Après un vent d'optimisme qui avait soufflé dans des propos des présidents français et américain concernant une solution « diplomatique » au conflit entre le Hezbollah et Israël, les déclarations au Liban et à l'international ont tour à tour dénoncé et appelé les belligérants au calme, suite à une nouvelle frappe israélienne sur la banlieue-sud de Beyrouth. Cette attaque, qui a fait plus d'une dizaine de morts, a éliminé Ibrahim Akil, haut commandant militaire du parti chiite et chef effectif de l'unité d'élite al-Radwane, selon des sources de sécurité citées par les agences AFP et Reuters, ainsi que par l'armée israélienne.
Le président américain Joe Biden, qui n'avait pas directement commenté cette semaine la situation au Liban, où une série d'opérations avaient fait mardi et mercredi 40 morts après des explosions d'appareils électroniques de communication du Hezbollah, a affirmé « travailler » au retour des populations civiles de part et d'autre de la frontière, déplacées en raison des hostilités entre Israël et le Hezbollah, selon l'AFP. Le président américain, qui s'exprimait avant la frappe de vendredi, a dit vouloir « s'assurer que les populations du nord d'Israël et du sud du Liban puissent rentrer chez elles ». Il a ajouté, lors d'un court échange avec la presse en marge d'une réunion gouvernementale à la Maison Blanche : « Le secrétaire d’État, le secrétaire à la Défense, toutes nos équipes travaillent, avec la communauté du renseignement, pour y arriver ».
De son côté, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby a affirmé « ne pas être au courant de toute notification préalable concernant les frappes israéliennes sur Beyrouth », rapporte l'agence Reuters. « Nous continuons de croire qu'une solution diplomatique est le meilleur moyen d'avancer au Moyen-Orient », a-t-il ajouté.
« Conséquences dévastatrices »
Même son de cloche du côté de la coordinatrice spéciale des Nations unies pour le Liban, Jeanine Hennis-Plasschaert, qui a assuré que, malgré tout, une « issue diplomatique est encore possible ». Elle a toutefois dénoncé dans un communiqué « la frappe de cet après-midi dans une zone densément peuplée de la banlieue-sud de Beyrouth », qui constitue « une nouvelle escalade alarmante ». « Nous assistons à un cycle de violence extrêmement dangereux aux conséquences dévastatrices » qui doit « cesser immédiatement » a-t-elle mis en garde.
Le porte-parole de l’ONU Stéphane Dujarric a, lui, relevé que les Nations unies étaient « extrêmement préoccupées par l’escalade accrue de la violence à travers la Ligne bleue, ainsi que par la frappe meurtrière survenue à Beyrouth ». L’ONU « exhorte » tous les acteurs à une désescalade immédiate. « Tous les acteurs doivent faire preuve de la plus grande retenue, » a-t-il insisté lors d’un point de presse.
Hier soir, dans un message adressé directement aux Libanais, le président français Emmanuel Macron avait assuré qu'un « chemin diplomatique existe » entre les belligérants, tandis que son homologue à Washington avait estimé qu'une résolution diplomatique est « faisable ». La France, à l'instar de nombreux autres pays occidentaux, n'a pas encore commenté la frappe sur la banlieue sud.
« Catastrophe nationale »
Au Liban, et dans la région, la tendance était à la condamnation directe de ce qui est qualifié de « crimes de guerre » israéliens. Le Premier ministre libanais sortant Nagib Mikati a estimé que les frappes israéliennes montrent que l'État hébreu « n'accorde aucune importance aux considérations humanitaires, juridiques ou morales », selon des propos rapportés par Reuters.
Le leader druze Walid Joumblatt, ancien chef du Parti socialiste progressiste, a de son côté évoqué, à l'issue d'une réunion à Aïn el-Tiné avec le président de la Chambre Nabih Berry, la « catastrophe nationale qui frappe le Liban, en raison des attaques israéliennes répétées et continues ». Il a précisé s'être rendu à Aïn el-Tiné pour « présenter (ses) condoléances aux familles des combattants tués ou blessés et exprimer (sa) solidarité avec les familles touchées ». Le mouvement Amal, dirigé par le chef du Législatif, a pour sa part admis être impliqué dans les combats le long de la frontière-sud, soulignant avoir perdu plusieurs combattants depuis le 8 octobre 2023.
« Nous vaincrons sans aucun doute », a écrit sur le réseau X le ministre sortant libanais de l'Agriculture Abbas Hajj Hassan, affilié au mouvement Amal.
Folie et arrogance
L'ambassade d'Iran au Liban a quant à elle condamné sur X « la folie et l'arrogance israéliennes qui ont franchi toutes les lignes, en prenant pour cible des zones résidentielles de la banlieue-sud de Beyrouth, et en faisant des dizaines de martyrs et de blessés, dont des enfants et des femmes ».
Le ministère syrien des Affaires étrangères a condamné les « crimes israéliens continus dans la région » après la frappe sur la banlieue-sud de Beyrouth, ainsi que le « soutien militaire et politique américain aux agressions » israéliennes. Dénonçant le « mépris flagrant d'Israël pour le droit international », Damas a estimé que les dernières opérations israéliennes au Liban et à Gaza « constituent un danger pour la région et au delà ».
Le Hamas a pour sa part publié un communiqué condamnant « l'agression terroriste lancée par les avions de l'ennemi sioniste sur la banlieue-sud de Beyrouth ». Dénonçant une « violation de la souveraineté libanaise et une escalade de l'agression sioniste », le mouvement palestinien a accusé Israël « de crimes de guerre manifestes qui nécessitent une action urgente de la communauté internationale ».
Le Jihad islamique palestinien a condamné de son côté « l'agression sournoise » perpétrée cet après-midi contre la banlieue-sud de Beyrouth, et le fait qu'Israël cherche à « entraîner le Liban dans une guerre ouverte ou à lui imposer des conditions humiliantes, notamment l'arrêt du soutien que le Hezbollah apporte au peuple palestinien ».
Le Hamas et le Jihad islamique ont tous deux mené des frappes contre Israël depuis le Liban-Sud et y ont perdu des combattants.
Enfin, le Conseil politique suprême des rebelles yéménites houthis a exprimé son soutien au Liban et au Hezbollah après la frappe sur Haret Hreik et estimé que cette escalade ne saurait « dissuader le Hezbollah de soutenir les Palestiniens ».