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Campus - INNOVATION

Deux équipes de l’USJ mettent au point un engrais aux vertus multiples

Répondant aux défis auxquels font face les agriculteurs aujourd’hui, l’ESIB et l’ESIAM de l’Université Saint-Joseph ont développé et testé un engrais à libération lente, dont la procédure d’obtention d’un brevet est en cours. Son mérite : respecter l’environnement et favoriser la productivité agricole, tout en présentant des avantages économiques.

Deux équipes de l’USJ mettent au point un engrais aux vertus multiples

Essais et analyses chimiques effectués par des étudiantes en génie chimique et pétrochimique à l’ESIB. Photo Renalda al-Samra

Dans le cadre d’un appel à projets lancé en 2022 par l’Industrial Research Achievement Association (IRALEB ou l’Association pour la réalisation de la recherche industrielle), un groupe d’étudiants en 4e année de génie chimique et pétrochimique à l’ESIB, sous la supervision de Jihane Rahbani Mounsef, directrice de ce département, a travaillé sur le développement d’un engrais à libération lente. Consistant en un hydrogel super absorbant, à base d’un polymère biodégradable, combiné à des nutriments, ce produit agit en absorbant et en stockant l’eau et les nutriments dans sa structure gélifiée. Son principe de fonctionnement est le suivant : les particules d’hydrogel libèrent lentement leur contenu vers les racines des plantes, les approvisionnant ainsi d’une manière constante. « IRALEB finance les projets qui répondent aux besoins de recherche et de développement des industries libanaises. Nous avons donc travaillé sur un projet qui puisse développer un prototype de qualité industrielle », note Jihane Rahbani Mounsef. La directrice du département de génie chimique et pétrochimique indique ainsi que « l’idée était de combiner l’engrais avec un moyen de rétention d’eau, dans une seule formulation, afin de réduire la consommation d’eau, d’augmenter le rendement, tout en réduisant la pollution de l’environnement ». Afin de vérifier l’efficacité de l’engrais, des étudiants de 5e année de l’École supérieure d’ingénieurs d’agronomie méditerranéenne (ESIAM), sous la supervision de Wadih Skaff, directeur de cet établissement, ont testé ce produit sur des plants de tomates cultivés dans la Békaa. D’après les résultats obtenus, le rendement a presque doublé, tandis que les besoins en irrigation ont été réduits, par rapport à la méthode de fertilisation conventionnelle utilisée par les agriculteurs locaux.L’idée derrière cet engrais à libération lente est de répondre aux différents besoins du secteur agricole. « Avec le changement climatique et ses conséquences, les pénuries d’eau sont de plus en plus remarquables. Même si au Liban on ne le ressent pas encore vraiment, cette année les chutes de neige ont été minimes, ce qui est alarmant. Pour cela, l’idée était de concevoir un produit qui permette tout d’abord d’économiser l’eau », souligne Wadih Skaff. Le directeur de l’ESIAM avoue que « les agriculteurs n’étaient pas convaincus de l’efficacité du produit au début. Mais les essais ont démontré que le volume d’eau utilisé par les plants était inférieur de 60 à 70 % par rapport à celui utilisé d’habitude par les agriculteurs ».Réduire la pollution a également constitué un aspect majeur dans le développement de l’engrais. « Avant la crise économique, les agriculteurs utilisaient des quantités excessives de ces substances, dont 50 à 70 % finissaient dans l’environnement, ce qui présente des risques pour la santé humaine et pour le biotope », rappelle Jihane Rahbani Mounsef. L’un des objectifs a donc été d’éviter que les engrais chimiques atteignent les nappes phréatiques ou de préserver les terres cultivables. « L’usage excessif des engrais a causé dans certaines parcelles de la plaine de la Békaa la salinisation des sols qui sont devenus blancs, ce qui est très dangereux. Lorsqu’un sol est salinisé, il n’est plus possible de le cultiver. De même, il est essentiel d’effectuer une rotation des cultures. Or, actuellement, les rotations sont pratiquement absentes, surtout que l’urbanisation a gagné du terrain dans cette région », explique Wadih Skaff. En parallèle, alors que la superficie des terres cultivables diminue, la demande en produits agricoles augmente. Selon Jihane Rahbani Mounsef, l’engrais développé répond non seulement aux besoins écologiques, mais il assure également la sécurité alimentaire d’une population croissante. « Afin d’augmenter la production alimentaire de 60 à 110 % pour répondre à la demande croissante de la population mondiale en 2050, il s’agit de savoir comment utiliser les terres agricoles d’une manière plus efficace. Si en utilisant les terres disponibles on parvient à augmenter le rendement de production, ceci nous aidera à assurer la sécurité alimentaire sans nuire à l’environnement. Et c’est à ce besoin que répond le produit que nous avons conçu », assure-t-elle. Ainsi, cet engrais permet d’augmenter la productivité agricole en améliorant l’efficacité d’utilisation des nutriments, selon la directrice du département de génie chimique et pétrochimique.

