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Diaspora

L’île de La Réunion : un petit bout de terre, où les Libanais sont venus enrichir la diversité culturelle

Dès la fin du XVIIe siècle, les Libanais ont commencé à émigrer à partir du Liban et de l’Égypte vers la France, et de là certains ont poursuivi leur chemin vers d’autres rives, dont les départements français d’outre-mer.
Une des directions prises par les Libanais a été l’île de La Réunion, à douze heures de Paris en avion. Un petit bout de terre faisant partie de l’archipel des Mascareignes et comprenant les îles Maurice et Rodrigues, proches de l’île de Madagascar, en Afrique. La Réunion est une des perles de l’océan Indien, avec une superficie de 2 512 kilomètres carrés, soit le quart du Liban, une population de 760 000 habitants, avec pour capitale Saint-Denis. Elle fait partie des départements français d’outre-mer (DOM) depuis 1946, ainsi que des régions ultrapériphériques de l’Union européenne (RUP) depuis 1997. C’est une île paradisiaque avec ses paysages montagneux, ses criques et ses plages, où le tourisme constitue la plus grande ressource économique. C’est aussi la patrie de Roland Garros (1888-1918), né à Saint-Denis, aviateur français, pionnier de l’aviation, qui a donné son nom au fameux championnat de tennis de Paris, le tournoi de Roland-Garros.
L’île de La Réunion a été découverte en l’an 1528 par les navigateurs portugais, partis sur la route des Indes en contournant l’Afrique. Les Phéniciens l’auraient abordée lors de leur périple autour du continent africain, à la demande du pharaon d’Égypte, Nachao II, vers l’an 600 avant J-C. Ce que firent également les navigateurs arabes parcourant les routes commerciales maritimes en Afrique aux Ve et Xe siècles. D’ailleurs, une carte datant de l’an 1153, dressée par le géographe arabe al-Charif el-Edrissi, indique les trois îles de l’archipel : Dina Arobi (île Maurice), Dina Margabin (île de La Réunion) et Dina Moraze (île Rodrigues). Les Français ont débarqué dans l’île et en ont pris possession en 1642, après le passage des Portugais, qui n’avaient pas exploré l’île. Son nom, « île de La Réunion », lui a été donné en 1793 par les Français.
La population réunionnaise est une des plus métissées du monde. On trouve des personnes originaires d’Afrique de l’Ouest et de l’Est, de Chine, des Indes, de Madagascar, des Comores, de Mayotte et de Maurice, entraînant une grande diversité de cultures, religions et langues (le créole, le français, le tamoul, le chinois…). Parmi les communautés, citons les « zarabes », qui sont des Indiens musulmans, ainsi que des Libanais de toutes confessions, qui se sont installés en grande partie dans l’île dans les années 1970. Il s’agit en général de couples de Libano-Réunionnais qui se sont rencontrés durant leurs études en métropole. Parmi les 100 à 120 familles, citons les Adhamy, Adra, Badr, Bassoul, Bitar, Chamoun, Choucair, Dib, Grigorian, Habis, Hilal, Kanaan, Roussel, Saad, Salamé, Srour, Yazbeck...
Cette présence libanaise, même limitée, marque l’île de façon significative, comme le précise le cinéaste libano-réunionnais Nabil Salamé. « La communauté libanaise de La Réunion est formée pour la plupart de retraités, comme le doyen Abdoulhamid Adhamy, cardiologue originaire de Tripoli, le professeur et écrivain Michel Saad, de Douair, Nadim Adra, également de Tripoli, et Youssef  Choucair, neurochirurgien originaire du Liban-Sud, et toujours en activité, qui fait partie des plus anciens, explique-t-il. Des couples de Libanais métropolitains, généralement des fonctionnaires mutés dans l’île ou des médecins venus pour une courte période de remplacement, tombent sous le charme de l’île en pleine prospérité et y jettent l’ancre. On trouve aussi quelques familles libano-africaines, des Libanais nés en Afrique de la troisième génération, avec un pourcentage important de Sudistes. » M. Salamé ajoute : « Contrairement aux émigrés des autres pays, les Libanais de La Réunion exercent plutôt des professions libérales et ne sont pas dans le commerce, car le secteur commercial, terrain favori des Libanais, est tenu ici par les “Zarabes” locaux et par les Chinois. Nous sommes une communauté relativement discrète, efficace, avec plus de 90 % de réussite, aussi bien dans les domaines social que professionnel et financier. »
Nabil Salamé, originaire de Kfardebian, venu de Tripoli, réside à La Réunion depuis 1985. Il est marié à une Réunionnaise, Marie Josée, et père de deux enfants, Thomas et Emmanuelle. Il a fondé la Maison du Liban en 1990 à Saint-André. La Maison du Liban sert de pierre angulaire à l’ensemble des événements à caractère libanais. Elle est très connue et occupe une place importante dans la société réunionnaise. C’est elle qui organise, depuis sa fondation, une « Semaine libanaise » annuelle, ainsi qu’une soirée libanaise tous les derniers samedis du mois, sans compter de multiples autres activités culturelles : visite de l’écrivain Amin Maalouf en 1994, rencontre avec le père Mansour Labaki en 2001, qui avait été invité à un café littéraire, semaine artistique et culinaire, en présence de onze artistes et deux chefs cuisiniers en 2004…
En 2006, durant la guerre israélienne de juillet-août sur le Liban, la Maison du Liban a lancé un appel aux Réunionnais afin qu’ils se solidarisent avec les victimes libanaises. Elle a ainsi récolté des médicaments et autres donations. Au lendemain du retour au calme, le 15 août, trois journées d’exposition de photographies ont été organisées dans le théâtre le plus prestigieux de l’île, Champ fleuri. Ces photographies avaient été prises sur le vif par Nazih Hilal, cardiologue franco-libanais habitant à La Réunion, qui se trouvait au Liban au plus fort des bombardements. Le dernier jour, un concert a été donné par la chanteuse française Raya Hilal, de père libanais et de mère brésilienne, qui a chanté a cappella devant 900 personnes la chanson-hymne Li Beyrouth, de Feyrouz.
Le Liban, mosaïque de contacts et de cultures, garde d’importantes relations humaines avec La Réunion, à travers des Réunionnais-Libanais. Citons la famille Gay-Para à Byblos. Marie Josée et ses trois enfants sont fiers de leur beau jardin près du port où ils ont pu recréer une ambiance réunionnaise. Ainsi, ce sont tous les peuples du monde qui, malgré les épreuves, font vivre le Liban.

Prochain article : portrait de l’écrivain libano-réunionnais Michel Saad
Dès la fin du XVIIe siècle, les Libanais ont commencé à émigrer à partir du Liban et de l’Égypte vers la France, et de là certains ont poursuivi leur chemin vers d’autres rives, dont les départements français d’outre-mer. Une des directions prises par les Libanais a été...