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Actualités - OPINION

Capitol Bill

Finalement, Monica Lewinsky n’aura pas pesé bien lourd, malgré les 90 kilos qu’elle accuse depuis quelque temps sur la bascule, dans cette consultation de midterm. Et ils semblaient peu nombreux, en fin de journée, ceux qui s’étaient laissé impressionner par le thème, difficilement exaltant il faut en convenir, de la dénonciation des galipettes présidentielles un moment choisi par les stratèges républicains comme cheval de bataille du rodéo électoral. L’espace d’une journée, il conviendrait d’oublier les chiffres – sont-ils éloquents d’ailleurs tant paraissent minimes les changements qui viennent de se produire dans le paysage politique? Dès aujourd’hui, on peut en être certain, chacun des deux camps s’évertuera à prouver, une foule d’arguments à l’appui, qu’il a gagné et que l’avenir désormais est en de meilleures mains. Qu’importe la rhétorique politicienne : les Américains, eux, viennent de donner une nouvelle preuve de leur (relative) sagesse, pour les uns en s’abstenant de se rendre aux urnes, pour les autres en se prononçant pour un statu quo somme toute rassurant. Et pour tous en oubliant, du moins a-t-on cherché à le faire croire, les néfastes effets du zipgate de ces derniers mois. C’est que l’économie, en dépit des sirènes d’alarme asiatique et russe, se porte bien; les succès diplomatiques remportés au Proche-Orient, dans les Balkans et en Irlande du Nord chatouillent fort agréablement l’ego yankee; les ménages pauvres ne se sont jamais sentis aussi protégés; enfin, aucun signe de nouvelles taxes ne pointe à l’horizon et les rares décisions fiscales de ces derniers mois ont fait l’objet d’un consensus entre la Maison-Blanche et le Congrès. Tout au long des semaines écoulées, on a soigneusement évité d’aborder en profondeur les sujets délicats qui, bien plus que le nombre de sièges gagnés ou perdus, intéressent l’homme de la rue : sécurité sociale, financement de ce véritable gouffre qu’est le Medicare, lutte contre la criminalité, création d’emplois, déficit budgétaire… Habiles tacticiens, une fois n’est pas coutume, les démocrates ont très vite su capter la lassitude de l’électorat devant l’argument trop souvent martelé de l’«immoralité» clintonienne. Au slogan : «Rappelez-vous lorsqu’il nous a regardés dans les yeux», ils ont riposté en dénonçant «ceux qui paraissent plus soucieux de destituer le président que de servir le peuple américain». Bill Clinton, lui, a donné une fois de plus la mesure de son talent. D’une discrétion exemplaire sur la scène nationale quand les circonstances l’exigeaient, réapparaissant toujours au bon moment mais sans jamais s’attarder, plantant des piques à bon escient à Wye River et sachant mettre l’accent sur les véritables menaces qui, au-delà des Etats-Unis, guettent le monde. Absente pratiquement depuis la publication du rapport Starr, son épouse aura accompli une fin de parcours idéale, qui a été aussi un formidable travail de relations publiques, achevant de mettre de son côté ce qui reste le principal atout face à un Grand Old Party vieillissant :les femmes, les minorités ethniques et la communauté gay. Une mobilisation médiatique sans précédent; un total de plusieurs centaines de milliers de kilomètres parcourus en train ou en avion; des millions de dollars engloutis dans des campagnes publicitaires qui se seront finalement révélées inutiles quand elles n’ont pas produit un effet contraire à celui que l’on escomptait; un enjeu représenté par l’autorité de l’homme censé être le plus puissant de la planète; le leadership du monde à l’aube d’un nouveau millénaire, avec à la clé une présidence US qui pourrait échoir dans deux ans à Al Gore ou à George Bush Jr. Etait-ce de cela qu’il s’agissait en ce mardi 3 novembre ? Mais alors d’où venait cette tiédeur populaire, contrastant avec la ferveur manifestée lors de la consultation de 1996 ? De cette évidence toute simple : 55 républicains et 39 démocrates caracolaient en tête de course, pratiquement sans adversaires de taille. D’autres candidats jouissaient d’un avantage financier tel qu’ils étaient certains de gagner. Ne restaient qu’une quarantaine de sièges à disputer à la Chambre des représentants, une situation que l’on retrouvait – exception faite pour la Californie et New York – au niveau du Sénat et des postes de gouverneur. Les grandes causes ne sont plus ce qu’elles étaient et l’impeachment même n’effraie personne tant en paraît lointaine, sinon irréaliste, la perspective. Au fait, Wall Street n’est-il pas plus important que Capitol Hill ?
Finalement, Monica Lewinsky n’aura pas pesé bien lourd, malgré les 90 kilos qu’elle accuse depuis quelque temps sur la bascule, dans cette consultation de midterm. Et ils semblaient peu nombreux, en fin de journée, ceux qui s’étaient laissé impressionner par le thème, difficilement exaltant il faut en convenir, de la dénonciation des galipettes présidentielles un moment choisi par...