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Politique - Réfugiés syriens

Hector Hajjar à « L’OLJ » : L’État n'a pas fait son devoir

Au lendemain de l’interview que le représentant du HCR au Liban, Ivo Freijsen, a accordé à « L'Orient-Le Jour », le ministre sortant des Affaires sociales revient sur le dossier des réfugiés syriens en multipliant les critiques contre le comportement de l'agence onusienne tout en reconnaissant du bout des lèvres que les autorités libanaises ont fait preuve de négligence.

Hector Hajjar à « L’OLJ » : L’État n'a pas fait son devoir

Le ministre libanais des Affaires sociales Hector Hajjar. Photo A.-M.H.

Depuis plusieurs mois, la présence des réfugiés et migrants syriens sur le territoire suscite des crispations croissantes au sein de la classe politique et dans les relations avec la communauté internationale. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en particulier est la cible de critiques acerbes à la suite d'une missive adressée il y a quelques jours au ministère de l'Intérieur par son représentant au Liban, Ivo Freijsen, dans laquelle il exprimait son désaccord avec certaines mesures répressives prises par les autorités libanaises à l'encontre des ressortissants syriens (voir L'OLJ du 24 mai). À son tour, le ministre sortant des Affaires sociales, Hector Hajjar (proche du Courant patriotique libre), livre son point de vue.    

Un des points conflictuels entre les autorités libanaises et le HCR porte sur les données relatives aux ressortissants syriens dont dispose ce dernier. Pourquoi cette question a-t-elle pris tant d’ampleur ?

Les autorités libanaises se sont démenées depuis 2021 pour obtenir ces données, ce qui leur revient de droit. Deux ans et demi plus tard, le HCR les a finalement remises, au terme d’un accord,  mais ces données sont inutilisables. Pour préserver sa souveraineté, un État doit pourtant savoir qui se trouve chez lui, qui est entré ou sorti, qui est retourné en Syrie ou a pris la mer illégalement.

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Nous envisagions de développer une application pour enregistrer et classifier les ressortissants syriens du Liban, en coopération avec la Sûreté générale, en incluant les travailleurs, personnes en danger nécessitant protection, hôtes provisoires en attente de réinstallation...  Cela a suscité une réaction très négative de la part du représentant du HCR.

Il est clair que la communauté internationale craint que ces données soient remises au régime syrien, ou que ces personnes soient déportées...

Jamais dans l’histoire du pays, depuis la présence palestinienne au Liban, nous n’avons remis des prisonniers, des déplacés ou des réfugiés à quiconque (en dehors des opérations de « retour volontaire », NDLR), pas plus que les informations les concernant. Et nous n’avons nullement l’intention de déporter ou de remettre des personnes ayant besoin de protection ou ayant des problèmes avec l’État syrien, ni même de révéler les données les concernant. Nous respectons les conventions internationales. Nous travaillons étroitement avec le Comité international de la Croix-Rouge et l’Organisation internationale pour les migrations, dans le respect de la protection sociale, sécuritaire et politique.

De plus, entre le Liban et la Syrie, aucun accord n’existe visant à remettre les dissidents et la question des données n'a pas été abordée avec le président Assad.

Le Liban n’a jamais géré convenablement la question des réfugiés syriens. Il a laissé faire la communauté internationale. Il hausse le ton, aujourd’hui, pour accélérer leur retour en Syrie. Est-ce la bonne méthode ?

L’État n’a jamais été totalement absent dans la gestion de ce dossier, mais il n’a pas fait son devoir, entre mauvaise gouvernance et décisions en rangs dispersés. De 2011 à 2015, les autorités ont laissé au HCR le soin de gérer le dossier. À partir de 2015, le Plan de réponse à la crise au Liban (LCRP) a organisé la relation entre l’État libanais et le HCR. Les défis auxquels a été confronté le pays, Covid-19, explosion au port de Beyrouth, crise financière et économique… ont entravé l’avancée du dossier.

Dès l’arrêt des opérations militaires en Syrie (Depuis 2011, les combats n'ont jamais cessé, et l'offensive de Damas et ses alliés est toujours en cours dans la province d'Idleb, ndlr), le Liban a demandé au HCR d’arrêter d’enregistrer les entrées. Il en avait déjà accueilli plus de 860 000 déplacés, mais il n’a pas réussi à stopper le flux. Outrepassant la décision étatique, le HCR a poursuivi l’enregistrement, considérant les nouveaux venus comme déplacés (réfugiés, NDLR). Aujourd’hui encore, nous ne sommes pas d’accord sur les chiffres.

