C’est maintenant devenu une habitude. À chaque fois qu’il y a une élection quelque part dans le monde, faut que les médias et instituts de sondage dégainent leur boule de cristal et pondent des prévisions sans appel. Pareil pour la présidentielle aux Youessay : ce sera fifty-fifty, moyen-moyeux, au coude-à-coude dans la marge d’erreur, et chiffres en mode frotti-frotta, disait-on. Et puis, patatras ! Grands commentateurs, analystes pointus et pointilleux tombent du cocotier ! Le Trumpète aux cheveux jaunes qui ne sourit jamais a raflé la mise, opéré le grand chelem et renvoyé dans les cordes une adversaire hilare et inconsistante…
Il fallait entendre au lendemain des résultats ces mêmes experts en cobayes électoraux et spécialistes en sciences divinatoires avancées expliquer avec force circonvolutions pourquoi ils se sont piteusement plantés. À en croire ces oracles médiatiques, qui deux jours auparavant chantaient encore les louanges du modèle américain de démocratie et de liberté, ce sont ces salauds de pauvres qui ont mal voté !
Alors qu’on pensait généralement que le sous-développement politique est l’apanage des radios et télés des pays tapioca du Moyen-Orient, voilà que les Occidentaux sont rattrapés à leur tour par la « bananisation » accélérée de leurs médias : on prend ses désirs pour des réalités, on finit par y croire mordicus, puis on fait la gueule quand la conclusion n’est pas dans l’air du temps. Une gymnastique considérée comme une hérésie dans le monde arabe, où le patron de presse aurait déjà été aligné contre un mur et abattu séance tenante…
Bon, qu’avons-nous dans le panier de la ménagère au pays de la bannière étiolée ? Un vieux birbe déliquescent, indécis jusqu’à ne laisser que quelques semaines à sa remplaçante pour mener campagne, et pouvant à peine marcher, au point qu’on se demande s’il trouvera le chemin de la maison une fois sorti du Bureau ovale. Lui est plutôt du genre « patience et longueur de temps, aimons-nous les uns les autres, et broutons végan pour sauver la planète ». Les galipettes du couple Bill Clinton-Monica Levinski sont bien loin…
À l’autre bout de la bourriche, un bulldozer « imprévisible », comme il se plaît à se qualifier lui-même, sans se douter que l’adjectif est synonyme de « non fiable ». Bref, une sorte d’Orangina américain, mais avec beaucoup plus de capacité de nuisance. On en viendrait à remercier le ciel que le nôtre soit à la retraite.
Entre les deux camps républicain et démocrate, des hordes d’excités partisans, salivant pour l’une ou l’autre chapelle, infoutus de produire en quatre années deux candidats plus jeunes et un tantinet plus comestibles. Ne reste plus qu’à attendre la prochaine présidentielle américaine pour voir éclore les deux prochains neuneus.
Patience les mesquins, quatre ans c’est déjà demain !
gabynasr@lorientlejour.com
Quelle plume acérée! C'est un bonheur à lire.
19 h 04, le 11 novembre 2024