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Actualités - CHRONOLOGIE

Pour Chirac, un choix délibérement stratégique

PARIS, de Elie MASBOUNGI
Il y a décidément quelque chose de libanais dans cette furtive campagne électorale française.
A n’en plus reconnaître le pays de Descartes.
En deux tours et trois retournements, la France est passée du confort de la majorité présidentielle aux cahotements de l’alternance partisane.
La surprenante dissolution de l’Assemblée, la stupéfiante démission du premier ministre et l’incompréhensible argumentation d’un changement prôné de tous côtés ont quelque peu dérouté l’homme de la rue.
On pensait qu’après le premier tour, la majorité sortante et l’opposition aspirante affineraient leurs discours et clarifieraient leurs propos. Mais force est de constater qu’à la veille d’un scrutin historique qui doit le conduire au troisième millénaire, le Français ne comprend pas encore vraiment ce qui se passe.
Et surtout pourquoi cela se passe ainsi.
La droite propose un changement dans une continuité plutôt décevante et la gauche un renouveau basé sur une expérience peu convaincante. Entre les deux, le Front national joue, selon l’humeur, l’arbitre ou le justicier. Au total: une polémique stérile, un débat creux et une discussion sans arguments, faits de généralités et de lieux communs.
Avec tout juste la peur du communiste brandie par les uns et les valeurs gaulliennes martelées par les autres.
Les sondages distribués depuis dimanche dernier sous le manteau (du fait de l’interdiction à une semaine du scrutin) laissent entrevoir une prédominance de la gauche et privilégient déjà la cohabitation.
On voit mal comment l’alliance RPR-UDF, confrontée en plus à un Front national qui monte à vue d’œil, tiendrait demain devant la coalition PS-PC-Verts.
D’autant que les ballottages et les triangulaires sont plutôt favorables aux candidats de gauche, que les reports de voix ne seraient pas — du moins selon les derniers sondages — en faveur de la droite.
Objectivement, le tandem RPR-UDF ne peut surmonter son handicap que par une alliance avec le F.N. qui contrebalancerait l’entente PS-PC. Mais qui oserait le faire aujourd’hui?
Comment en est-on arrivé là si vite?
Pourquoi s’imposer une si dure épreuve et risquer l’échec alors que le président de la République avait toutes les majorités requises pour gouverner; même «autrement» pour reprendre le slogan à la mode.
D’aucuns pensent qu’il s’agit moins d’une erreur tactique que d’une décision stratégique de M. Chirac pour provoquer la cohabitation et faire assumer à l’opposition sa pleine responsabilité face aux défis des deux prochaines années.
Pas si bête quand on pense que M. Juppé, déjà usé jusqu’à la corde, représentait à terme un risque d’effondrement de tout l’édifice.
Le rideau est donc pratiquement tombé sur la campagne des législatives. Par des grands rassemblements hautement symboliques. La droite à Paris, la gauche à Lille.
Veillée d’armes dans les états-majors et poursuite de la discussion dans les cafés et salons.
Discussions sans véhémence sur l’opportunité de la dissolution, l’anxiété de la construction européenne, le passage à la monnaie unique, le chômage galopant, les risques de la cohabitation, l’insécurité et la fracture sociale.
A défaut de grandes idées, on évoque les petites phrases de cette drôle de campagne. Mais les boutades des uns et les coups de griffe des autres ne mobilisent pas les volontés. Elles permettent tout juste de rompre la morosité ambiante.
PARIS, de Elie MASBOUNGIIl y a décidément quelque chose de libanais dans cette furtive campagne électorale française.A n’en plus reconnaître le pays de Descartes.En deux tours et trois retournements, la France est passée du confort de la majorité présidentielle aux cahotements de l’alternance partisane.La surprenante dissolution de l’Assemblée, la stupéfiante démission du premier...