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Actualités - CHRONOLOGIE

Eau de rose à l'africaine

Les vieux manoirs anglais ou les palaces de Monaco n’ont plus le monopole des belles histoires d’amour: les Nouvelles éditions ivoiriennes (NEI) viennent de lancer «Adoras», une nouvelle collection de «littérature sentimentale entièrement africaine». «Nous nous sommes rendus compte que les lectrices dévoraient les histoires sentimentales. Mais les personnages y ont des comportements occidentaux, l’Afrique n’apparaît jamais. Nous avons donc créé cette collection aux couleurs continentales, avec des personnages, des vêtements et des mets africains», explique la directrice de cette collection, Mme Méliane Boguifo. Pour elle, «Adoras» est un «Harlequin à la sauce africaine». Dans «Cache cache d’amour», «Cœurs piégés» ou «Parfums d’Assinie» – la plage de cocotiers préférée des Abidjanais –, les héros s’appellent Ismaël Tourné, Kablan Malan ou Moussa Soumahoro. Les couples se délectent de «foutou babane avec sauce graine mélangée au gombo sec», d’attiéké (manioc pilé) ou d’alloco (banane plantain frite), arrosé de jus de gingembre ou de bissap. Ils dansent le zouk, le soukouss ou le mapouka, dernier rythme en vogue à Abidjan. Pour séduire son soupirant, Eve-Anne revêt «un pagne jaune imprimé de masques dorés aux traits fins et énigmatiques», tandis qu’une rivale «utilise des produits éclaircissants de très mauvaise qualité»... Les romances sont ancrées dans les réalités du continent. Une maman perd son stock de pagnes dans l’incendie du marché de Treichville – qui a réellement ruiné nombre de commerçantes l’an dernier –, les enfants orphelins sont dispersés chez leurs tantes ou renvoyés de l’école, faute d’argent. La collection «Adoras» répond toutefois aux canons du genre: «Des rebondissements, beaucoup de rêve et une fin heureuse», résume Mme Boguifo. L’argent y joue un rôle prépondérant. Si les héroïnes sont souvent de condition modeste, leurs soupirants sont de parfaits «grottos» – surnom donné à Abidjan aux messieurs nantis –: ils portent montre Rolleix, chemise Cardin, habitent la «7e tranche, quartier des milliardaires» d’Abidjan, et hésitent pour leurs sorties entre Mercedes, Ferrari et Porsche, toutes marques dûment énumérées. Modèles de vertu C’est ainsi qu’une étudiante tombera sous le charme d’un «séduisant quadragénaire» dans «Sugar Daddy», sous-titré «Une jeune fille aime un tonton». Les auteurs doivent rester «aux lisières de la sexualité», avec des descriptions très chastes lorsque «les corps dévêtus et nimbés de lumière ambrée dansent le ballet le plus vieux du monde». «Nos héros sont des modèles de vertu. Nous donnons aux jeunes filles une éducation sentimentale: qu’elles ne courent pas dans le lit des hommes dès le premier regard», souligne Mme Boguifo. Education oui, militantisme non. Toujours au nom du rêve et de l’évasion, «Adoras» glisse sur les sujets qui fâchent. «Vous êtes les anciens. Vous avez conduit l’Afrique dans l’impasse avec vos idées rétrogrades», se révolte une jeune fille, contrainte d’abandonner ses études et de se marier... avant de succomber, soumise, à l’irrésistible sourire de son époux imposé. «Un des manuscrits que nous lisons actuellement évoque le thème controversé de l’excision», relève toutefois la directrice de collection, selon laquelle les six premiers titres sortis – écrits par des étudiantes et des «écrivains de renom» sous pseudonyme – ont remporté un franc succès: 36.000 exemplaires vendus en deux mois. Chaque année, Adoras comptera quinze nouveaux titres. Et les NEI cherchent à élargir leurs horizons avec des romances au Sénégal, au Cameroun... Pour Mme Boguifo, ces livres sont aussi «une bonne manière de voyager, de découvrir l’Afrique» et d’accéder, plus tard, «aux grandes œuvres littéraires».
Les vieux manoirs anglais ou les palaces de Monaco n’ont plus le monopole des belles histoires d’amour: les Nouvelles éditions ivoiriennes (NEI) viennent de lancer «Adoras», une nouvelle collection de «littérature sentimentale entièrement africaine». «Nous nous sommes rendus compte que les lectrices dévoraient les histoires sentimentales. Mais les personnages y ont des comportements...