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Campus - PARCOURS

Nour Sfeir, une chercheuse persévérante et publiée

Après neuf longues années de recherche dans de grands laboratoires en France, une jeune Libanaise figure parmi les premiers auteurs à avoir découvert les effets positifs de la protéine RIP 140 sur les cellules cancéreuses colorectales.

Nour Sfeir, une chercheuse persévérante et publiée

Nour Sfeir. Photo DR

Son envie de faire avancer la science et la médecine, pour combattre les cancers incurables, et sa curiosité de découvrir tous les aspects encore méconnus du corps humain ont poussé Nour Sfeir à choisir le domaine de la biochimie et de la recherche fondamentale. De la licence en sciences de la vie et de la terre et du master en structure-interaction des macromolécules et génomique fonctionnelle, entreprise à l’Université Saint-Joseph, Nour relève « la richesse du programme très varié, qui lui a permis de toucher à tous les domaines de la biochimie et l’a beaucoup aidée » dans le cadre de ses expériences ultérieures. En 2013, son master en poche, elle entreprend un stage de six mois au laboratoire Joseph Fourrier à Grenoble où elle découvre différentes manipulations expérimentales. Elle sait alors qu’elle a trouvé sa voie, décide d’entreprendre un doctorat en recherche fondamentale et s’inscrit à l’Institut de recherche en cancérologie de Montpellier (IRCM) lié à un hôpital spécialisé dans les cancers colorectaux.

Ses années de recherche ont porté leurs fruits

Au bout des trois premières années de doctorat où elle travaillait sans relâche plus de 10 heures par jour, elle obtient une bourse de la Fondation pour la recherche médicale (FRM) et entame sa quatrième année de doctorat dans un laboratoire spécialisé dans la recherche du cancer colorectal. Avec l’aide de son chef de laboratoire, Vincent Cavailles, qui avait précédemment découvert une protéine, la RIP 140, un facteur de transcription qui se fixe au niveau des gènes, elle décide de pousser ses recherches dans cette voie en utilisant la méthode Nocher, afin d’étudier les aspects de cette protéine en la transférant dans les cellules pour voir les conséquences des résultats obtenus et leur impact sur les cellules cancéreuses colorectales. « Le plus dur, c’est le tâtonnement lors des expériences, sans savoir si c’est la bonne voie qui mènera à un résultat positif ou c’est une voie stérile qui n’aboutira à rien. Parfois, je tentais trois à quatre expériences par semaine sans obtenir de résultats positifs. Il fallait alors recommencer l’expérience en modifiant les doses ou les nombres de cellules sur lesquelles on a travaillé, attendre que les cellules poussent en culture, les récupérer, les ensemencer et les intercepter avec la protéine RIP 140, en espérant obtenir un résultat positif. Même si les résultats se révélaient négatifs, il fallait tout de même les interpréter, identifier ce qui n’avait pas fonctionné et fournir des explications qui aideraient les chercheurs suivants poursuivant la même recherche, à savoir quelle voie emprunter », confie Nour Sfeir. Comment a-t-elle tenu le coup face à tant de stress et de fatigue ? « Il faut avoir beaucoup de patience, un moral d’acier et, surtout, être très déterminé et passionné par ce monde exigeant qu’est la recherche pour poursuivre et continuer après tous ces échecs », avoue la jeune femme sans hésiter. « Beaucoup d’étudiants abandonnent au bout de la deuxième ou troisième année. Moi je m’y suis donnée à fond depuis le début. Il faut dire que j’étais très bien secondée par mon chef de laboratoire et très autonome. Je prenais les décisions exactes pour poursuivre l’expérience ou l’arrêter si je voyais que ce n’était pas la bonne voie à suivre. Et c’est cela qui m’a beaucoup aidée », poursuit-elle. Au bout de quatre ans d’expériences, de tâtonnements, d’échecs et de recommencements, Nour découvre « qu’en couplant la protéine RIP 140 à des vecteurs viraux qui vont l’accompagner dans les cellules cancéreuses, elles pourront agir et stopper la prolifération des cellules cancéreuses dans le côlon ». Ses quatre longues années de recherche ont enfin porté leurs fruits. Elle s’attelle alors activement à la tâche de la rédaction de sa thèse avant de la soutenir devant un jury composé de trois chercheurs ainsi que de son directeur de thèse. « Un moment excessivement fatigant et éprouvant, se rappelle Nour. J’avais des douleurs au dos et aux jambes. J’étais morte de fatigue et surtout extrêmement stressée. » Sa thèse enfin validée par le jury, elle obtient son titre de docteur en recherche fondamentale. Le poids et la fatigue extrême de ces quatre longues années, enfermée dans ces laboratoires à travailler nuit et jour sans relâche, se font sentir. « Je ne savais plus comment vivaient les jeunes de mon âge. Je me sentais comme un prisonnier libéré de prison et qui retrouvait la vraie vie après des années d’isolement , avoue Nour. J’étais extrêmement fatiguée. » Malgré l’obtention de son doctorat, elle n’est toujours pas reconnue dans le monde de la recherche et son long parcours est loin d’être achevé. « Pour être officiellement validée et publiée, la thèse devait encore obtenir l’approbation des relecteurs qui devaient examiner la thèse, vérifier certaines manipulations, s’assurer que les informations correspondaient à leurs conditions de publications, rajouter encore plus d’expériences in vivo sur des souris pour renforcer le contenu de l’article », explique Nour Sfeir en se rappelant le sentiment d’injustice qu’elle a ressenti à l’époque pour le peu de reconnaissance pour tout le travail entrepris. « Souvent, les modifications prennent beaucoup de temps et il y a le risque d’être dépassé par d’autres chercheurs travaillant dans le même domaine, ce qui aurait pu arriver dans mon cas. Heureusement, très peu de chercheurs s’étaient lancés dans la voie de la recherche sur la protéine RIP 140 », ajoute-t-elle.

Publication dans la revue scientifique « Molecular Oncology »

La jeune chercheuse se replonge dans les notes de son article, revoit certaines manipulations et se lance dans le monde du travail « parce qu’il le fallait », dit-elle amèrement. Il lui faudra six autres années avant que son article soit de nouveau approuvé, validé et officiellement publié dans la revue scientifique Molecular Oncology. Aujourd’hui, neuf ans après le début de son parcours doctoral, elle est enfin devenue une référence dans le monde de la recherche. Elle figure parmi les premiers auteurs qui ont découvert « les effets positifs de la protéine RIP 140 sur les cellules cancéreuses colorectales ». Une fierté qu’elle savoure aujourd’hui, après ces dures années de travail, de fatigue intense et surtout de la « frustration d’avoir attendu neuf ans, pour être reconnue à sa juste valeur ».

Son envie de faire avancer la science et la médecine, pour combattre les cancers incurables, et sa curiosité de découvrir tous les aspects encore méconnus du corps humain ont poussé Nour Sfeir à choisir le domaine de la biochimie et de la recherche fondamentale. De la licence en sciences de la vie et de la terre et du master en structure-interaction des macromolécules et génomique...
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