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Liban - Analyse

Deux stratégies différentes pour un même objectif : convaincre les électeurs

À mesure que l'échéance électorale approche, les campagnes médiatiques deviennent de plus en plus féroces. Si, à cinq mois de la tenue du scrutin, les deux parties ont sorti leur artillerie verbale lourde, que laisseront-elles pour les semaines à venir ? De plus en plus de citoyens en viennent d'ailleurs à craindre la prochaine période et à souhaiter que les élections se tiennent au plus tôt pour qu'on en finisse. S'ils en avaient les moyens, ils s'accorderaient même de longues vacances plutôt que de subir ce torrent d'insultes et d'accusations, destiné en principe à mobiliser la population et les électeurs en particulier.
Apparemment, les deux camps adoptent des stratégies totalement différentes. Le sénateur français, envoyé spécial du président Sarkozy, Philippe Marini l'avait d'ailleurs précisé dans une conversation à bâtons rompus avec les journalistes : un camp insiste sur le fait que cette échéance est cruciale, et chaque voix compte, et l'autre estime que tout en étant importante, elle ne modifiera pas la structure du pays. Mais là aussi naturellement, chaque voix compte. M. Marini a évité de dire quelle théorie lui avait paru plus convaincante, mais sur le terrain, les deux approches se précisent un peu plus chaque jour.
Pour le 14 Mars, la situation est clairement gravissime et les propos du chef du PSP Walid Joumblatt, jeudi soir dans son entretien télévisé avec la LBCI, ont donné le ton. L'enjeu serait donc le suivant : si l'actuelle opposition parlementaire l'emporte, ce serait un retour « au régime sécuritaire libano-syrien » tant honni et la fin des acquis de la « révolution du Cèdre ». Sans oublier l'insécurité et la possibilité d'attentats visant des personnalités du 14 Mars qui refont surface dans les discours des personnalités appartenant à ce camp. Si Walid Joumblatt ménage plus ou moins le Hezbollah en raison du dialogue renoué avec cette formation sous l'égide de l'émir Talal Arslane, les personnalités chrétiennes du 14 Mars, elles, s'en prennent régulièrement à son arsenal. Elles placent les électeurs devant le choix suivant : soit ils votent pour l'opposition actuelle et se retrouvent avec des armes incontrôlables et une possible réédition du 7 mai 2008, tout en abandonnant leur rêve d'un État institutionnalisé digne de ce nom, soit ils élisent les candidats du 14 Mars. Mais depuis l'éclatement de la crise des écoutes téléphoniques, la campagne menée par le 14 Mars a revêtu un aspect plus dramatique, avec la menace d'un retour de l'influence du régime syrien, les attaques contre l'armée et son chef, à travers la prétendue couverture qu'ils accordent à certains officiers jugés affiliés « au régime sécuritaire ». Le ton de la campagne monte ainsi dans les notes graves et existentielles pour assurer une plus grande mobilisation. Enfin, dans leurs propos, les piliers du 14 Mars cherchent toujours à ménager le président de la Chambre dans une tentative de semer le doute chez les partenaires de l'opposition.
D'ailleurs, la même tactique est utilisée au sein de l'opposition, qui met, dans sa campagne, l'accent sur des divergences entre les piliers du 14 Mars. Tantôt c'est Joumblatt qui refuserait de s'allier aux FL ou aux Kataëb, tantôt ce sont ces deux formations qui seraient doublées par des candidats du 14 Mars souhaitant prendre leurs distances avec elles. Chez l'opposition, la campagne n'est donc pas moins violente, même si elle donne moins l'impression que la bataille est cruciale. L'opposition prend ainsi le contre-pied du 14 Mars et se veut rassurante : « Au mieux, nous gagnons, au pire, la situation actuelle se poursuivra », laisse-t-elle entendre. Sa campagne est essentiellement axée sur la corruption, et le message adressé aux électeurs est clair : pour lutter contre la corruption et tenter d'édifier un véritable État de droit, c'est leurs candidats qu'il faut choisir, sans oublier la politique générale de dialogue avec « les ennemis d'hier », localement et régionalement, avec un refus de « diaboliser » l'Iran, la Syrie et bien sûr le Hezbollah. Si le programme électoral du 14 Mars est encore un peu sommaire, mettant surtout l'accent sur la volonté de préserver les acquis de ces trois dernières années, sur le plan de la souveraineté et de l'indépendance du pays, celui de l'opposition entre plus dans les détails en développant les points figurant dans le document d'entente avec le Hezbollah, notamment au sujet d'une justice indépendante, d'un développement équilibré... Le message se résumerait ainsi : « Si vous voulez un véritable pays et que vos enfants y aient un avenir, c'est pour les candidats de l'opposition que vous devez voter. »
Les deux camps cherchent donc à convaincre les électeurs par tous les moyens.
Mais en dépit de leurs efforts, c'est peut-être la violence verbale que retiendront les Libanais ordinaires, qui constituent, selon la plupart des sondages, une partie non négligeable des électeurs. Dans un tel climat, où les invectives remplacent les véritables propositions, ils pourraient bien en définitive choisir de ne pas voter... D'autant que la campagne ne fait que commencer.
À mesure que l'échéance électorale approche, les campagnes médiatiques deviennent de plus en plus féroces. Si, à cinq mois de la tenue du scrutin, les deux parties ont sorti leur artillerie verbale lourde, que laisseront-elles pour les semaines à venir ? De plus en plus de citoyens en viennent d'ailleurs à craindre la prochaine...
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