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Campus - interview

Dans cette époque d’incertitudes, s’intéresser aux civilisations du passé est important

Entretien avec la professeure Françoise Briquel-Chatonnet, titulaire de la Chaire d’études phéniciennes de l’USJ lancée le 28 mai dernier.

Dans cette époque d’incertitudes, s’intéresser aux civilisations du passé est important

Françoise Briquel-Chatonnet, première titulaire de la Chaire d’études phéniciennes de l’USJ. Photo DR

Pourquoi, à votre avis, assiste-t-on actuellement à un regain d’intérêt pour la civilisation phénicienne, longtemps ignorée ?

Dans une époque pleine d’incertitudes, où la mondialisation tend à imposer un mode de vie et d’être commun, s’intéresser à la civilisation phénicienne comme aux autres civilisations du passé est important. C’est une manière de s’enraciner pour mieux s’épanouir, de savoir d’où l’on vient, de se connaître pour se tourner vers l’avenir et les autres avec sérénité.

Pouvez-vous nous présenter brièvement les objectifs de la Chaire d’études phéniciennes ?

Le but de cette chaire, pour laquelle il faut louer l’Université Saint-Joseph, est de donner de la visibilité à la culture phénicienne au Liban et aux travaux qui se font dans ce domaine, ainsi que de les stimuler. Pour cela, la chaire a l’ambition de mettre en synergie les acteurs du travail et de la recherche au Liban. Plus largement, elle veut se développer comme un organe d’information sur la recherche concernant le monde phénicien, au-delà du Liban, dans la communauté internationale. Elle vise donc un double public : le public qui s’intéresse à la culture et particulièrement à la culture phénicienne en leur apportant les fruits de la recherche actuelle et les chercheurs eux-mêmes en les aidant à faire connaître leurs travaux à ce public.

Quels sont vos plans à court terme ?

Notre premier projet consiste à créer un site web hébergé par l’Université Saint-Joseph. Ce site informera sur toutes les activités de la chaire et, dans la mesure du possible, sur les événements ou activités au Liban liés à la civilisation phénicienne (cours, conférences, fouilles, etc.). Il comprendra également une section documentaire proposant des fiches sur des sites, des objets, des notes de lecture et un carnet de recherche. Ce site est actuellement en construction et sera opérationnel dès cet été. Notre deuxième projet, qui débutera à la rentrée, est un cycle de conférences annuel, organisé pendant l’année académique et ouvert à tous ceux qui souhaitent y assister. Ces conférences pourront également être diffusées sur Zoom. Enfin, des cours seront dispensés dans le cadre de la chaire dès l’année prochaine, sans entrer en concurrence avec l’offre existante. Toutes ces activités seront annoncées sur le site web. D’autres initiatives seront également développées à moyen terme.

Quels sont les comités sur lesquels la chaire s’appuie ?

La chaire s’appuie sur trois comités : un comité d’honneur présidé par Mme Maha el-Khalil Chalabi, qui a offert sa propre bibliothèque à la chaire, et qui comprend aussi les mécènes ainsi que des personnalités éminentes. Leur rôle est d’être un relais et un soutien pour la chaire, notamment dans sa recherche de financement ; un comité scientifique international qui apportera son soutien et son expertise scientifique et, enfin, un comité d’organisation, constitué de personnalités œuvrant dans des institutions scientifiques libanaises et impliquées dans l’histoire ou le patrimoine phénicien. Le comité exécutif, quant à lui, est chargé d’organiser le programme de la chaire et de collaborer quotidiennement à ses activités.

Pourquoi la création de cette Chaire d’études phéniciennes en ce moment particulier de l’histoire du Liban ? Et quels défis a-t-elle dû relever ?

Le Liban traverse une période de grandes difficultés et d’incertitudes. Cependant, c’est aussi un moment où le pays a besoin de se cimenter, d’affirmer son existence et sa personnalité, de retrouver ses racines. La civilisation phénicienne est l’une de ces racines. La création de cette chaire a dû surmonter la situation économique difficile au Liban, la crise sanitaire et les défis sécuritaires. Mais peut-être plus fondamentalement, elle a dû surmonter le sentiment d’inutilité qui entraîne parfois une certaine inertie. Comme c’est souvent le cas, la concrétisation d’un tel projet dépend fortement de l’énergie et de l’engagement de personnes déterminées à le réaliser. La chaire n’aurait pu voir le jour sans l’action du doyen Roland Tomb de l’Université Saint-Joseph, qui a su convaincre le recteur et le conseil académique, ainsi que des donateurs généreux.

Une dernière question : Les Libanais peuvent-ils dire « nos ancêtres les Phéniciens » ?

Les Libanais peuvent dire « nos ancêtres les Phéniciens » comme les Français peuvent dire « nos ancêtres les Gaulois ». Cela n’est pourtant pas méconnaître, dans la construction de la France, les apports nombreux de la domination romaine, des invasions germaniques, de l’avancée des Arabes, ni des multiples échanges économiques, démographiques et culturels de cette région qui fut un carrefour, ni revendiquer l’exclusivité de ces ancêtres, puisque l’aire de diffusion du monde gaulois était bien plus large que la France actuelle.

Pourquoi, à votre avis, assiste-t-on actuellement à un regain d’intérêt pour la civilisation phénicienne, longtemps ignorée ? Dans une époque pleine d’incertitudes, où la mondialisation tend à imposer un mode de vie et d’être commun, s’intéresser à la civilisation phénicienne comme aux autres civilisations du passé est important. C’est une manière de s’enraciner pour mieux s’épanouir, de savoir d’où l’on vient, de se connaître pour se tourner vers l’avenir et les autres avec sérénité.Pouvez-vous nous présenter brièvement les objectifs de la Chaire d’études phéniciennes ? Le but de cette chaire, pour laquelle il faut louer l’Université Saint-Joseph, est de donner de la visibilité à la culture phénicienne au Liban et aux travaux qui se font dans ce domaine, ainsi que de les stimuler....
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