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Actualités - CONFERENCES INTERNATIONALES

Philosophie - Symposium à Heidelberg Le professeur Naaman revendique l'arabité d'Averroès (photo)

Le philosophe maure Averroès est décidément au goût du jour. Il fait l’objet d’études, de films (notamment «Le Destin», de Youssef Chahine) et de multiples conférences. À l’occasion du huitième centenaire de son décès, l’université de Heidelberg, en Allemagne, a consacré au père de la «double vérité» un symposium international. Une rencontre de penseurs et d’universitaires de plusieurs pays qui ont décortiqué l’œuvre du philosophe. Du côté libanais, M. Jihad Naaman, professeur de civilisations comparées à l’UL, a disserté à Heidelberg sur la «valeur du commentaire d’Aristote par Averroès». Un premier constat élémentaire de M. Naaman, «on revient vers la philosophie quand on a des inquiétudes». Changement de siècle oblige, la philosophie «qui, pourtant, pose des interrogations bien plus qu’elle ne fournit de réponses», reprend ces dernières années du terrain. Il y a bien sûr les nouveaux philosophes mais aussi un mouvement de redécouverte des maîtres anciens au moyen notamment d’ouvrages de vulgarisation. «C’est dans ce contexte que s’inscrit l’intérêt renaissant — surtout en Occident — pour les idées d’Averroès». M. Naaman fait d’ailleurs remarquer que c’est «Averroès, avec Avicenne, qui fit découvrir à l’Europe chrétienne les œuvres de Platon et d’Aristote». Par ailleurs, sa doctrine de la «double vérité», selon laquelle il peut y avoir distinction et même opposition entre les vérités rationnelles et révélées, a été condamnée par les ulémas musulmans et lui valut l’exil. L’Église de son côté a rejeté plus tard l’«avérroïsme», école fondée par le philosophe belge Siger de Brabant. «Pourtant, relève M. Naaman, Averroès fut un rationaliste éclectique, ouvert et croyant à sa façon, estimant que chacun a sa propre religion. Il entend prévenir tous les conflits entre le Coran et les philosophes en distinguant, pour une même vérité, trois degrés de compréhension : celui du philosophe qui connaît, par démonstration, la vérité absolue ; celui du théologien qui interprète, par la logique, et atteint le vraisemblable ; celui du vulgaire, qui atteint la vérité par la foi». «L’Occident accorde généralement plus d’importance à Averroès que le monde arabe et islamique. Sans doute parce qu’il constitue un pont de civilisation entre deux mondes», indique M. Naaman. Qui revendique, pour sa part, l’arabité d’Averroès et réclame «son retour dans le camp arabe. Nous devons libérer Averroès des préjugés de certains penseurs arabes. Il a œuvré en quelque sorte pour que les gens comprennent que la sagesse et la foi existent chacune en elle-même. C’est là une grande leçon de démocratie, de séparation des pouvoirs, de droit à la différence, de pluridimensionnel», dit M. Naaman. Dans un autre registre, l’enseignant déplore le manque d’intérêt des Libanais pour les débats philosophiques. «Ce sont pourtant les idées qui mènent le monde», souligne-il. «La réalité culturelle gère toutes les réalités, qu’elles soient sociales, économiques, écologiques, pédagogiques…»
Le philosophe maure Averroès est décidément au goût du jour. Il fait l’objet d’études, de films (notamment «Le Destin», de Youssef Chahine) et de multiples conférences. À l’occasion du huitième centenaire de son décès, l’université de Heidelberg, en Allemagne, a consacré au père de la «double vérité» un symposium international. Une rencontre de penseurs et...