Les chercheurs de l'USJ ont développé et testé un engrais à libération lente dont la procédure d’obtention d’un brevet est en cours. Photo Wadih Skaff

Un engrais compétitif et facile à produire

Par ailleurs, la production de l’engrais à libération lente tient compte du facteur économique. Suite à la crise, les agriculteurs libanais n’étaient plus en mesure d’acheter les engrais chimiques disponibles sur le marché, comme c’était le cas auparavant. « Les tests opérés par l’ESIAM sur les champs ont montré que pour deux applications de notre produit, en comparaison avec cinq applications de la méthode conventionnelle, le rendement était plus élevé et le besoin en irrigation moindre », souligne Jihane Rahbani Mounsef. La réduction en eau, en énergie et en engrais utilisés permet ainsi aux agriculteurs de réaliser des économies. « Les résultats obtenus sur les champs ont démontré que l’utilisation de notre produit, en comparaison avec les produits conventionnels utilisés par les agriculteurs libanais, est plus compétitive en termes de coût », poursuit-elle. Il s’agit du coût des matières premières, mais aussi de la consommation énergétique et de la main-d’œuvre. Quant à la production de cet engrais, elle pourrait être réalisée à grande échelle. « La méthode de production étant simple, l’engrais peut être produit facilement au Liban », d’autant plus que le polymère est disponible sur le marché. « Il est utilisé au Liban dans les industries alimentaires comme gélifiant. Aujourd’hui importé, il serait possible de l’extraire plus tard à partir des déchets organiques des industries agroalimentaires, comme les épluchures de pommes de terre des usines de chips. » Afin d’attirer des investisseurs intéressés à développer le produit, Jihane Rahbani Mounsef précise que, dans une phase ultérieure, il s’agira de tester l’engrais sur d’autres cultures, comme les arbres fruitiers, pour prouver son efficacité, ajoutant qu’il serait aussi possible d’utiliser « la même matrice d’hydrogel pour combiner herbicide et agent de rétention d’eau. En d’autres termes, utiliser la même technologie pour produire des formulations à libération lente d’herbicide en vue de réduire la pollution ». Les responsables du projet visent un autre objectif : concevoir un mini-robot, en collaboration avec le département électromécanique de l’ESIB, qui pourrait améliorer la précision de l’application de l’engrais grâce à des capteurs avancés, une navigation GPS et des algorithmes d’intelligence artificielle.

Dans le cadre d’un appel à projets lancé en 2022 par l’Industrial Research Achievement Association (IRALEB ou l’Association pour la réalisation de la recherche industrielle), un groupe d’étudiants en 4e année de génie chimique et pétrochimique à l’ESIB, sous la supervision de Jihane Rahbani Mounsef, directrice de ce département, a travaillé sur le développement d’un engrais...
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