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Nos Lecteurs ont la Parole

Entre désespoir et désespoir : l’avenir des jeunes Libanais

Que reste-t-il pour ces jeunes pour qu’ils se battent pour rester au Liban ? La trahison ? L’humiliation ? L’injustice ? Le rejet ? La guerre ? La misère ?

Personne ne semble écouter la voix de ces innocents qui se trouvent obligés de quitter le cœur doux du Liban, espérant un futur plus prometteur. Mais encore, ce n’est qu’espérer. Un futur meilleur n’est pas garanti. Laisser sa famille pour vivre ailleurs, n’est-ce pas âcre ? Vivre dans un pays avec ce sentiment qui brûle, le sentiment des adieux aux vieilles rues de Beyrouth et aux brises des montagnes, est-ce mieux ?

Cependant, comment pourraient-ils rester ? Pourquoi rester ?

Arrêtons un instant de blâmer nos dirigeants corrompus, avides de pouvoir et aveuglés par leur amour de l’argent, et tournons notre regard vers le peuple qui leur permet de demeurer en ces positions. N’est-ce pas aussi sa faute ? Ne voit-il pas ce qu’il est en train de détruire par propre égoïsme ? Il force la main-d’œuvre de ce pays à partir. C’est d’abord la faute du peuple libanais qui ne se soucie pas des dégâts à venir, mais qui reste planté dans son cynisme et narcissisme. Baptiser le vice comme modernité, encenser la stupidité et idolâtrer les dirigeants, voilà où nous sommes arrivés. Dans cette ère de surconsommation, la vénération de l’argent est si courante qu’on en vient à tout sacrifier pour ce nouvel être suprême. L’école de la vertu ? « Mais ou êtes-vous encore ? » disent-ils souvent.

De nos jours, au lieu d’apprendre les codes comportementaux et les normes sociales, religieuses ou familiales, on enseigne principalement quatre propriétés : l’envie, maquillée en ambition, qui pousse à la comparaison incessante et à la jalousie maladive ; l’arrogance, déguisée en confiance en soi, qui devient une barrière à l’humilité et à l’écoute des autres ; la cupidité, justifiée par le désir de réussite, qui engendre une quête insatiable de possessions matérielles ; l’hypocrisie, présentée comme diplomatie, qui nourrit le mensonge et la dissimulation.

Le résultat de cela est une société individualiste, où chacun est encouragé à poursuivre ses intérêts personnels au détriment des valeurs collectives et du bien-être commun. Les jeunes, témoins de cette dégradation, se sentent étouffés par un système qui privilégie le profit immédiat et l’exploitation des ressources au lieu de favoriser le développement durable et le progrès collectif. Nous les entendons souvent dire : « Pourquoi rester ? Pour payer des sommes exorbitantes dans les universités privées et ensuite travailler pour un salaire de 500 dollars où l’on m’exploite comme un rat jusqu’à l’aube ? Nous ne sommes pas des esclaves. Et puis, quelle retraite aurai-je ici ? Comment serai-je assuré ? Et mes parents ? Qui s’occupera d’eux lorsqu’ils ne pourront plus travailler si le gouvernement s’en moque ? Comment ferai-je si je n’ai pas les moyens financiers ?

Et dois-je rester stressé, ne sachant pas si la mort par la guerre arrivera ? Il n’y a pas de système de justice, pas de services de base abordables, pas de reddition de comptes du gouvernement concernant la corruption, pas de bureau de protection des consommateurs ni de soins de santé gratuits et complets. »

Face à cette réalité, beaucoup choisissent de quitter le Liban, aspirant à une vie meilleure ailleurs. Ce départ n’est pas seulement un acte de désespoir, mais également une quête d’opportunités et d’un environnement où leurs aspirations peuvent s’épanouir sans être entravées par la corruption ambiante. En s’en allant, ils cherchent à échapper à un avenir assombri par les vices de leur société, espérant trouver dans d’autres contrées un terreau fertile pour leurs rêves et leurs ambitions.

Mais un détail que nous oublions est le suivant : ces jeunes font partie du peuple… et, par conséquent, ils font également partie du problème. Cette fuite des cerveaux contribue à un cercle vicieux, où le pays perd ses talents et son potentiel, rendant encore plus difficile la construction d’un avenir radieux.

Alors, à qui la faute revient-elle vraiment ? Est-ce aux générations plus âgées qui refusent d’offrir davantage d’espoir à leurs cadets ou est-ce aux jeunes eux-mêmes qui n’osent plus espérer et préfèrent abandonner leur Liban pour construire un futur plus prospère ailleurs ? L’étranger est-il réellement la solution ?

Il est crucial de se poser ces questions afin de comprendre la complexité de la situation. La responsabilité est partagée, et sans un véritable engagement collectif, le cycle de désespoir perdurera. Si les jeunes fuient, c’est aussi parce qu’ils ne voient pas d’alternative tangible à leur souffrance. Pourtant, chaque départ laisse une empreinte indélébile sur le tissu social du Liban, et ceux qui choisissent de rester doivent faire face à la tâche ardue de reconstruire un pays qui semble s’effondrer autour d’eux. Cela nécessite une volonté de collaboration intergénérationnelle, un dialogue franc et une détermination à rétablir les valeurs de solidarité et d’espoir qui ont autrefois nourri l’esprit du Liban.

À l’aube de cette introspection, il est légitime de se demander : comment pouvons-nous, en tant que société, transformer notre désespoir en espoir et redonner aux jeunes la force et la motivation de croire en un avenir qui leur appartient ?

Christina ALAM

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Que reste-t-il pour ces jeunes pour qu’ils se battent pour rester au Liban ? La trahison ? L’humiliation ? L’injustice ? Le rejet ? La guerre ? La misère ? Personne ne semble écouter la voix de ces innocents qui se trouvent obligés de quitter le cœur doux du Liban, espérant un futur plus prometteur. Mais encore, ce n’est qu’espérer. Un futur meilleur n’est pas garanti. Laisser sa famille pour vivre ailleurs, n’est-ce pas âcre ? Vivre dans un pays avec ce sentiment qui brûle, le sentiment des adieux aux vieilles rues de Beyrouth et aux brises des montagnes, est-ce mieux ? Cependant, comment pourraient-ils rester ? Pourquoi rester ?Arrêtons un instant de blâmer nos dirigeants corrompus, avides de pouvoir et aveuglés par leur amour de l’argent, et tournons notre regard vers le peuple qui leur permet de demeurer en...
commentaires (2)

Tout à fait d'accord avec le commentaire Très bel article

Khabouth José

19 h 21, le 04 septembre 2024

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Commentaires (2)

  • Tout à fait d'accord avec le commentaire Très bel article

    Khabouth José

    19 h 21, le 04 septembre 2024

  • Très bel article.

    Raed Habib

    09 h 55, le 04 septembre 2024

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