition culturelles. Une documentation pédagogique, à la fois canadienne et internationale, présentée par Stuart Ross, Dan Hefkey, Sylvie Richer et Suzanne Beaulieu, rejoint une expérience libanaise originale, et peut-être pionnière dans le monde arabe. Le grand intérêt de la rencontre au BCEI à Ottawa est d’avoir mis en relief le nouvel apport libanais à l’éducation civique et dans une perspective comparée, d’avoir clarifié les concepts et déterminé les contours de l’action pédagogique en vue de la paix civile et du développement.
Un séminaire a récemment groupé à Ottawa plus de quinze participants canadiens, haïtiens et libanais pour étudier les perspectives et modalités d’application pédagogique de l’éducation à la paix dans un contexte pluraliste. Au cours de cette rencontre, organisée par le Bureau canadien d’éducation internationale (BCEI), avec le soutien de l’Agence canadienne de développement...