Deux Libanais ont roué de coups un jeune Syrien samedi matin dans la localité de Kfar Saroun, dans le Koura. La vidéo de l’agression, qui dure près de trois minutes, a été diffusée dans la presse locale et sur les réseaux sociaux. L’on voit le Syrien, H.S., retenu par un homme tandis qu’un autre lui porte des coups. L’un des assaillants utilisait tantôt un bâton, tantôt une arme à feu, puis ses propres mains.
L’un des hommes, B.N., est un agent de la Sécurité de l’État et assure la protection rapprochée du député du Koura, Adib Abdel Massih, qui a confirmé l'incident au téléphone à L'Orient-Le Jour. Le parlementaire a ajouté que le second assaillant, C.K., est un « ami » de B.N. Selon la presse locale, le ressortissant syrien serait un mineur âgé de 17 ans.
« Il n'aurait pas dû se comporter de la sorte »
Le député confirme que c’est bien son garde du corps que l’on voit sur les images en train de frapper le jeune Syrien. « L'incident a eu lieu dans un commerce du Koura », affirme Adib Abdel Massih. L’élu raconte sa version des faits : « J’ai appris que la femme de l'agent de sécurité attendait dans sa voiture aux vitres teintées son fils, qui suivait un cours particulier. Le Syrien tournait autour du véhicule de manière suspecte. Apparemment, il pensait qu’il n’y avait personne à bord. La femme qui a pris peur est aussitôt sortie de la voiture et lui a crié dessus, puis a appelé son époux », raconte le député. « Malheureusement, il a agi sans réfléchir et s’est défoulé. Il n’aurait pas dû se comporter de la sorte », poursuit-il.
Selon le député, l'agent s’est livré à la Sécurité de l’État et est actuellement détenu. Contacté, ce service n’avait pas plus d’informations à communiquer. Suite à l’agression, le jeune Syrien a été admis à l’hôpital de Koura, a confirmé une source médicale qui a pris en charge le jeune homme âgé de « 17-18 ans ». Celui-ci est sorti de l’établissement dimanche après-midi.
Selon une vidéo diffusée sur le compte X du média libanais, lebanos, le jeune Syrien, qui était encore hospitalisé, raconte sa version des faits à un journaliste. Il marchait dans la rue et sa main a touché la voiture de la femme de l'agent de sécurité. « La dame m'a dit : c'est quoi ton problème ? Et elle m'a accusé de vouloir arracher quelque chose de sa voiture », dit-il. « Je suis entré ensuite dans un commerce et après 20 ou 45 minutes, ils s’en sont pris à moi et m’ont frappé. Il y en a un qui a utilisé un bout de bois [...] qui s'est brisé sur ma tête », raconte la victime. Il ajoute que l’un des hommes a pointé sur lui un pistolet puis l’a frappé avec l'arme. Selon lui, les deux assaillants ont quitté les lieux une fois que leur patron est arrivé. « S’il n’était pas venu, j’aurais été battu à mort », raconte-t-il. Le jeune Syrien a aussi affirmé que les assaillants l’avaient menacé, ainsi que le commerce.
Une source au sein de l’hôpital a indiqué à L'OLJ que le patient ne présente « aucune fracture », mais des « contusions partout dans le corps : à la tête, sur le dos, le cou, l'œil, le coude… ». « Il était en pleurs et terrifié », poursuit-elle. Nous avons pu avoir accès au rapport du médecin légiste qui a confirmé qu’après examen, la victime ne présentait pas de fracture, mais que des points d'inflammation ont été diagnostiqués. « Il est apparu qu’il souffre d’une douleur à l’épaule, au coude et à l’os de l’œil », note le rapport, qui ajoute que des analgésiques lui ont été prescrits.
L’affaire a aussitôt pris une connotation politique. Le Parti syrien national social (PSNS) a condamné dans un communiqué l’agression qu’il qualifie de comportement « raciste odieux » et de « défi flagrant à l'autorité de l’État ». Il a appelé « la justice et les services de sécurité à agir rapidement pour arrêter et punir les agresseurs et leurs commanditaires, dont les noms sont connus, afin qu'ils servent d'exemple à tous ceux qui ont l'audace de rejoindre un groupe malfaisant qui viole les lois et constitue une menace pour la sécurité et la stabilité nationales ».
Le député Adib Abdel Massih dénonce, quant à lui, une « instrumentalisation politique ». « Je suis actuellement en voyage, mes gardes du corps sont donc en congé. Certains essayent de politiser cette affaire alors que c’est un cas isolé. Cela n’a rien à voir avec la politique ou le communautarisme », dit-il.
Le bureau du député avait également réagi samedi sur son compte X : « M. Abdel Massih tient à préciser qu'il s'agit d'une bagarre en dehors du cadre du service, personnelle et sans rapport avec lui. Il rejette la logique de la violence contre toute personne, qu'elle soit Libanaise ou étrangère, et laisse aux organismes concernés et à la justice le soin d'enquêter et de traiter le dossier. Nous rejetons catégoriquement la politisation de cette affaire individuelle et demandons aux médias d'être précis et prudents dans leurs informations ».
Le bureau a ajouté que l’élu du Nord a envoyé son chef d'état-major, le général de brigade Joseph Yacoub, « pour rendre visite au blessé à l'hôpital afin de s'assurer de son état de santé et lui apporter toute aide si nécessaire ».
L’agression a eu lieu alors que les migrants et réfugiés syriens font face à la résurgence d’une campagne politique appelant à leur départ, à laquelle se sont greffés de multiples actes de violence à leur encontre depuis le meurtre début avril de Pascal Sleiman, un responsable des Forces libanaises à Jbeil, pour lequel des suspects syriens ont été arrêtés.
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15 h 30, le 27 mai 2024