Contrebande de cigarettes pour financer les partis... Un colonel en cavale en croisade contre le pouvoir roumain

Les révélations d’un colonel roumain «en cavale» sur une affaire de contrebande de cigarettes mettent en cause les partis de la majorité comme de l’opposition et contribuent à amplifier le scandale le plus retentissant depuis la chute du dictateur Nicolae Ceausescu. Recherché par la police pour son implication dans ce trafic, le colonel Georghe Trutulescu affirme dans une déclaration écrite remise à l’agence de presse Universel que la contrebande organisée par l’Etat roumain sert au financement occulte des partis politiques. «Ces opérations rapportent un bénéfice net de 5 à 6 millions de dollars par an, qui sont déposés sur le compte de certains partis», soutient le colonel déserteur, tout en refusant d’en désigner les bénéficiaires. Le responsable militaire qui met hors de cause le président Emil Constantinescu, révèle cependant que l’ancien régime de Ion Iliescu comme le nouveau pouvoir sont compromis. «La contrebande de cigarettes, d’alcool ou de café représente une source importante d’argent pour des collectivités (services de renseignements), et des partis politiques», écrit-il. Mais, poursuit-il, des armes «de calibre 7,62mm et même des missiles» sont également introduits clandestinement en Roumanie lors de ces opérations de contrebande. Selon cet officier du service de protection des personnalités, qui refuse de faire office de bouc émissaire, ces opérations illégales à l’aéroport militaire de Bucarest-Otopeni sont des pratiques courantes et régulières. «Encore récemment, chaque jour deux ou trois avions atterrissaient avec des cigarettes», explique-t-il. Mardi, le chef de la police roumaine, le général Nicolae Berechet, avait déclaré que cet aéroport militaire avait déjà été le théâtre de plusieurs opérations de contrebande, notamment en mars. Le colonel Trutulescu indique qu’il existe sur ces pratiques de contrebande une guerre secrète entre les divers services de renseignements. L’affaire remonte au 16 avril, quand un avion ukrainien affrété par Air Sofia transportant 3.000 caisses de cigarettes demande l’autorisation de se poser à Bucarest, officiellement, pour permettre à l’équipage de se reposer. De nuit, les cigarettes sont chargées dans trois poids-lourds, sous la surveillance du colonel Trutulescu. Le lendemain plusieurs quotidiens reçoivent anonymement des informations sur ce trafic. Selon le président Constantinescu, il s’agit d’un «flagrant délit» pour démasquer un réseau de trafiquants. Or, curieusement, les principaux acteurs, l’équipage de l’avion, puis le colonel déserteur, prennent la fuite sans être inquiétés. (AFP)