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Actualités - REPORTAGE

Les collectionneurs Michel Eddé : les monnaies anciennes, un réflet, une passion d'histoire... (photos)

Le ministre Michel Eddé est, on le sait, féru d’histoire. Une passion qui l’a mené à la numismatique. Aujourd’hui, sa collection de monnaies anciennes compte quelque 600 pièces choisies, dont plusieurs uniques ou n’existant qu’à de rarissimes exemplaires, trois ou cinq au maximum. Collectionneur éclairé, il aime faire partager ses joies en la matière...
C’est un esthète d’une curiosité toujours en éveil. Lorsqu’un objet lui plaît, M. Eddé s’informe, étudie à fond le sujet. Chacune de ses collections — aussi multiples que ses centres d’intérêt — s’accompagne d’une série d’ouvrages spécialisés. Amasser les connaissances sur un objet donné, avant d’en réunir une série, est le cheminement idéal du collectionneur. Que le ministre d’Etat définit comme «un amateur d’art et de beauté, un esprit curieux et cultivé».
Michel Eddé possède donc plusieurs collections. Il commence il y a une quarantaine d’années par collectionner les tapis caucasiens. Quelque temps plus tard il passe aux monnaies anciennes et par la suite aux manuscrits arabes, à l’argenterie ottomane, aux Netsukés (boutons sculptés des tuniques de samouraï).
Mais la collection de monnaies anciennes reste sa préférée. Un attachement dû en partie au fait quelle a échappé presque miraculeusement au pillage de son bureau à Kantari au début de la guerre. «C’était en novembre 75», se souvient-il. Les pillards avaient tout cassé sauf le coffre-fort, qu’ils n’avaient pu défoncer et où je gardais ma série de monnaies. Durant une accalmie, j’ai pu faire sortir ma collection que j’ai directement acheminée à travers la Békaa et Damas vers Paris et Genève où elle se trouve depuis en sécurité, au fond des coffres de banques».

Une séparation de plus de 21 ans ponctuée cependant de nombreuses visites. «A chacun de mes passages dans ces deux villes je passe des journées à réexaminer les pièces, à les étudier et j’y découvre chaque fois une particularité, un détail nouveau. J’en apprends à chaque fois un peu plus sur la période historique à laquelle elles se rattachent».

C’est par les monnaies islamiques que le numismate a commencé sa collection avant de passer aux byzantines, aux romaines et enfin aux grecques dans lesquelles il s’est spécialisé. «Les monnaies islamiques ne comportent pas d’effigies et offrent un intérêt purement historique. Elles sont frappées de calligraphies de versets coraniques et sont indicatives principalement des périodes suivantes: ommayade de Syrie, ommayade d’Andalousie, arabe d’Afrique (Maroc), mourabitoun et mouahidoune, abbasside, fatimide, etc... Les romaines représentent des effigies d’empereurs et d’impératrices. Les byzantines, quant à elles, représentent des portraits médiocrement stylisés d’empereurs et d’impératrices. Par contre les monnaies grecques sont particulièrement intéressantes tant du point de vue artistique qu’historique ou géographique» explique Michel Edde. «Leur examen attentif ne nous donne pas uniquement une série d’effigies diverses mais aussi une vision du caractère, des ambitions qui motivaient chaque roi et chaque reine. D’autre part», poursuit-il, «les monnaies helléniques ne se limitent pas aux effigies, elles représentent aussi des animaux: lion, cheval, aigle, tortue, etc... et elles représentent également des objets: boucliers, lyres, urnes, etc...

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En collectionneur averti, Michel Eddé a longtemps couru les colloques, les congrès, les ventes publiques de monnaies anciennes à la recherche «de la pièce rare, la mieux conservée, la mieux frappée ou celle qui présente un intérêt artistique majeur. Acheter dans les ventes internationales», explique-t-il, «présente une certaine garantie contre les faux qui, malheureusement, ne se comptent plus. On connaît ainsi l’historique de chaque pièce, éventuellement les noms de ses détenteurs successifs et les détails des ventes publiques au cours desquelles elles ont été acquises». Aujourd’hui s’il a cessé d’acquérir, — «les belles monnaies sont hors de prix alors qu’auparavant on en trouvait à des prix abordables» — il continue néanmoins à recevoir les publications et les catalogues de ventes qui ont lieu de par le monde. «Cela me permet de me tenir informé, de rester au courant des découvertes qui se font. D’autant que dans ce domaine la valeur de la pièce rare qu’on possède chute dès qu’on en découvre de similaires dans une fouille».

Contrairement à l’Empire romain qui battait seule monnaie, chaque cité grecque battait sa propre monnaie. «On distingue les pièces des cités grecques proprement dites, des pièces dites héllénistiques qui englobent celles des régions de la Grèce continentale (Turquie), les Seleucides (Syrie), les Ptolémaïques (Egyptes), et les pièces de Bactriane (Afghanistan)». Il y a aussi les pièces siculopuniques (carthaginoises) et celles de la Sicile et du sud de la péninsule italienne, toutes d’influence grecque, ainsi que les pièces des îles grecques etc…

La majorité des monnaies de la collection Eddé est en argent. Il possède néanmoins plusieurs pièces en electrum (alliage naturel d’or et d’argent), de nombreuses en or et quelques unes en bronze. Toutefois, la nature du métal n’a rien à voir avec la valeur de la pièce. «Certaines pièces en or valent 100 dollars alors que d’autres en bronze ou en argent sont estimées en dizaines de milliers de dollars». Quant au classement, il se fait suivant les normes suivantes: «fleur de coin», c’est-à-dire celles qui n’ont pas circulé; «superbe»; «presque superbe»; «très très beau»; «très beau»; «beau» etc…

C’est donc la rareté et l’état de conservation qui donnent en particulier à une monnaie ancienne sa valeur. «Sans oublier les pièces de grande beauté frappées par des graveurs célèbres tels Kimon, Evainetos ou Eucleidas par exemple».

Dans le large éventail de monnayage qu’il nous présente sur album, M. Edde montre une certaine prédilection pour une pièce de Didon (Carthage), une autre de Bucephale, le cheval d’Alexandre, ainsi que de «Timarchos (pièce unique) un usurpateur», d’Achaïos un autre usurpateur, (existant seulement en exemplaires), de «Cléopatre-Théa», qui a régné avec trois rois successivement et n’existant également qu’en trois exemplaires, d’Amphipolis représentant Apollon, rarissime etc...
Enfin, le regard émerveillé, comme s’il revenait d’un voyage dans le temps, le ministre Eddé conclut ses propos en soulignant que dans sa collection, il n’a jamais cherché «à amasser un grand nombre mais à réunir des pièces rares et de qualité». Des pièces de collection... en somme.

Zéna ZALZAL
Le ministre Michel Eddé est, on le sait, féru d’histoire. Une passion qui l’a mené à la numismatique. Aujourd’hui, sa collection de monnaies anciennes compte quelque 600 pièces choisies, dont plusieurs uniques ou n’existant qu’à de rarissimes exemplaires, trois ou cinq au maximum. Collectionneur éclairé, il aime faire partager ses joies en la matière...C’est un esthète...