
Le président français Emmanuel Macron durant sa déambulation dans le quartier de Gemmayzé, à Beyrouth, le 17 janvier 2025. Ludovic Marin/AFP
Cela faisait plus de quatre ans qu’il ne s’était pas rendu au Liban, et les circonstances sont pour le moins différentes. Vendredi 17 janvier 2025, le président français Emmanuel Macron était en visite à Beyrouth pour la troisième fois depuis le début de son premier mandat en 2017, après ses venues du 6 août et du 1er septembre 2020. À l’époque, la capitale libanaise se relevait à peine de la double explosion au port de Beyrouth du 4 août 2020, qui avait fait quelque 235 morts et 6 500 blessés. Emmanuel Macron était alors le premier chef d'État à se rendre au Liban.
Quatre ans plus tard, le pays sort d’une guerre de 13 mois engagée entre le Hezbollah et Israël qui a fait plus de 4 000 morts et près de 17 000 blessés. Mais le Liban est aussi doté, depuis le 9 janvier, d’un président de la République en la personne de Joseph Aoun, commandant en chef de l'armée, après deux ans de vacance à ce poste. S'il a rencontré le nouveau président au palais de Baabda, Emmanuel Macron ne s'est en revanche pas rendu dans les quartiers beyrouthins récemment touchés par les frappes israéliennes, préférant reprendre une déambulation dans le quartier de Gemmayzé, touché par l’explosion du 4-Août et désormais reconstruit, qu'il avait entamée le 6 août 2020.
Au programme : un bain de foule, millimétré par ses services, qui comprenait la rencontre de plusieurs ONG sur son chemin ou encore de membres de la Croix-Rouge libanaise.
« C’est un symbole »
« C’est si important qu’il soit ici pour nous » dit Elsy, la cinquantaine. Téléphone vissé à la main pour filmer la scène, cela fait déjà un petit moment que la Libanaise suit la foule qui gravite autour du président français, davantage composée de ses équipes et des journalistes que des habitants du quartier. « Personne n’a fait autant que lui », estime-t-elle, considérant que la présence d’Emmanuel Macron au Liban est un véritable « soutien moral pour les Libanais », notamment car « personne n’est venu nous aider » lorsque le pays pouvait en avoir besoin. Alors que des résidents applaudissent aux balcons, Elsy parle de la situation actuelle du pays comme d’une nouvelle ère, presque d’une renaissance, la France ayant selon elle grandement contribué à ce que celle-ci ait lieu.
À quelques pas de là, Maroun se veut également optimiste. Pour lui, les politiciens libanais « n’ont jamais réussi à maintenir de bonnes relations » avec d’autres pays. Que le président français soit là montre qu’une « coopération est toujours possible » et que le Liban peut compter sur la France, peu importe les circonstances. « C’est un symbole, cela veut dire qu’on ne nous a pas oubliés. » Même si le trentenaire l’admet, depuis sa venue en 2020, rien n’est comparable : « Tout a changé. »
« Il est ici pour la défense des intérêts français »
Toujours cerné par sa sécurité et ses équipes au téléphone, le président français se ravitaille au restaurant Le Chef à coup de fatayer aux épinards, alors que son gérant scande un « Vive la France » les bras en l’air. Un membre du cabinet présidentiel saisit l’instant et attrape une vieille dame par la main pour l’approcher d’Emmanuel Macron : la séquence sera reprise en boucle sur les réseaux sociaux. De part et d’autre de la rue, des Libanais regardent la scène, l'air peu emballé par l'agitation que celle-ci suscite.
Christian, qui fume sa cigarette en terrasse, est imperturbable. La venue du président français ne lui fait ni chaud ni froid. « J’ai déjà vu ce que ça a donné en 2020. On pensait qu’il était là pour nous aider, il a juste adoubé notre gouvernement corrompu », lance-t-il. Évoquant le suivi de l’enquête du 4-Août, puis la question des transports ou encore la stratégie française de dialoguer avec le Hezbollah, le quinquagénaire dénonce une politique menée « pour la défense des intérêts français et de ses copains ultra-riches ». Si, selon lui, la France se place désormais après les États-Unis et l’Arabie saoudite en termes d’importance désormais au Liban, Christian espère néanmoins « qu’elle aura toujours un rôle ». Puis de conclure : « Mais la France n’a plus de pouvoir ici. »
Ce Christian est la caricature pafaite de ces hommes attablés à la terrasse des cafés, cigarette à la bouche et portant des jugements définitifs. Il ne sait probablement pas que Macron et Le Drian se sont beaucoup investi pour la paix au Liban. Aux côtés, entre autres, de l'Arabie Saoudite.
18 h 50, le 18 janvier 2025