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Lifestyle - Disparition

« Elle se savait vaincue » : Émilie Dequenne, le courage chevillé au corps

L’actrice belge est décédée à 43 ans des suites d’un cancer rare et agressif. Le monde du cinéma francophone, en deuil depuis dimanche soir, pleure l’une de ses étoiles.

« Elle se savait vaincue » : Émilie Dequenne, le courage chevillé au corps

Émilie Dequenne en mai 2024, peu avant sa montée des marches à Cannes. Photo AFP

Le Festival de Cannes perd l’un de ses enfants chéris. Le 14 mai dernier, à l’ouverture de la 77e édition, elle réapparaît par surprise, sourire aux lèvres, joues colorées et cheveux courts en pleine repousse sur un tapis rouge bondé. Face à un parterre de journalistes émus de la retrouver, elle confesse son envie « de faire part de sa rémission », de monter ces marches la menant vers le Palais qui a accueilli ses bonheurs et doutes comme sa filmographie, éclectique, trop souvent ignorée.

Sur le plateau délocalisé de C à vous, elle exprime ensuite sa joie de revenir sous les feux des projecteurs salvateurs. « C’est symbolique d’être capable de se déplacer jusqu'ici », lance-t-elle les yeux mouillés, 25 ans exactement après avoir reçu le prix d’interprétation féminine pour Rosetta. Car sur la Croisette, Émilie Dequenne est bien plus que l’actrice abonnée aux seconds rôles. Pour les cinéphiles et les organisateurs, elle est avant tout l’adolescente effrontée de 17 ans en quête de mieux et de beau, imaginée par les frères Dardenne.

Venue présenter son dernier long-métrage au titre métaphorique, Survivre, l’artiste fond en larmes en revoyant les images de son discours de remerciements et de la réception de son prix des mains de Johnny Hallyday. « C’est con, je l’ai vu plein de fois… C’est juste qu’il s’est passé vingt-cinq ans, ça a été un choc pour ma famille et ce qui se passe vingt-cinq ans plus tard en a été un autre », confesse-t-elle en direct sur France 5 en évoquant son cancer agressif dont elle espère alors définitivement guérir. « Sauf que cette fois, ça se passe dans l’autre sens ».

Comédienne caméléon

En octobre 2023, c’est en toute transparence qu’Émilie Dequenne révèle être atteinte d’une tumeur rare impactant le système endocrinien. Diagnostiquée deux mois auparavant, celle qui se tient alors éloignée des studios de cinéma choisit de partager publiquement, avec pudeur et sans gravité, un combat intime qu’elle souhaite rendre utile. « Ce n’est pas une maladie honteuse, je ressens en moi le besoin de faire savoir aux personnes malades qu’elles ne sont pas seules », dit-elle au micro de France Inter.

Émilie Dequenne et les frères Dardenne en 1999, à Cannes. Photo AFP

Forte d’une capacité de jeu intrigante et d’une notoriété parfois titubante, la native de Belœil, en Belgique, est apparue pas moins de cinquante fois sur grand écran, sous le regard de Claude Berri (dans Une femme de ménage en 2002), l’humanisme d’André Téchiné (dans La fille du RER en 2009) ou la gouaille d’Albert Dupontel (dans Au-revoir là-haut en 2017). Discrète, émotive, artistiquement versatile, elle reçoit l’unique César de sa carrière - dans la catégorie du meilleur second rôle féminin - en 2021 pour Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait d’Emmanuel Mouret, près d’une décennie après avoir de nouveau été primée à Cannes dans la section « Un certain regard » pour À perdre la raison.

« J’ai eu une éducation ouvrière, je viens d’un milieu modeste », répétait sans cesse la « chouchoute » de Niels Arestrup. Les rôles de bourgeoises la mettait mal à l’aise, les grandes tirades alambiquées tout autant. « Sauf que quand on choisit de faire ce métier, on ne refuse pas tout, on ne fait pas sa diva comme avant », indiquait-elle en référence à un milieu devenu, avec l’ouverture du troisième millénaire, de plus en plus complexe et sévère, exigeant et intransigeant.

Pluies de larmes

Alors qu’elle se pensait presque sortie d’affaire, Émilie Dequenne, toujours avec la même délicatesse que lui loue ses réalisateurs fétiches et acteurs porte-bonheur, confie à Audrey Crespo-Mara, journaliste de Sept à Huit sur TF1, avoir repris les armes, sans grand espoir cette fois. « Je ne vivrais pas aussi longtemps que prévu », signale la célèbre brune qui voit ses bouclettes à peine repousser. La rechute après la rémission aura finalement raison de l’actrice de 43 ans, décédée le 16 mars après avoir passé plusieurs jours en soins palliatifs à l’hôpital Gustave Roussy à Villejuif.

Émilie Dequenne en 2022, toujours sur la Croisette. Photo AFP

Le monde du 7e art, sous le choc de l’annonce pourtant inévitable - qui est tombée en toute fin de soirée dimanche après qu’un communiqué de la famille a été transmis à l’AFP -, a rapidement réagi pour saluer la mémoire de l’une de ses étoiles. « Grande dame, grande âme, grande actrice. Une reine », a publié Leïla Bekhti sur ses réseaux sociaux entre les hommages d’Alexandra Lamy, de Sandrine Kiberlain et de Tahar Rahim, entre autres. « On sentait chez elle la douceur intrépide de ceux qui savent leur jours comptés », écrit quant à lui Gilles Jacob, ancien président du festival de Cannes. « Elle se savait vaincue, elle l’avait dit avec sa belle dignité et son courage bouleversant. Nous la pleurons », ajoute enfin Pierre Lescure, son successeur...

Dans Pas son genre de Lucas Belvaux (sortie en 2014), Émilie Dequenne monte sur la scène d’une boîte de nuit aux néons roses pour reprendre, l’air déterminé et concentré, I Will Survivre de Gloria Gaynor. Cette scène, elle l’évoque timidement au cours d’une conférence de presse étriquée au moment de la sortie du film en salles. « Je ne chante pas si bien, je ne suis pas à l’aise tout le temps, je ne sais même pas si c’est une bonne performance », lâche-t-elle sans sourciller. « Mais si on ne crie pas pour signaler à l'univers qu’on veut vivre, à quoi bon ? »

Le Festival de Cannes perd l’un de ses enfants chéris. Le 14 mai dernier, à l’ouverture de la 77e édition, elle réapparaît par surprise, sourire aux lèvres, joues colorées et cheveux courts en pleine repousse sur un tapis rouge bondé. Face à un parterre de journalistes émus de la retrouver, elle confesse son envie « de faire part de sa rémission », de monter ces marches la menant vers le Palais qui a accueilli ses bonheurs et doutes comme sa filmographie, éclectique, trop souvent ignorée.Sur le plateau délocalisé de C à vous, elle exprime ensuite sa joie de revenir sous les feux des projecteurs salvateurs. « C’est symbolique d’être capable de se déplacer jusqu'ici », lance-t-elle les yeux mouillés, 25 ans exactement après avoir reçu le prix d’interprétation féminine pour Rosetta. Car sur la Croisette,...
commentaires (3)

Qu’elle repose en paix… c’est triste en effet…

LE FRANCOPHONE

20 h 45, le 17 mars 2025

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Commentaires (3)

  • Qu’elle repose en paix… c’est triste en effet…

    LE FRANCOPHONE

    20 h 45, le 17 mars 2025

  • triste...trop triste...

    Marie Claude

    13 h 27, le 17 mars 2025

  • A pleurer de rage....quand on voit le reste criminel qui vit ...

    Marie Claude

    13 h 27, le 17 mars 2025

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