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Dès 2021, nous avons lancé une stratégie et appelé la communauté internationale à voir le dossier sous toutes ses formes : protéger les déplacés (réfugiés) effectifs et appliquer la loi envers ceux qui ne sont pas considérés comme déplacés, les travailleurs notamment, mais aussi prendre conscience des capacités d’absorption du Liban. La réponse du HCR n’a comporté que des promesses et la langue de bois.

Pourquoi les relations se sont-elles subitement dégradées entre Liban et le HCR ?

Toutes les décisions que le HCR a prises l’ont été de manière unilatérale et sans coordination avec les autorités libanaises, notamment la dollarisation de l’assistance aux Syriens, la baisse de l’assistance en « cash » et la récente réduction de la couverture de santé, sans contrepartie. Le HCR évoque un manque de fonds, mais la stabilité sociale et la sécurité nationale sont aujourd’hui en péril du fait de l’extrême pauvreté de 80 % des ressortissants syriens qui vont se retrouver sans ces aides .

Nous ne sommes pas contre le mandat du HCR. Nous dénonçons ses programmes qui ne fonctionnent pas et le comportement de ses responsables. Le HCR doit nous écouter.

Le Liban parle de « le retour volontaire » des réfugiés syriens. Pourquoi ce terme alors que le régime syrien utilise cette affaire comme un moyen de pression  

La décision n’a pas été prise du jour au lendemain. Nous devons juste appliquer la loi, afin de mettre fin au chaos. Le ministère de l’Intérieur fait son travail, et nous devons l’aider. Les mesures appliquées dans les régions sont accompagnées de décisions de justice, qu’il s’agisse de confisquer des deux-roues sans permis ou d’éviction de familles syriennes installées illégalement. Le Liban a ouvert ses frontières pour des raisons humanitaires. Mais le nombre de Syriens a dépassé la population libanaise dans certaines régions. 

Quels sont les moyens dont dispose l’État pour organiser ces opérations ?

L’approche étatique est complémentaire. Elle consiste d’abord à enregistrer et répertorier les Syriens sur le territoire libanais. Nous attendons les chiffres de la Sûreté générale. Nous identifierons alors ceux qui pourraient bénéficier d’un regroupement familial en Europe, en coopération avec les décideurs internationaux.

Nous déterminerons ensuite, dans le cadre d’un dialogue calme avec le HCR et l’Europe, les personnes qui ont besoin de protection. Nous leur assurerons la protection, dans le respect des conventions internationales et des lois locales.

Parallèlement, un travail doit être entrepris avec les autorités syriennes, afin de permettre un retour sûr des déplacés.

Cette stratégie requiert un alignement des positions et décisions du gouvernement libanais. L’État libanais doit faire son devoir et ne pas permettre au HCR de prendre des décisions qui vont à l’encontre de l’intérêt du Liban. Le HCR est tenu par l’accord signé en 2003 avec la SG sur le fait que le Liban n’est pas une terre d’asile, mais de passage.

Depuis plusieurs mois, la présence des réfugiés et migrants syriens sur le territoire suscite des crispations croissantes au sein de la classe politique et dans les relations avec la communauté internationale. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en particulier est la cible de critiques acerbes à la suite d'une missive adressée il y a quelques jours au ministère...
commentaires (4)

Vous etes ministre alirs faites votre devoir

Staub Grace

22 h 54, le 25 mai 2024

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Commentaires (4)

  • Vous etes ministre alirs faites votre devoir

    Staub Grace

    22 h 54, le 25 mai 2024

  • Le Liban n’a pas fait son devoir. Ah bon? Dites nous où le Liban a fait son devoir? Electricité, eau, justice, santé, éducation, défense, sécurité, explosion du port, élections…M.

    PPZZ58

    17 h 55, le 25 mai 2024

  • Pourquoi autant de NDLR?? Le ministre ne connaît pas son dossier? Ce sont des “déplacés”. Le statut de réfugié n’etant pas reconnu par le Liban Officiel …

    Ventre-saint-gris

    09 h 28, le 25 mai 2024

  • Le gouvernement libanais n’a pas été fichu d’organiser un recensement général de la population libanaise depuis l’indépendance du pays. Il faudrait peut-être commencer par là.

    TrucMuche

    09 h 11, le 25 mai 2024

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