
Manifestation à Manara, Beyrouth, en solidarité avec Gaza en 2024. Mohammad Yassine/L’Orient-Le Jour
Au lendemain de l’annonce mercredi soir du cessez-le-feu entre le Hamas et Israël à Gaza, qui devrait entrer en vigueur ce dimanche, L’Orient Today a parcouru les rues de plusieurs quartiers de Beyrouth et interrogé des habitants à travers le Liban pour recueillir leurs réactions.
Dans la rue Hamra, artère principale du quartier beyrouthin éponyme, de nombreuses personnes sont apparues portant des keffiehs. « Gloire à la résistance, et que cela marque la fin de l’occupation (israélienne) telle que nous la connaissons », s’est exclamé Yassine Abdel-Hadi, étudiant en mathématiques à l’Université américaine de Beyrouth (AUB).
Pour Ibrahim Mohammad, le cessez-le-feu suscite des émotions mitigées : « Les jours à venir seront très difficiles pour les Gazaouis qui ont perdu des êtres chers. Je le sais, car le lendemain du cessez-le-feu au Liban (entre le Hezbollah et Israël, le 27 novembre 2024), j’ai réalisé que j’avais perdu mon frère et ma nièce de cinq ans lors d’une frappe à Deir Seryan (Marjeyoun) fin septembre. »
À Mrayjé, dans la banlieue sud de Beyrouth presque déserte en raison des lourds dégâts subis pendant la guerre, Nidal Riad, professeure de physique, achète des légumes à un commerçant ambulant en bord de route. « Le prix de la victoire à Gaza a été élevé. Nous avons perdu le sayyed (Hassan Nasrallah, ancien chef du Hezbollah), mais c’est ce que Dieu a voulu. Je suis heureuse que nous ayons défendu la vérité. »
Le Hezbollah avait ouvert un « front de soutien à Gaza » depuis le sud du Liban le 8 octobre 2023, au lendemain du déclenchement de la guerre entre le Hamas et Israël dans l’enclave palestinienne. Le conflit s’est intensifié le 23 septembre 2024, puis le 27 septembre, Israël a assassiné l’ancien chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, dans la banlieue sud de Beyrouth. Selon le ministère de la Santé libanais, au moins 3 768 personnes ont été tuées et 15 699 blessées au Liban depuis octobre 2023.
Mais le commerçant n’est pas d’accord avec sa cliente : « Le prix du soutien à Gaza a été trop élevé pour un pays déjà accablé par des crises et des guerres internes. Que Dieu ait pitié des Gazaouis, mais nous n’aurions jamais dû nous impliquer dans leur guerre. Nous aurions dû rester spectateurs, comme la plupart du monde arabe. »
« Les Palestiniens ont une histoire compliquée au Liban »
Au centre commercial ABC d’Achrafieh, à Beyrouth, Anita Chami, une ancienne directrice d’école à la retraite, sirote un café. « J’ai pleuré de soulagement en entendant la nouvelle », admet-elle la voix tremblante. « J’ai pleuré pour m’endormir tellement de nuits cette année. En tant que Libanais, nous savons trop bien ce que signifie la guerre », poursuit-elle alors que ses yeux s’embuent de nouveau.
Son mari, Paul Abi Rached, abonde dans son sens : « Les Palestiniens ont une histoire compliquée au Liban, mais je suis heureux que la guerre touche à sa fin, au moins pour l’instant. Voir des enfants innocents tués brise quelque chose en vous. » Sortant son téléphone pour montrer une photo de ses petites-filles jumelles de trois ans souriantes, il présente fièrement « Mia et Tia ». « Je ne peux pas imaginer comment quelqu’un pourrait faire du mal à des enfants. Je n’ai même pas le cœur de leur crier dessus quand elles deviennent bruyantes pendant ma sieste sacrée », dit-il en riant.
À Benin, dans la région du Akkar, au Liban-Nord, Dounia Khayyat, propriétaire d’un magasin de maquillage à Tripoli, se dit certes « soulagée » mais « très en colère ». « Pourquoi le Liban a-t-il été entraîné dans cette guerre par le Hezbollah alors que nous n’avons pas la capacité de nous défendre, encore moins de défendre les autres ? Je souhaite le meilleur aux Palestiniens et j’espère que la résistance (Hezbollah) au Liban et en Palestine réfléchira aux conséquences de ses actes avant d’entraîner son peuple dans des guerres. »
Au téléphone, sa sœur nuance toutefois : « Ce n’est pas le moment de jouer au jeu des reproches et de pointer du doigt. Que Dieu ait pitié des combattants palestiniens et libanais, et que les criminels de guerre brûlent en enfer pour l’éternité. »
Enfin, à Doha, au Qatar, Lina Seifeddine, qui a fui Aïta el-Chaab (Bint Jbeil), au Liban-Sud, pour rester avec sa famille à l’étranger alors que la guerre faisait rage, explique ne pas pouvoir « se réjouir » malgré les cessez-le-feu au Liban et en Palestine : « Israël est connu pour violer les cessez-le-feu, alors je ne vais pas me laisser trop emporter. »
Faut il rappeler que les palestiniens et les pays arabes ont perdu 3 guerres contre Israel (4 si on compte cette dernière). Ils ont aussi durant 80 ans échoué dans le soft power pour faire avancer la cause palestinienne. Tous les dictateurs arabes ont exploité la cause palestinienne á leur propres bénéfices (soit dis en passant c'est Assad qui a attaqué l'olp au Liiban et obligé Arafat á quitter). Il est temps d'être realiste plutôt que de vociférer dans les manifestations. Est ce que les palestiniens et les Israéliens sont prêts pour une paix avec deux Etats? Si oui, il faut signer la paix
19 h 45, le 17 janvier 2025