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Cinéma - Cinéma

Plus que des films : Le Festival International des Femmes du Cinéma de Beyrouth défend l'égalité

Le festival qui promeut les femmes au cinéma revient du 14 au 19 avril avec l’actrice égyptienne Yousra en invitée d’honneur. Rencontre avec son fondateur et directeur Sam Lahoud.

Le fondateur et directeur du Beirut International Women Film Festival Sam Lahoud. Photo DR

Le Beirut International Women Film Festival met en avant les femmes derrière et devant la caméra ; quelles en sont les valeurs ?

Nous avons créé ce festival avec deux missions précises en tête : le premier problème est la manière dont sont représentées les femmes à l’écran. Nous avons fait une étude qui montre que la plupart des rôles féminins sont secondaires, souvent suivant un homme. Seuls 7 % des rôles féminins sont des premiers rôles. Et encore, c’est souvent pour parler d’hommes… C’est le cas dans le cinéma oriental comme occidental. D’ailleurs, on trouve les pires chiffres aux États-Unis ! Notre objectif est donc de montrer qu’il y a des rôles différents et moins stéréotypés à donner à la femme en tant que leader, en tant que personne qui construit son propre destin… Le deuxième problème que le festival aborde est celui de la présence des femmes dans l’industrie cinématographique. Beaucoup de postes dans la production ou la réalisation sont tenus par des hommes. Cela dit, la situation est différente au Liban où il y a beaucoup de femmes à ces postes ; c’est un cas rare qu’il faut encourager et développer !

Ce festival est porté par la Beirut Film Society qui vise à faire du cinéma un moteur de progrès, notamment à travers des programmes comme Girls for Change. Comment se passent en pratique ces évolutions dans le pays ?

La Beirut Film Society est mère de plusieurs projets complémentaires qui partagent les mêmes missions. Girls for Change, qui sensibilise de jeunes filles de milieux défavorisés aux métiers du cinéma, est directement lié à l’émancipation des femmes. On applique dans tous nos festivals et programmes (qu’il s’agisse de Cinema for Peace, Children and Family Festival, Beirut Shorts…) ces mêmes dimensions de partage des rôles et cette même volonté de changer l’image des femmes. Cela passe avant tout par une ambition éducative. D’ailleurs, la majorité des membres de la Beirut Film Society sont des enseignants et des professeurs d’université.

Cette année, le festival met à l’honneur l’actrice et chanteuse égyptienne Yousra. En quoi cette icône du cinéma arabe depuis plus d’un demi-siècle nous parle de la place de la femme dans le 7e art hier et aujourd’hui ?

Yousra est une icône, mais à travers elle, ce sont toutes les femmes qui suivent cette même trajectoire de vie que l’on veut honorer. La célébrité est une chose (et aujourd’hui, elle est plutôt simple à atteindre), mais avoir une telle cohérence dans sa carrière et l’aborder d’une manière aussi saine et honnête est quelque chose de particulièrement louable. Yousra est une femme qui a fait des choix, qui a su prendre position. C’est un modèle que l’on veut célébrer.

Le mouvement #metoo a le même âge que le festival, qui célèbre cette année sa septième édition. Cette libération de la parole continue de secouer le cinéma international en dénonçant les nombreuses violences sexuelles et sexistes subies par les femmes. Pourtant, ce combat semble encore assez absent des festivals du monde arabe. Quelle place tient-il dans le BWFF ?

C’est une coïncidence que le festival ait commencé en même temps que le mouvement #metoo, qui a été une étape très importante pour l’industrie cinématographique. Ça a libéré beaucoup de personnes, et maintenant, nous pouvons au moins en parler ouvertement pour pouvoir trouver des solutions aux problèmes. Il y a encore beaucoup de tabous à ce sujet dans le monde arabe, mais peu à peu, la parole se libère. Notre rôle à ce sujet n’est pas juste cérémonial. Il doit aussi être question d’élaborer des politiques et les appliquer dans le milieu. Nous travaillons là-dessus avec Sabbah Productions pour faire en sorte que ces nouvelles pratiques se mettent bien en place dans les environnements de travail. Ce sont des problématiques essentielles, car beaucoup de femmes quittent les métiers du cinéma, écœurées par ce qui peut se passer.

Dans une perspective de prise de pouvoir des femmes sur ce qui les touche, envisagez-vous un jour de laisser votre poste de directeur du festival à une femme ?

Je suis directeur, mais nous sommes avant tout des collègues ! Les décisions sont prises en équipe, et l’équipe est principalement féminine. La directrice artistique Doris Saba joue notamment un rôle de premier plan. Il se trouve que pour l’instant, je suis le directeur du festival et que j’ai encore des choses à donner, mais je ne le serai sûrement plus à un moment et quelqu’un d’autre prendra la relève, un homme ou une femme. Ce n’est pas un club réservé aux femmes, nous voulons que les hommes participent au changement. 

Au programme 
Douze longs-métrages, neuf documentaires, vingt-sept courts-métrages, douze documentaires courts, huit courts-métrages d’animation et cinq films sur l’art de la danse sont au programme du 7e Beirut International Women Film Festival.
Parmi les longs-métrages à signaler, celui d’ouverture, Back to Alexandria, de Tamer Rugli, avec Fanny Ardant et Nadine Labaki, qui sera projeté le 15 avril à 20h ; Rien à perdre (All to Play for), de Delphine Deloget, avec Virginie Efira et Félix Lefebvre, le 16 avril à 17h30 ; Valley of Exile, d’Anna Fahr, le 16 avril à 20h ; Goodbye Julia, de Mohammad Kordofani, le 17 avril à 16h ; Inshallah a Boy, d’Amjad al-Rasheed, le 18 avril à 16h ; Through the Night, de Delphine Girard, le 18 avril à 17h30, et Elektra, de Hisham Bizri, le 18 avril à 20h.
Le programme complet des projections est à retrouver ici. Les projections auront lieu au Grand Cinemas ABC Dbayé.
Le Beirut International Women Film Festival met en avant les femmes derrière et devant la caméra ; quelles en sont les valeurs ?Nous avons créé ce festival avec deux missions précises en tête : le premier problème est la manière dont sont représentées les femmes à l’écran. Nous avons fait une étude qui montre que la plupart des rôles féminins sont secondaires, souvent...

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